À Charles Spon, le 16 avril 1652, note 8.
Note [8]

Les nouvelles formidables qui s’accumulaient troublaient fort les Parisiens. Guy Patin en donnait un écho fidèle, en tous points corroboré (comme très souvent) par le Journal de la Fronde (volume ii, fos 54 vo‑55 vo) :

« Hier au matin, S.A.R. {a} eut nouvelles par un courrier exprès que M. le Prince était venu par l’Auvergne, accompagné seulement du duc de La Rochefoucauld et son fils, et les sieurs Tourville et Guitaud avec trois valets, et qu’il devait arriver ici le soir ; ce qui obligea S.A.R. de partir l’après-dînée avec beaucoup de suite pour lui aller au-devant ; et fut jusqu’à Villejuif où n’ayant pu apprendre de ses nouvelles et voyant qu’il était tard, s’en revint à cheval avec sept ou huit personnes seulement, lui ayant envoyé au-devant son carrosse et le reste de sa suite. […]

Ce matin {b} l’on a trouvé des placards affichés aux coins des rues, intitulés Avis aux Parisiens, contenant que M. le Prince, pour témoigner le zèle qu’il avait pour le bien public, a quitté sa famille et tout ce qu’il avait en Guyenne pour venir jour et nuit, sur l’avis qu’il avait eu que le cardinal Mazarin grossissait ses troupes et en faisait venir de tous côtés pour bloquer Paris, d’où il s’approchait ; et que M. le Prince était venu là-dessus pour se mettre à la tête de l’armée du duc de Nemours sous les ordres de S.A.R. ; qu’il y avait beaucoup de personnes qui blâmaient les desseins de M. le Prince, mais que néanmoins, il n’avait d’autre intention que de procurer la paix et que les Parisiens seraient bien insensibles à leurs maux s’ils ne le secouraient après un coup si favorable, et après six mois de travail qu’il a fait ; et qu’il va encore continuer à exposer son sang et faire comme Mademoiselle a fait à Orléans pour empêcher que les mazarins n’y entrassent, exhortant tous les bourgeois de se trouver à deux heures après midi sur le Pont-Neuf, non pour autre dessein que pour aller témoigner à S.A.R. et à M. le Prince la bonne volonté qu’ils ont pour leur service ; et que, comme le mal est à l’extrémité, qu’il ne faut pas balancer ; {c} que si l’on n’y apporte un prompt remède, le mal sera incurable, et qu’il faut chasser tous les suspects ; que le gouverneur de Paris {d} a été bien surpris de cette nouvelle de l’arrivée de M. le Prince et qu’il avait voulu s’y opposer, ayant pour cet effet festiné {e} plusieurs bourgeois pour les soigner et s’opposer à ce bonheur par une résolution qu’il avait fait prendre de l’Hôtel de Ville, et qu’il était bien capable d’en faire d’autres pour exposer les Parisiens à la merci du cardinal Mazarin si on ne le chassait. […]

M. le Prince a envoyé cette nuit un courrier pour faire ses excuses à S.A.R. de ce qu’il ne vient pas encore et pour lui dire qu’il était arrivé à l’armée ; où ayant appris que les mazarins avaient commencé à passer la Loire sur le pont de Gien, il avait jugé à propos de se tenir là pour les empêcher d’avancer. Les placards de ce matin ont fait un tel effet que pendant toute l’après-dînée une grande foule de peuple s’est tenue sur le Pont-Neuf, où elle a arrêté tous les carrosses qui ont passé pour reconnaître ceux qui étaient dedans, les ayant néanmoins laissé passer après les avoir obligés de crier Vive le roi et les princes ! et Point de Mazarins ! »


  1. Gaston d’Orléans, Son Altesse Royale, le 1er avril 1652.

  2. 2 avril.

  3. Hésiter.

  4. Le maréchal de L’Hospital.

  5. Régalé.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 16 avril 1652, note 8.

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(Consulté le 28/03/2024)

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