À Gerardus Leonardus Blasius, le 28 janvier 1661, note 55.
Note [55]

Page 212 des Commentaria, à propos de la moelle osseuse des phalanges des doigts, sur ce passage de Johann Vesling, Exterius rotunda, interius complata sunt : {a}

Per exterius hic author partem manus externam, per interius internam denotat. Ast quæri et hic posset, num hæc ossicula in sua interiori cavitate medullæ experta sint, nec ne ? Galenus ejusve asseclæ varii affirmativam tuentur acriter, ut ex Galen. com. ii. de fract. c. 8 et 1. de usu part. 15. videre est. Alii contra ut Vesalius, Columbus, Ioh. Bordæus lit. 6. {b} Misc. cap. 14. plurimive Recentiorum, expresse negant. Et meo judicio apposite satis, qui enim illorum opinionem assumemus, cui sensus ipse manifete reclamat.

[Par en dehors, l’auteur désigne ici la partie externe de la main et par en dedans, sa partie interne. {c} On pourrait aussi se demander ici si ces petits os contiennent ou non de la moelle en leur cavité interne. Galien et divers de ses disciples défendent énergiquement qu’ils n’en ont pas, comme on voit au chapitre 8 du 2e Commentaire de Galien sur les fractures, {d} et au livre i, chapitre 15, de son traité sur l’Utilité des parties. {e} D’autres au contraire, comme Vésale, Colombo, {f} Bordæus {g} (livre  des Mélanges, chapitre 14) et plusieurs auteurs modernes nient cela expressément ; et ce assez justement à mon avis, car nous adoptons leur opinion comme étant celle que l’observation justifie manifestement]. {h}


  1. « [Ces os] sont arrondis en dehors, aplatis en dedans ».

  2. Sic pour lib. 6.

  3. La position dite anatomique de la main est la supination (paume en avant), avec le pouce à l’extérieur (en dehors) et l’auriculaire à l’intérieur (en dedans).

  4. Galien a écrit trois commentaires in Hippocratis librum de Fracturis [sur le livre des Fractures d’Hippocrate]. Gerardus Leonardus Blasius renvoyait à ce passage du deuxième (Kühn, volume 18b, page 432) :

    adjungimus et duris, quandoquidem medulla carent, cava minimum sunt et a lapillis parvis non abhorrent.

    [pour ceux qui sont durs, nous ajoutons d’une part qu’ils ne contiennent pas de moelle, puisqu’ils n’ont qu’une petite cavité, et d’autre part, qu’ils s’accompagnent volontiers de sésamoïdes].

    Les sésamoïdes sont des « os fort petits placés dans les jointures des doigts pour les fortifier et empêcher qu’ils ne se disloquent » (Furetière).

  5. Le traité de Galien de Usu partium corporis humani [de l’Utilité des parties du corps humain] est composé de 17 livres (commentés par Caspar Hofmann en 1625, v. supra note [35]). Blasius renvoyait à la fin du chapitre 15 (Excellence du mode d’articulation des doigts) du 1er livre (La main, Daremberg, volume 1, page 140) :

    « Mais pourquoi les os des doigts sont-ils denses, durs et sans moelle ? C’est sans doute parce qu’ils sont nus {i} et, par conséquent, très exposés ; or, pour des corps exposés aux lésions par suite de l’absence de protection extérieure, c’était un très grand correctif qu’une structure particulière qui les rend plus difficilement vulnérables. » {ii}

    1. Entourés par peu de chair et de muscles.

    2. Note de Daremberg :

      « Vésale […] et, après lui, Columbus […] reprochent avec raison à Galien d’avoir cru que les os des doigts n’ont pas de moelle ; ils sont à cet égard dans la même condition que tous les os longs, et il est difficile de comprendre comment il a pu commettre une pareille erreur, puisqu’il lui suffisait de briser une phalange de singe, ainsi que le fait remarquer Columbus. »

  6. V. supra notules {a}, note [14], pour Realdo Columbo, et {f‑ii}, note [35], pour André Vésale, contemporains et tous deux anatomistes de Padoue au xvie s.

  7. Sic pour Brodæus (comme Guy Patin en faisait justement la remarque). Jean Brodeau (Tours vers 1500-1573), critique et philologue français (dont Patin a cité plusieurs descendants, v. notes [10] et [13], lettre 310), était fils d’un valet de chambre du roi Louis xii.

    Il est auteur des Miscellaneorum libri sex. In quibus, præter alia scitu dignissima, plurimi optimorum autorum tam Latinorum quam Græcorum loci, vel depravati hactenus restituuntur, vel multo quam antea a quoquam est factum rectius explicantur [Six livres des Mélanges. Où, outre d’autres choses très dignes d’être sues, de nombreux passages des meilleurs auteurs, latins comme grecs, sont soit rétablis car ils étaient jusqu’ici corrompus, soit expliqués beaucoup plus correctement que quiconque ne l’a fait auparavant] (Bâle, Johannes Oporinus, 1555, in‑8o). Blasius renvoyait au chapitre 14, Nonnulla ad corpus humanum spectantia [Quelques faits concernant le corps humain] (livre sixième, pages 230‑232), avec cette remarque :

    Cum autem digitorum ossa medullæ expertia apud insignos medicos lego, parum admodum medullæ habere, non nullam prorsus, interpretor.

    [Puisque je lis chez d’insignes médecins que les os des doigts sont dénués de moelle, j’interprète cela comme voulant dire qu’ils en contiennent fort peu, mais n’en sont pas entièrement dépourvus].

  8. Les phalanges possèdent bel et bien une cavité qui contient de la moelle, tissu dont nul n’avait encore sérieusement compris être celui qui produit la plus grande partie des globules du sang (sanguification ou hématopoïèse, v. notule {d}, note [5], lettre latine  369).

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Gerardus Leonardus Blasius, le 28 janvier 1661, note 55.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=1187&cln=55

(Consulté le 29/03/2024)

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