À Charles Spon, le 9 octobre 1654, note 7.
Note [7]

D. Philipp. iv, Hisp. et Ind. Regi Opt. Max. Ioannes de Solorzano Pereira, I.V.D. ex primariis olim Academiæ Salmanticensis antecessoribus, postea Limensis prætorii in Peruano regno Novi Orbis senator, nunc vero in supremo Indiarum consilio regii Fisci patronus, Disputationem de Indiarum iure, sive de iusta Indiarum Occidentalium inquisitione, acquisitione, et retentione, tribus libris comprehensam D.E.C.

[Ioannes de Solorzano Pereira, {a} docteur en l’un et l’autre droit, {b} jadis l’un des premiers maîtres de l’Université de Salamanque, ensuite conseiller au parlement de Lima dans le royaume du Nouveau Monde au Pérou, et maintenant président du fisc royal au Conseil suprême des Indes, a dédié à Philippe iv, tout-puissant roi des Espagnes et des Indes, la Discussion sur le droit des Indiens, ou sur la juste manière de soumettre les Indiens d’Amérique à l’enquête, à la capture et à la détention, rassemblée en trois livres].


  1. Juan Solorzano Pereira (Madrid 1575-ibid. 1655).

  2. I.V.D., Iuris Vtriusque Doctor, droits civil et canonique.

  3. Madrid, Francisco Martinez, 1629, in‑8o de 752 pages.

Les Commentarii de Francisco Salinas sur Jonas (v. supra note [6]) citent en effet cet ouvrage, question xxvi sur le chapitre i (pages 95‑96), De navi quam invenit Ionas [Du navire que trouva Jonas] :

Sed illa difficultatem maxima in hac navigationis arte : an scilicet apud antiquos Acu Magnetica navigationes conficerentur. Cum enim Magnetis, et Acyculæ inventum tribuatur Flavio a Gidia Melfensi Flandro anno a nativitate Domini 1303. sicuti habes apud P. Theophylum Reynaudum in suo Brevario Christianæ Chronologiæ parte secunda. Et Ioannem Solorzanum de iure Indiarum lib. i. cap. 12. a n. 77. et cap. 12. num. 42. cum Iusto Lypsio lib. i. Phisiologiæ diser. 19. et aliis. Qui fieri potuerit ut tot maria, et insulæ, navigationibus perviæ fuerint ? cum modo vix, ne vix quidem sine acus auxilio ulla aliqua licet brevissima navigatio tuto perfici possit ! Et navis, quæ ibat in Tharsis, vel in Indiam, vel in Hispaniam, vel in Africam cursum dirigebat ; et consequenter aliquorum aliquando mensium spatio iter conficiebat.

[Mais voici la plus grande des difficultés qui soit en cet art de naviguer : pouvait-on dans l’Antiquité s’y aider d’une aiguille magnétique ? Car en effet on attribue la découverte de l’aimant et de la boussole à l’Amalfitain Flavio Gojia, l’an 1303, en Flandre, comme vous verrez dans : la seconde partie du Brevarium Christianæ Chronologiæ du P. Théophile Raynaud ; {a} le livre i, chapitre xii (nos 42 et 77), De iure Indiarum de Juan Solorzano ; {b} le livre ii, Dissertatio xix, de la Physiologia de Juste Lipse ; {c} et dans d’autres auteurs. Comment aura-t-il pu se faire qu’on ait parcouru tant de mers et d’îles, quand il est à peine croyable, voire inimaginable, que quelque navigation que ce fût, même la plus courte, ait pu s’accomplir en toute sécurité sans le secours de la boussole ? Pourtant, un navire qui allait à Tarsis, ou en Inde, {d} ou en Espagne, ou en Afrique suivait une route et finissait parfois, au bout de quelques mois, par parvenir à bon port].


  1. Breviarum Christianæ Chronologiæ R.P. Theophili Raynaud Societatis Jesu Theologie. Pars posterior [Abrégé de la Chronologie chrétienne du R.P. Théophile Raynaud, {i} théologien de la Compagnie de Jésus. Seconde partie] (Innsbruck, Michaël Wagnerus, 1661, in‑12, pour la réédition que j’ai consultée), avec cette mention (page 317) :

    Insigne inventum acus nauticæ, per Flavium a Gloria Melfensem, 1303.

    [Remarquable invention de la boussole en 1303 par Flavius a Gloria, natif d’Amalfi]. {ii}

    1. V. note [8], lettre 71.

    2. Le nom aujourd’hui retenu pour cet inventeur (contesté, sinon fictif) est Flavio Gioja, v. infra.
  2. En tête des chapitres de son ouvrage, Solorzano a placé un sommaire qui annonce leur contenu. Dans le chapitre xii du livre i (pages 145‑148), les intitulés des articles cités sont :

    • no 42, Magnetica acus usum veteribus omnino ignoratum probatur [Il est prouvé que les anciens ignoraient complètement l’emploi de la boussole] ;

    • no 43, Magnetica pyxidi Novi Orbis detectio debetur [On doit la découverte du Nouveau Monde à la boussole] ;

    • no 44, Taprobanenses qua industria in navigando uterentur [Techniques de navigation employées par les habitants de Taprobane (Ceylan)] ;

    • no 45, Magnetica acus nullum extat nomen apud antiquos [Ceux de l’Antiquité n’avaient pas de mot pour désigner la boussole] ;

    • nos 76‑77, Seneca quo sensu et modo Novos Orbes detegendos esse prædixerit ? [De quelle manière et par quel savoir Sénèque a-t-il prédit qu’on découvrirait de nouveaux mondes ?].

  3. Iusti Lipsii Physiologiæ Stoicorum Libri tres : L. Annæo Senecæ, aliisque scriptoribus illustrandis,

    [Trois livres de Juste Lipse {i} sur la Physiologie {ii} des stoïciens, pour mettre en lumière Sénèque et d’autres auteurs], {iii}

    Dissertation xix, livre ii, Stabilis ea, an moveatur ? itemque de Novo orbe, sive America, an veteres gnari fuerint ? [Est-elle {iv} immobile ou bouge-t-elle ? Et aussi, les Anciens auraient-ils eu connaissance du Nouveau Monde, ou Amérique ?], avec ces deux questions posées à la fin (page 103 ro) :

    At quam vasta ea navigatio est ? et quis olim tentarit aut perfecerit, usu magnetis nondum reperto ?

    [Mais cette traversée n’est-elle pas immense ? Et qui donc aurait pu s’y aventurer et la réussir jadis, quand la boussole n’avait pas encore été inventée ?]

    1. V. note [8], lettre 36.

    2. Étude des phénomènes naturels.

    3. Paris, Hadrianus Perier, 1604, in‑4o de 304 pages.

    4. La Terre.

  4. Tarsis était, dans l’Ancien Testament, le port où Jonas devait se rendre en partant de Jaffa. Sa localisation est incertaine, peut-être Tarse en Cilicie (à l’extrême est de la côte méditerranéenne de Turquie).

    Dans l’idée de Salinas, l’Inde correspondait aux Indes Occidentales (Amérique).

Boussole (Furetière) :

« Autrement compas ou cadran de mer, c’est une boîte où il y a une aiguille aimantée qui se tourne toujours vers les pôles, à la réserve de quelque déclinaison qu’elle fait en divers endroits. Le cercle de carte {a} qu’elle soutient est divisé d’abord en 360 degrés et au dessous en 32 parties, qui marquent les 32 aires ou traits de vent, qu’on appelle aussi pointes. Jean Gira ou Goya, que quelques-uns nomment Flavio de Melphe, ou Flavio Gioia, Italien, l’inventa, dit-on, vers l’an 1302 ; {b} et de là vient que la terre de Principato qui fait partie du Royaume de Naples, dont il était originaire, a pris pour ses armes une boussole. Quelques-uns croient que Marc Paul, Vénitien ayant voyagé en la Chine, {c} en rapporta l’invention vers l’an 1260 ; et ce qui confirme cette conjecture, c’est qu’on s’en servait au commencement de la même façon que font encore les Chinois, qui la font flotter sur un petit morceau de liège. Ils disent que leur empereur Chiningus, qui était un grand astrologue, en avait la connaissance 1 120 ans devant Jésus-Christ. Mais Fauchet {d} rapporte des vers de Gayot de Provins, qui vivait en France vers l’an 1200, lequel en fait mention sous le nom de la marinette, ou pierre marinière : ce qui fait voir qu’on la connaissait en France avant le Vénitien et le Melphitain. {e} La fleur de lis que toutes les nations mettent sur la rose au point du Nord, montre que les Français l’ont inventée, ou l’ont mise dans sa perfection. L’aiguille doit être faite d’une platine fort mince de bon acier en forme de losange, et vidée en sorte qu’il n’en reste que les extrémités, et un diamètre au milieu, sur lequel la chapelle {f} doit être appuyée. Pour l’animer, il la faut faire toucher par une pierre d’aimant fort généreuse ; et la partie qu’on veut faire tourner au Nord doit être touchée par le pôle du Sud de la pierre. On peut faire aussi une boussole sans aimant, par le moyen d’une petite aiguille de fer délicatement posée sur l’eau ou suspendue en l’air ; car elle se tournera au Midi. {g} De même une aiguille chauffée au feu, et qu’on laisse refroidir sur une ligne du Midi, acquiert la vertu de la boussole, et se tourne vers les pôles. […] Ce mot vient du latin buxula {i} parce qu’elle ressemble à une boîte (Ménage). Pasquier dit qu’on l’appelle cadran à cause qu’elle est mise dans une boîte carrée. »


  1. Carton.

  2. V. supra deuxième notule {a}. Melphe et le nom français d’Amalfi.

  3. Marco Polo, v. notule {a}, note [6] du Faux Patiniana II‑6.

  4. Claude Fauchet, v. notule {a}, note [47] du Patiniana I‑4.

  5. Amalfitain.

  6. « Petit chapiteau de cuivre qui couvre le pivot de l’aiguille aimantée dans la boussole » (ibid.).

  7. Sous l’effet du champ magnétique terrestre (décrit en 1600).

  8. Ou buxtula, « petite boîte » en latin.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 9 octobre 1654, note 7.

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(Consulté le 19/04/2024)

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