À Claude II Belin, le 23 février 1657, note 5.
Note [5]

« L’éléphantiasis {a} [lèpre] est une maladie incurable parce que c’est un cancer généralisé : un cancer localisé est incurable, et à bien plus forte raison l’est-il s’il est généralisé ; et en effet une telle intempérie ne connaît pas de remède. »

Guy Patin répondait ici de manière assez sibylline à l’interrogation que Claude ii Belin lui avait soumise sur les maladies incurables. Le cancer (Furetière) était alors une maladie externe : {b}

« qui vient dans les chairs, et qui les mange petit à petit comme une espèce de gangrène. C’est une tumeur dure, inégale, raboteuse, ronde et immobile, de couleur cendrée, livide ou plombine, environnée de plusieurs veines apparentes et tortues, pleines d’un sang mélancolique et limoneux, qui ressemblent au poisson {c} appelé cancer ou écrevisse. Elle commence sans douleur, et paraît d’abord comme un pois chiche ou une petite noisette ; mais elle croît assez vite et devient fort douloureuse. Les cancers viennent aux parties glanduleuses et lâches, comme aux mamelles et aux émonctoires. {d} En grec karkinos, qui signifie aussi écrevisse. Ce mal a grand rapport avec cette sorte de poisson en ce que quand une fois il a pris pied dans un corps, il est presque impossible de l’en chasser, de même qu’il est difficile d’arracher des pinces de l’écrevisse ce qu’elle a une fois attrapé. » {e}


  1. La lèpre était une des deux formes de l’éléphantiasis (v. note [28], lettre 402), toutes deux d’origine infectieuse (comme le sont certains cancers modernes).

  2. C’est-à-dire visible (extériorisée) : la médecine du xviie s. ignorait les cancers profonds, qui sont de très loin les plus fréquents (appareils respiratoire, génito-urinaire et digestif, système nerveux, etc.).

  3. Sic pour crustacé (mot apparu au début du xviiie s.).

  4. Glandes qui servent à la décharge des humeurs : nœuds (ganglions) lympahtiques.

  5. Patin a presque exclusivement employé ce mot pour le cancer du sein qui emporta la reine mère de France, Anne d’Autriche, en 1666. Le récit de ce mal donne une belle idée de l’impuissance des médecins d’alors face à ce mal.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Claude II Belin, le 23 février 1657, note 5.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0465&cln=5

(Consulté le 19/04/2024)

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