À Claude II Belin, le 12 octobre 1641, note 5.
Note [5]

Le Fèvre (sans prénom connu), originaire de Troyes, était un empirique, adepte de la thériaque. Formé à Rome, il exerçait à Paris dans les années 1640. Guy Patin l’a mentionné à plusieurs reprises et a signalé sa mort à Troyes le 15 décembre 1655. Le Fèvre fut un de ceux qui vinrent au chevet de Richelieu lors de sa dernière maladie en décembre 1642. Son surnom d’égorgeur de rate était sans doute une allusion à la curieuse méthode thérapeutique des briseurs ou fendeurs de rate (Méthode des Italiens en la guérison de la rate, ridicule et imperinente ; Jean ii Riolan, Anthropographie, livre ii chap xxiii [La rate], dans Les Œuvres anatomiques de Me Jean Riolan…, 1629, page 317) :

« Mais reprenons la grosseur de la rate, on en surmonte plus heureusement les duretés et les obstructions par l’usage des médicaments que par celui des coups, bien qu’on nous veuille faire croire que les Italiens ne viennent jamais à bout des leurs qu’à force de frapper dessus : car il serait à craindre que la contusion qui accompagne nécessairement les coups, ne tirât après soi la suppuration. C’est pourquoi je tiens que c’est un conte fait à plaisir ; bien que Cardan, qui en est l’auteur, la veuille faire passer pour une histoire véritable, au 8e livre de la Variété des choses, chap. 44, et que même il en ait conseillé l’usage en sa Petite Méthode. Cette façon de soulager la rate est rejetée par Aquapendente, en ses opérations de chirurgie, où il dit que l’usage en est grandement pernicieux. » {a}


  1. V. note [1], lettre 563, pour un autre passage du même livre sur ce sujet.

La rate (σπλην, splên en grec, lien en latin, spleen en anglais) est un organe abdominal situé dans l’hypocondre gauche (Furetière) :

« Sa chair est comme du sang caillé, rare et lâche comme une éponge, propre pour recevoir et boire les grosses humeurs du foie. Galien dit que l’usage de la rate est de nettoyer le sang féculent et d’attirer l’humeur mélancolique ; {a} et pour cela quelques-uns l’ont appelée faux foie, et d’autres l’organe du ris, {b} d’où vient qu’on dit de ceux qui se réjouissent, qu’ils s’épanouissent la rate. »


  1. Atrabile qu’on croyait venue des capsules surrénales, v. note [5], lettre 53.

  2. Rire.

Désopiler la rate (d’où nous est resté l’adjectif désopilant), c’était, à l’aide de médicaments divers, vider la rate de ses humeurs pour en chasser l’atrabile (mélancolie). L’augmentation du volume de la rate (splénomégalie) est une manifestation de diverses maladies du sang (leucémies, lymphomes), de divers états infectieux ou inflammatoires, et de la cirrhose (hydropisie). La rate est un organe fragile qui peut rompre en cas de contusion abdominale, ce qui est susceptible d’entraîner une hémorragie interne mortelle. Briser volontairement une grosse rate en la cognant violemment (à l’aide du poing ou d’un maillet) passait donc alors déjà, et à juste titre, pour un des remèdes des plus « ridicules » qu’on pût concevoir.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Claude II Belin, le 12 octobre 1641, note 5.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0061&cln=5

(Consulté le 16/04/2024)

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