Seul le chapitre v du livre ii de La Sagesse de Pierre Charron est consacré à la religion, il est intitulé La vraie piété, premier office de la Sagesse. Le Grotiana renvoyait à ses § 7‑8 (pages 356‑358, édition de Bordeaux, 1601, v. note [9], lettre latine 421) :
« 7. Or étant les religions et croyances telles que dit est, étranges aux sens communs, surpassant de bien loin toute la portée et intelligence humaine, elles ne doivent ni ne peuvent être prises, ni loger chez nous par moyens naturels et humains (autrement, tant de grandes âmes rares et excellentes qu’il y a eu y fussent arrivées), mais il faut qu’elles soient apportées et baillées par révélation extraordinaire et céleste, prises et reçues par inspiration divine, et comme venant du ciel. Ainsi aussi disent tous < ceux > qui la tiennent et la croient, et tous usent de ce jargon, que non des hommes ni d’aucune créature, ains de Dieu. {a}
8. Mais à dire vrai, sans rien flatter ni déguiser, il n’en est rien. Elles sont, quoi qu’on dise, tenues par mains et moyens humains : témoin, premièrement, la manière que les religions ont été reçues au monde, et < le > sont encore tous les jours par les particuliers ; la nation, le pays, le lieu donnent la religion, l’on est de celle que le lieu, auquel on est né et élevé, tient ; nous sommes circoncis, baptisés, juifs, mahométans, chrétiens, avant que nous sachions que nous sommes hommes ; la religion n’est pas de notre choix et élection ; témoin après, la vie et les mœurs si mal accordantes avec la religion, témoin que, par occasions humaines et bien légères, l’on va contre la teneur de sa religion. Si elle tenait et était plantée par une attache divine, chose du monde ne nous en pourrait ébranler, telle attache ne se romprait pas si aisément ; s’il y avait de la touche et du rayon de la divinité, ils paraîtraient partout, et l’on produirait des effets qui s’en sentiraient et seraient miraculeux, comme a dit la vérité : “ Si vous aviez une seule goutte de foi, vous remueriez les montagnes. ” {b} Mais quelle proportion ni convenance entre la persuasion de l’immortalité de l’âme et d’une future récompense si glorieuse et heureuse, ou si malheureuse et angoisseuse, et la vie que l’on mène ? La seule appréhension des choses que l’on dit croire si fermement ferait égarer et perdre le sens : la seule appréhension et crainte de mourir par justice, et en public, ou de quelque autre accident honteux et fâcheux, a fait perdre le sens à plusieurs et les a jetés à des partis bien étranges ; et qu’est cela au prix de ce que la religion enseigne de l’avenir ? »
- « qui n’appartient ni aux hommes ni à aucune créature, mais à Dieu. »
- Matthieu, 17:19, où Jésus chasse le « démon » d’un enfant épileptique et le guérit, après que ses disciples y ont échoué :
« Alors, les disciples s’approchant de Jésus dans le privé, lui demandèrent : “ Pourquoi nous autres n’avons-nous pu l’expulser ? – Parce que vous avez peu de foi, leur dit-il. Car je vous le dis en vérité, si vous avez de la foi gros comme un grain de sénevé, vous direz à cette montagne ‘ Déplace-toi d’ici à là ’, et elle se déplacera, et rien ne vous sera impossible. ” »
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