À Charles Spon, le 14 juin 1651, note 5.
Note [5]

Les princes ayant été libérés et Mazarin étant en exil, le maréchal de Turenne s’était rallié début juin à la cause du roi, avec bientôt la qualité de prince étranger qu’il préféra dès lors à celle de maréchal. Âgé de presque 40 ans, il allait épouser le 2 août 1651 Charlotte de Caumont (29 ans, morte le 13 avril 1666), fille d’Armand-Nompar de Caumont de La Force, duc et maréchal en 1652 (v. note [45], lettre 226). La publication des bans à Charenton s’expliquait par la fidélité des deux époux au calvinisme. Aucun enfant ne naquit de cette union.

Retz (Mémoires, pages 877‑878) s’est interrogé sur ce retour inattendu de Turenne au service de la Couronne :

« Aussitôt après que M. le Prince fut sorti de Paris pour aller à Saint-Maur, {a} MM. de Bouillon et de Turenne {b} s’y rendirent, y offrirent leurs services à M. le Prince, avec lequel ils paraissaient effectivement tout à fait engagés. M. le Prince m’a dit depuis que, la veille du jour qu’il quitta Saint-Maur {c} pour aller à Trie, {d} d’où il ne revint plus à la cour, M. de Turenne lui avait encore promis si positivement de le servir qu’il avait même accepté et reçu un ordre signé de sa main par lequel il ordonnait à La Moussaye, qui commandait pour lui dans Stenay, de lui remettre la place, et que la première nouvelle qu’il eut après cela de M. de Turenne fut qu’il allait commander l’armée du roi. Vous remarquerez, s’il vous plaît, que M. le Prince est l’homme que j’aie jamais connu le moins capable d’une imposture préméditée. Je n’ai jamais osé faire expliquer sur ce point M. de Turenne ; mais ce que j’en ai tiré de lui, en lui en parlant indirectement, est qu’aussitôt après la liberté de M. le Prince il eut tous les sujets du monde d’être mécontent de son procédé à son égard ; qu’il lui préféra en tout M. de Nemours qui n’approchait pas de son mérite et qui ne lui avait pas, à beaucoup près, rendu tant de services et que, par cette raison, il se crut libre de ses premiers engagements. Vous observerez, s’il vous plaît, que je n’ai jamais connu personne moins capable d’une vilenie que M. de Turenne. »


  1. 30 mai 1651.

  2. Son frère.

  3. 1er juin.

  4. Trie-Château (Oise), demeure du duc de Longueville.

La Rochefoucauld rapporte dans ses Mémoires (pages 209‑210) que Turenne lui dit que :

« M. le Prince ne l’avait ménagé sur rien depuis sa liberté et que, bien loin de prendre ses mesures de concert avec lui et de lui faire part de ses desseins, il s’en était non seulement éloigné, mais avait mieux aimé laisser périr les troupes qui venaient de combattre pour sa liberté que de dire un mot pour leur faire donner des quartiers d’hiver. Il y ajouta encore qu’il avait affecté de ne se louer ni de se plaindre de M. le Prince pour ne pas donner lieu à des éclaircissements dans lesquels il ne voulait pas entrer ; qu’il croyait n’avoir rien oublié pour servir M. le Prince, mais qu’il prétendait aussi que l’engagement où il était entré avec lui avait dû finir avec sa prison, et qu’ainsi, il pouvait prendre des liaisons selon ses inclinations ou ses intérêts. Ce furent les raisons par lesquelles M. de Turenne refusa de suivre une seconde fois la fortune de M. le Prince. »

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 14 juin 1651, note 5.

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(Consulté le 25/04/2024)

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