À Charles Spon, le 21 juin 1650, note 5.
Note [5]

Retz (Mémoires, pages 628-629) :

« Les nouvelles arrivèrent que MM. de Bouillon et de La Rochefoucauld avaient fait entrer dans Bordeaux {a} Mme la Princesse et M. le Duc, {b} que le cardinal avait laissé entre les mains de Madame sa mère au lieu de le faire nourrir auprès du roi, comme Servien le lui avait conseillé. Ce parlement, dont le plus sage et le plus vieux en ce temps-là jouait gaiement tout son bien en un soir sans faire tort à sa réputation, eut deux spectacles, en une même année, assez extraordinaires. Il vit un prince et une princesse du sang, à genoux au bureau, lui demandant justice, et il fut assez fou, si l’on peut parler ainsi d’une compagnie en corps, pour faire apporter sur le même bureau une hostie consacrée que les soldats des troupes de M. d’Épernon avaient laissé tomber d’un ciboire qui avait été volé. Le parlement de Bordeaux ne fut pas fâché de ce que le peuple avait donné entrée à M. le Duc, mais il garda pourtant beaucoup plus de mesures qu’il n’appartenait et au climat, et à l’humeur où il était contre M. d’Épernon. Il ordonna que Mme la Princesse et M. le Duc, et MM. de Bouillon et de La Rochefoucauld auraient liberté de demeurer dans Bordeaux, à condition qu’ils donneraient leur parole de n’y rien entreprendre contre le service du roi ; et que cependant, la requête de Mme la Princesse serait envoyée à Sa Majesté et très humbles remontrances lui seraient faites sur la détention de Messieurs les princes. Le président de Gourgues, qui était un des principaux du corps et qui eût souhaité que l’on eût évité les extrémités, dépêcha un courrier à Senneterre, qui était son ami, avec une lettre de treize pages de chiffre, par laquelle il lui mandait que son parlement n’était pas si emporté que, si le roi voulait révoquer M. d’Épernon, il ne demeurât dans la fidélité ; qu’il lui en donnait sa parole ; que ce qu’il avait fait jusque-là n’était qu’à cette intention ; mais que, si l’on différait, il ne répondait plus de la compagnie et beaucoup moins du peuple qui, ménagé et appuyé comme il l’était par le parti de Messieurs les princes, se rendrait même dans peu maître du parlement. »


  1. Le 31 mai 1650.

  2. Le duc d’Enghien, fils du Grand Condé.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 21 juin 1650, note 5.

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(Consulté le 19/04/2024)

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