Autres écrits : Un manuscrit inédit de Guy Patin contre les consultations charitables de Théophraste Renaudot, note 19.
Note [19]

Reprise d’un méchant jeu de mots (v. note [7], lettre 57) sur le Bureau d’adresse créé par Théophraste Renaudot. Il en a lui-même dit les desseins principaux aux pages 36‑37 de sa Réponse à René Moreau :

« Tantôt il blâme les charités du Bureau d’adresse, pource, dit-il, que ce Bureau a déclaré ne se vouloir charger d’aucuns deniers dont l’on voudrait faire aumône aux pauvres. {a} Comme si la déclaration de vouloir laisser aux personnes pieuses et charitables la connaissance de l’emploi qui sera fait par eux-mêmes de leurs charités, ainsi qu’il s’observe à l’endroit de nos pauvres malades, auxquels les apothicaires et autres destinés à ce bon œuvre hors le Bureau, portent leurs remèdes et bienfaits, m’empêchait de pouvoir consacrer à Dieu, en ses membres, mon temps, mon industrie, ma peine et tout le profit qui en peut venir, et qu’il ne me fût pas permis et aux médecins, chirurgiens et apothicaires qui se sont voués à cette charité, de secourir de l’argent de leur bourse et de celui qui leur revient par ce travail, les pauvres malades qui leur seront adressés par le commis dudit Bureau ; sous ombre que pour lever tout soupçon, ce commis ne se voudra charger d’aucuns deniers. Donc il ne sera pas licite aux médecins de visiter les malades qu’il leur adressera et départir {b} comme ils font eux-mêmes leurs aumônes à ces malades ? » {c}


  1. Renvoi dans la marge à la page 17 de la Défense de René Moreau :

    « Quelques-uns toutefois pourront douter de sa libéralité le voyant si attaché à ses intérêts, jusques à faire des trafics indignes d’un homme d’honneur, et éloignés de la profession d’un médecin : lui qui fait payer les bancs et les sièges sur lesquels on prend place pendant ses Conférences, comme on fait aux comédiens ; qui fait d’une salle de conférence et de consultations charitables, comme il dit, une halle de fripiers deux ou trois fois la semaine, on aura de la peine à croire que de telles libéralités viennent de lui. Que si elles viennent d’autres personnes pieuses et charitables, par lesquelles, comme il dit, il les fait fournir, qu’il se ressouvienne du 13e chapitre de son Inventaire, {i} dans lequel il a publié Que son Bureau ne s’entend charger d’aucuns deniers ni de chose quelconque dont l’on voudrait faire aumône aux pauvres, ou l’employer (qu’il note bien ces paroles) en autres œuvres pies, ains {ii} seulement donnera adresse des personnes pieuses, afin que les pauvres reçoivent l’aumône de la propre main de leurs bienfaiteurs, ou de ceux à qui ils en donneront charge hors ledit Bureau. »

    1. Inventaire des adresses du Bureau de rencontre où chacun peut donner et recevoir avis de toutes les nécessités et commodités de la société humaine (Paris, 1630, in‑4o).

    2. Mais.
  2. Distribuer.

  3. Le Bureau d’adresse de Renaudot était une agence lucrative de renseignements (petites annonces) et de prêt sur gages (mont-de-piété). En dépit des laborieuses justifications de son directeur, il faut bien convenir qu’y mêler la médecine, sous la double forme de conférences payantes pour les curieux et de consultations médicales gratuites pour les pauvres (la médecine charitable), prêtait à la confusion des genres et pouvait ouvrir grand la porte à une dérive vers la charité médicale payante.


Imprimer cette note
Citer cette note
x
Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Un manuscrit inédit de Guy Patin contre les consultations charitables de Théophraste Renaudot, note 19.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=8062&cln=19

(Consulté le 10/04/2024)

Licence Creative Commons