À André Falconet, le 19 décembre 1660, note 7.
Note [7]

Le nom d’Honoré d’Urfé (Marseille 1568-Villefranche 1625) est resté attaché au succès extraordinaire de son Astrée, roman pastoral en six parties publié de 1607 à 1627.

Le passage auquel Guy Patin faisait allusion se trouve au 7e livre de la 3e partie, dans un dialogue entre Hylas et Silvandre :

« Aussi, pour dire la vérité, je pense que si tes services méritaient autant que les miens, tu ne les donnerais pas à si bon marché ou pour mieux dire, tu ne les voudrais pas perdre si inutilement ; car quant à moi, je tiens que les moindres que je rends méritent une très grande récompense.

Si je ne savais, répondit Silvandre en souriant, que tu es de l’île de Camargue, je penserais, te voyant faire si grand cas de si peu de chose, que tu fusses né dans une certaine contrée des Gaules où les habitants ont trois conditions qui ne semblent pas être fort éloignées de ton humeur.

Et quelles sont-elles ? ajouta Hylas.

Je ne les voulais pas dire, reprit Silvandre, mais puisque tu me presses, il faut que tu les saches : la première, c’est qu’ils sont riches de peu de bien, l’autre, docteurs de peu de savoir, et la dernière, glorieux de peu d’honneur.

Hylas voulut répondre à moitié en colère, mais l’éclat de rire que fit toute la troupe au commencement l’en empêcha.

Et après, quand il voulut reprendre la parole, Silvandre le devança et lui dit en souriant : II suffit Hylas, que je te déclare n’avoir point dit ces paroles pour la province des Romains où tu es né ; mais si tu te penses être obligé à quelque ressentiment, je te permets de bon cœur d’en dire autant ou plus du lieu de ma naissance quand il te plaira.

Ne doute point, reprit incontinent Hylas, que si le lieu duquel tu parles ne m’était autant inconnu qu’à toi-même, je ne demeurerais pas muet à cette reproche, et avec plus de vérité que tu n’as fait ; et toutefois, sans savoir quelle est cette contrée malheureuse, on peut aisément juger qu’elle ne doit guère rapporter que des ronces et des chardons puisqu’elle a produit un esprit si épineux et si mordant que le tien. »

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 19 décembre 1660, note 7.

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(Consulté le 29/03/2024)

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