À Charles Spon, le 21 avril 1655, note 1.
Note [1]

Le 13 avril, Louis xiv était directement revenu de Vincennes au Palais pour un nouveau lit de justice, suivant de peu celui qu’il avait tenu le 20 mars.

Dans son essai intitulé Le Timbre à travers l’histoire (Rouen, Émile Deshays, 1890, in‑4o illustré de 126 pages), Léon Salefranque, « sous-inspecteur de l’Enregistrement, des Domaines et du Timbre », a relaté ces faits, et expliqué leur contexte politique et fiscal (Introduction du timbre en France, pages 19‑22) :

« La guerre de Trente Ans, la fronde, la mauvaise administration de Mazarin avaient remis les finances dans l’état déplorable d’où les avit tirées Sully au siècle précédent. L’usage de dresser chaque année le budget des dépenses et des recettes, inauguré par ce ministre et auquel d’Effiat s’était toujours conformé sous Richelieu, était tombé en désuétude ; il n’y avait plus de règle financière ; il n’était pas tenu de comptabilité. Les coffres de l’État étaient vides ; les recettes escomptées à l’avance, étaient grevées d’assignations. Il fallait cependant d’importantes ressources pour continuer la guerre contre l’Espagne.

À sa rentrée en France en 1653, Mazarin trouva la surintendance vacante par la mort de La Vieuville : il en patagea la charge entre Fouquet et servien. Les nouveaux administrateurs durent recourir à l’emprunt et à l’impôt.

On constitua quatre cent mille livres de rentes sur la Ville, ce qui était un gros chiffre pour l’époque. Aux nombreuses et lourdes taxes déjà existantes, on ajouta une crue d’impôts sur le sel, on rechargea de deux sous par livre les fermes déjà bien chargées, on agmenta les gabelles, les droits sur le tabac, et enfin apparaît pour la première fois l’établissement d’une marque sur le papier et le parchemin. {a}

L’édit qui créa ce nouvel impôt fut donné en mars 1655. Les considérations qui y sont développées présentent un réel intérêt que diminuerait certainement l’analyse qui en pourrait être faite. Il est préférable, par suite, d’en reproduire les termes. Le texte qui en est donné plus loin {b} a été copié sur un exemplaire déposé à la Bibliothèque nationale.

Ainsi que constatent les mentions dont il est revêtu, cet édit fut, à raison de l’opposition du Parlement, enregistré dans un lit de justice tenu par Louis xiv le 20 mars 1655.

Le même jour, le roi, par l’intermédiaire du duc d’Anjou qu’il chargeait de leur porter son exprès commandement, faisait procéder à pareille formalité à la Chambre des comptes et à la Cour des aides. » {c}


  1. « On appelle du parchemin ou du papier timbré, ou marqué, celui qui sert aux expéditions de justice, parce qu’il contient au haut la marque du roi. Cette marque est différente en chaque généralité pour faciliter le payement du droit qu’on a établi pour y appliquer ce timbre » (Furetière).

  2. Le Fac-similé de l’édit de 1655 figure dans dans les annexes de Salfranque.

  3. Suivent les protestations Parlement qui aboutirent au report de l’édit sur le papier timbré.

Montglat a relaté ces deux lits de justice (Mémoires, page 306) :

« Durant l’hiver, on ne songea qu’à se réjouir à la cour, d’autant qu’on ne commençait qu’à respirer depuis les troubles passés, et que la victoire d’Arras était la première marque du rétablissement des affaires de la France ; mais comme elle était fort épuisée d’argent, sans quoi on ne pouvait soutenir la guerre, le roi fut tenir son lit de justice du 20e de mars, pour faire vérifier des édits. {a} Et parce que l’autorité royale n’était pas encore bien rétablie, les chambres s’assemblèrent pour revoir les édits, disant que la présence du roi avait ôté la liberté des suffrages et qu’il était nécessaire, en son absence, de les examiner pour voir s’ils étaient justes. La mémoire des choses passées faisait appréhender ces assemblées, après les événements funestes qu’elles avaient causés. {b} Cette considération obligea le roi de partir du château de Vincennes le 10e {c} d’avril et de venir le matin au Parlement en justaucorps rouge et chapeau gris, accompagné de toute sa cour en même équipage ; ce qui était inusité jusqu’à ce jour. Quand il fut dans son lit de justice, il défendit au Parlement de s’assembler ; et après avoir dit quatre mots, il se leva et sortit, sans ouïr aucune harangue. Nonobstant cette défense, le Parlement se préparait à se rassembler ; mais l’affaire fut mise en négociation et pour tout apaiser, il fallut quelques modifications aux édits. » {d}


  1. Ces édits fiscaux étaient au nombre de 17.

  2. La Fronde.

  3. Sic pour 13e.

  4. Aussitôt reparti à Vincennes, le roi revint à Paris le 17 avril pour y séjourner jusqu’au 18 mai.

    V. note [16], lettre 478, pour l’avatar de la taxation sur les notifications en avril 1657, à laquelle le Parlement opposa des remontrances similaires.


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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 21 avril 1655, note 1.

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(Consulté le 20/04/2024)

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