À André Falconet, le 1er avril 1661, note 8.
Note [8]

Les trois reines étaient Marie-Thérèse, reine de France, Anne d’Autriche, reine mère de France, et Henriette, reine mère d’Angleterre. Le 30 mars, Louis xiv et Marie-Thérèse avaient signé le contrat de mariage de Monsieur, Philippe d’Orléans, avec Henriette-Anne d’Angleterre, puis assisté aux fiançailles célébrées dans le grand cabinet de la reine d’Angleterre au Palais-Royal. Le mariage avait eu lieu le lendemain au même endroit, célébré par Daniel de Cosnac(v. note [1], lettre 972), évêque de Valence (Levantal).

Mme de Motteville (Mémoires, pages 508‑509) :

« Peu de temps après la mort du ministre, se fit le mariage de Monsieur avec la princesse d’Angleterre. Le roi n’avait pas beaucoup d’inclination pour cette alliance. Il dit lui-même qu’il sentait naturellement pour les Anglais l’antipathie que l’on dit avoir été toujours entre les deux nations ; mais elle fut aisément effacée en lui par le sang, qui les engageait à s’aimer, et par l’agréable société qui, dans leur première jeunesse, les avait accoutumés du moins à pouvoir être amis personnellement. La reine mère aimait la princesse d’Angleterre, elle la désirait en qualité de belle-fille ; et quand le cardinal mourut, le roi se trouva si engagé à ce mariage, qu’il n’eut pas même la pensée de le rompre. Il donna à Monsieur l’apanage d’Orléans tel que le feu duc d’Orléans l’avait possédé, excepté Blois et Chambord. […]

Ces deux agréables et illustres personnes se marièrent au Palais-Royal le dernier jour de mars 1661 en présence du roi, de la reine et de la reine d’Angleterre. Cette cérémonie se fit en particulier ; il n’y eut que Mlles d’Orléans et le prince de Condé, seuls, qui furent conviés d’y assister, comme les plus proches parents de tous les deux. »

Voici ce qu’en a écrit la fille aînée du duc Gaston d’Orléans, Mlle de Montpensier (Mémoires, deuxième partie, chapitre iv, pages 510‑512) :

« L’empressement que Monsieur avait pour le mariage d’Angleterre continua, et peu après la mort de M. le cardinal il se fit. On croyait qu’il {a} n’y était pas si porté que la reine mère, {b} et qu’il le retardait ne croyant que ce fût une chose si pressée que de marier Monsieur. Le roi lui disait : “ Mon frère, vous allez épouser tous les os des Saints-Innocents. ” {c} Il est vrai que Madame {d} était fort maigre, mais elle était très aimable, avec un agrément, qui ne se peut exprimer, à tout ce qu’elle faisait. Elle était fort bossue, et on la louait toujours de sa belle taille ; la reine d’Angleterre {e} avait un tel soin de son habillement, que l’on ne s’en est aperçu qu’après qu’elle a été mariée. Elle fut fiancée chez la reine d’Angleterre, au Palais-Royal, où elle logeait, dans le grand cabinet ; ce fut M. l’évêque de Valence, premier aumônier, qui en fit la cérémonie. Elle était fort parée, et tout ce qui y était ; on peut juger du grand monde qui est en ces occasions. Le lendemain elle fut mariée à midi dans la petite chapelle de la reine d’Angleterre, où il n’y avait que le roi et la reine ; on signa le contrat de mariage chez la reine au Louvre, devant les fiançailles. Je ne sais si le roi y dîna, mais je sais bien qu’il y soupa. Le lendemain on la fut voir qui était fort ajustée, et le jour d’après ou le soir même (je ne m’en souviens plus) on la mena aux Tuileries chez Monsieur, où le roi allait quasi tous les jours. On s’y divertissait fort : cette cour avait la grâce de la nouveauté. Mme de Choisy donna la petite de La Vallière {f} pour fille à Madame. »


  1. Mazarin.

  2. Anne d’Autriche.

  3. V. note [8], lettre 193, pour le cimetière parisien des Saint-Innocents.

  4. Henriette-Anne d’Angleterre.

  5. Sa mère.

  6. Louise-Françoise, prochaine maîtresse de Louis xiv (v. note [12], lettre 735).

Le portrait laissé par Mme de Motteville (pages 508) est de même veine :

« La princesse d’Angleterre était assez grande : elle avait bonne grâce, et sa taille, qui n’était pas sans défaut, ne paraissait pas alors aussi gâtée qu’elle l’était en effet. Sa beauté n’était pas des plus parfaites ; mais toute sa personne, quoiqu’elle ne fût pas bien faite, était néanmoins, par ses manières et par ses agréments, tout à fait aimable. Elle n’avait pu être reine ; et pour réparer ce chagrin, elle voulait régner dans la cour des honnêtes gens, et trouver de la gloire dans le monde par ses charmes et par les beautés de son esprit. On voyait déjà en elle beaucoup de lumière et de raison, et au travers de sa jeunesse, qui jusqu’alors l’avait comme cachée au public, il était aisé de juger que lorsqu’elle se verrait sur le grand théâtre de la cour de France, elle y ferait un des principaux rôles. »

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 1er avril 1661, note 8.

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(Consulté le 28/03/2024)

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