Marguerite ZIMMER

Le 28 juillet 1921 la Grande-Bretagne met en place une nouvelle réglementation de l’exercice de l’art dentaire. Désormais, la Faculté de Médecine de l’Université de Londres délivrera un nouveau diplôme : celui de bachelier en chirurgie dentaire (Bachelor  of Dental Surgery, B.D.S.). Pour obtenir ce titre, le candidat s’engage à suivre 5 années d’études.

Hygiène populaire et alimentation de l’après-guerre

Après la première guerre mondiale, l’hygiène populaire et la prophylaxie dentaire deviennent des priorités nationales à la fois dans les pays du nord de l’Europe et dans les pays d’origine germanique. A Paris, le 29 avril 1922, le Conseil supérieur de l’Instruction publique crée un Institut d’Hygiène à la Faculté de Médecine de Paris. Dans les écoles primaires, cette innovation n’aura malheureusement pas les répercussions escomptées. Les soins médicaux et dentaires n’y seront pas mieux assurés. Seules quelques rares municipalités avaient déjà créé des dispensaires ou des cliniques dentaires scolaires. A Montluçon, à Saint-Etienne, à Chaumont ou dans les VIIIème et XVème arrondissements de Paris, grâce à l’initiative de quelques praticiens motivés, les soins dentaires seront prodigués aux enfants des familles les plus démunies. Parmi ces chirurgiens-dentistes dynamiques citera: Francis Jean, Grimaud, Dunogier, Richaume, De Hogue, Fabret, Pinèdre, Robine, etc.. A Strasbourg, l’œuvre sociale entreprise sous l’occupation allemande par Ernst Jessen, continuait toujours à fonctionner ; à partir de 1914, les services de la clinique dentaire scolaire municipale seront secondés par ceux de la clinique dentaire de la Caisse Locale d’Assurance Maladie. L’ensemble des assurés pouvait accéder aux soins proposés par cette clinique.

Ernst Jessen à la clinique dentaire scolaire de Strasbourg

 

Au lendemain de la guerre, compte tenu des grandes difficultés de recrutement du personnel soignant, l’organisation rationnelle de soins dentaires ne sera pas facile à gérer ou à mettre en place. A Stockholm, Albin Lenhardtson lutte de toutes ses forces contre les propositions gouvernementales d’abaisser le niveau d’études des chirurgiens-dentistes. Confrontées à la pénurie de personnel médical qualifié, les autorités de la Suède envisageaient de mettre en œuvre toutes sortes de moyens pour suppléer au manque de praticiens, quitte à faire appel à du personnel mal ou peu instruit.

En matière d’hygiène dentaire, l’Allemagne occupe alors une des premières places mondiales. En 1929, il restait encore des milliers de cliniques dentaires scolaires communales dans ce pays, et cela malgré le surcoût occasionné pour les municipalités par ces installations et malgré l’inflation galopante de l’après-guerre. De l’autre côté de la Manche, l’Association dentaire britannique poursuivait activement la politique hygiéniste. Un grand nombre de dentistes acceptèrent de consacrer une partie de leur journée aux dépistages et aux traitements dentaires des enfants scolarisés. Aux Etats-Unis, les frères Forsyth et Georges Eastman, respectivement à Boston en 1910 et à Rochester en 1915, fondèrent des dispensaires dentaires dans le but de prodiguer des soins dentaires aux enfants les plus démunis. Dans le même ordre d’idée, signalons qu’en 1921 les dentistes de Rio de Janeiro fondèrent une clinique dentaire scolaire gratuite pour les enfants défavorisés.

L’examen dentaire périodique de ces enfants va immanquablement conduire les chercheurs vers une étude approfondie du régime alimentaire de la population. En 1917, May Mellanby remarque qu’il existe une altération du système osseux et dentaire dans les régimes carencés en vitamines. L’alimentation semblait jouer un rôle primordial dans la calcification des dents de l’enfant. Mellanby en conclut immédiatement que d’une part, les vitamines liposolubles, et particulièrement la vitamine D, sont essentielles à la calcification des dents, qu’elles peuvent prévenir, voire arrêter la carie, et que d’autre part, les céréales, le pain ou le riz contiennent des substances qui empêchent cette calcification. Il faudrait, par conséquent, ajouter à la ration alimentaire habituelle de la femme enceinte et de l’enfant, un supplément de vitamines liposolubles.

 

Six ans plus tard, très exactement en 1923, Hellman, Georges Harter, Clarence Grives, John P. Bibby, A.C. Fones et finalement Howe, se penchent eux aussi sur les troubles liés à la carence vitaminique en s’intéressant tout particulièrement au rôle joué par les vitamines dans l’assimilation de la chaux. Ils constatent, premièrement, que l’amélioration de l’état dentaire peut aller de pair avec la calcification du squelette et que deuxièmement, un enfant qui présente des dents saines résiste mieux aux maladies. Il fallait donc organiser des campagnes de prévention afin d’inciter les associations s’occupant de puériculture et d’hygiène à propager de meilleures informations sur les bénéfices d’une alimentation rationnelle au cours de l’enfance et de l’adolescence.

En matière d’hygiène, il faut encore signaler qu’en juillet 1929 F. Haloua présentera pour la première fois une brosse à dent rotative à mouvements mécaniques.

La brosse à dents rotative à mouvement mécanique de F. Haloua.

 

 

La lutte contre la pyorrhée alvéolaire.

En 1918, Maurice Roy avait conclu que la pyorrhée alvéolaire commençait toujours par une atrophie sénile. Aldershoff, d’Utrecht, pensait que la goutte en était la cause principale. Nous l’avons vu dans le chapitre précédent, Aldershoff, Goldenberg, Lebedinsky, B. Kritchevsky, P. Séguin, Besredka, Von Behring, vont reprendre ensuite les idées de Goadby et prétendre que la vaccination (vaccin Inava par exemple) est une thérapie particulièrement efficace. Les accidents anaphylactiques n’étant pas rares, entre novembre 1925 et juin 1926, Léon Frey préparera et utilisera un gélo-vaccin. Cependant, malgré toutes ces tentatives de désensibilisation, la thérapeutique vaccinale se solda par un échec.

En 1928, après avoir porté son attention sur l’étiologie de la cémentose dentaire, Angel Julio Demaria (Buenos-Ayres), qui suivait la voie tracée par J. V. Lafarga, arrivait à la conclusion suivante :  » Les lésions cémentaires dans la pyorrhée alvéolaire consistent en phénomènes de réabsorption qui se distinguent de ceux des dents non pyorrhéiques par leur grande intensité, leur plus grande extension et leur non-réparation par du cément néoformé « . Au même moment, en France, Charles Hulin étudiait l’anatomie pathologique et la pathologie de la pyorrhée alvéolaire. Il démontrera que les calculs salivaires se forment par réaction colloïdale avec durcissement progressif de la masse des albuminoïdes. Deux ans plus tard, Broderick, de Londres, mettra l’accent sur l’importance du diagnostic différentiel entre la gingivite marginale simple et le début d’une vraie pyorrhée.

Suppression des culs-de-sac par les cautérisations ignées.
Méthode présentée par Maurice Roy, en 1930.


Abcès pyorrhéïque serpigineux ou abcès péricémentaire.

La relecture des publications de l’époque montre surtout que les auteurs adoptaient des classements forts différents pour désigner la pyorrhée alvéolaire. Parmi les parodontologistes de cette deuxième décennie du XXème siècle, on retiendra surtout les noms de Türner, Gottlieb, Orban, Steadman, Von Beust, Pickerill, Talbot, Warwick James, etc.

Evolution des traitements endodontiques.

Les traitements radiculaires :

Depuis une vingtaine d’années, on avait inventé et proposé aux praticiens un nombre impressionnant de composés chimiques pour traiter dents infectées, chambres pulpaires et canaux radiculaires. On savait que l’obturation complète des canaux radiculaires était une condition sine qua non de réussite dans le traitement des caries du 3° et du 4° degré. Deux catégories de substances permettent alors d’espérer la bonne réussite de l’opération : les matières plastiques et les pâtes. Parmi les matières plastiques, on trouve l’oxychlorure de zinc, la chloro-percha, la paraffine et la gutta. Les pâtes sont vendues sous le nom de pâte de Witzel, pâte de Ferrier ou pâte de Buckley, leur véhicule commun étant l’oxyde de zinc auquel sont incorporés des antiseptiques sous forme liquide ou pulvérisée. Percy Howe adoptait une méthode différente et suggérait de traiter les dents mortes avec deux types de solutions : l’une à base de nitrate d’argent et d’ammoniaque, l’autre à base de formaline.

Les complications qui pouvaient survenir après toute dévitalisation dentaire étaient préoccupantes. En 1918, les Etats-Unis s’inquiétaient principalement de la relation qui pouvait exister entre une infection péri-apicale et l’état général du malade. L’introduction de la théorie de l’infection focale par E. C. Rosenow en 1909 et une série de rapports sur l’étiologie du rhumatisme aigu, de l’appendicite, de l’ulcère stomacal et duodénal, de l’arthrite et des néphrites, avaient entraîné de profonds changements dans l’attitude du praticien face au diagnostic et au traitement des dents dépulpées ou infectées. Pour les auteurs américains, toute dévitalisation était une calamité, voire une menace pour l’organisme. Les rapports publiés dans les revues professionnelles étaient sources de controverses ; pour mémoire citons les confrontations qui eurent lieu entre certaines équipes de chercheurs (entre Novitzky et M. L. Rhein, entre Cotton et Milles, entre les frères Mayo, Enrici, Hartzel, W. Price, T.-P. Hyatt, Duke, Peters, Brophy, Rosenow, Joseph Mendel etc.). Face aux partisans de l’extraction à outrance, des auteurs comme Black, Klein, Percy, Percy Howe, Frey, Maurice Roy, Mendel Joseph, J. Pailliottin, Cavalié, préféraient la méthode conservatrice. Les travaux de A. B. Crane, Carl J. Grove, Clyde Davis, et Housset reflétaient d’ailleurs parfaitement bien l’évolution profonde que subissaient alors les différentes méthodes de traitements radiculaires.

En juin 1923, Harry B. Johnston, d’Atlanta, introduit le chloroforme et la résine dans ce qu’il appelle la technique d’obturation par diffusion. Les canaux pulpaires seront inondés d’un mélange de chloro-résine-percha, facilement soluble dans le chloroforme. Johnston pensait que cette médication électrolytique allait permettre une meilleure obturation des espaces interprismatiques et des tubulis accessoires, mais il reconnaissait que cette méthode n’était pas parfaite.

La même année, Henri Lentulo faisait pénétrer des pâtes antiseptiques dans les canaux à l’aide du foret Beutelrock, ou de la broche de Kerr, montée sur le tour dentaire et tournant à l’envers. Housset avait déjà parlé de cette technique opératoire de traitement des racines dentaires, mais le travail remarquable de cet auteur n’avait pas attiré l’attention qu’il méritait. Lentulo transformera le procédé et, en janvier 1928, il sera en mesure de présenter le  » bourre-pâte rotatif  » que tous les praticiens connaissent aujourd’hui. L’obturation des canaux par les cônes de gutta, longtemps combattue par certains praticiens et notamment par Maurice Roy, trouvait là une alternative fort satisfaisante.


Les bourres-pâte rotatifs de Henri Lentulo, janvier 1928

Les premières recherches bactériologiques sur les infections chroniques de la pulpe et de l’apex seront réalisées en 1926 par B. Kritchewsky, P. Séguin, et G. Delater. Puis, en 1929, le laboratoire de recherches de John Hampton Hale, de Londres, étudie ce que E.W. Fish appellera les tractus morts de la dentine, ainsi que la formation de la dentine secondaire.

Le coiffage pulpaire :

En 1920, Hermann recommande dans sa dissertation inaugurale, de procéder, sous anesthésie locale et une stricte asepsie, à l’amputation vitale de la pulpe coronaire, puis de faire un coiffage pulpaire à l’aide d’une préparation à base de chaux et d’une solution de Ringer Lake ; cette préparation, connue sous le nom de Calxyl, est un hydroxyde de calcium. Par la suite, J. Münch utilisera une pâte aux sels de calcium vitaminés, le Pulpatekt I. Erik Hellner, Neuwirt et G. Feldmann lui préfèreront l’implantation ou l’auto-implantation de copeaux de dentine. La règle la plus rigoureuse et en même temps la plus difficile à observer consistait à ne pas exercer de pression lors du recouvrement de la cavité ; d’où l’emploi d’un ciment neutre ou à la rigueur d’un ciment à l’oxyphosphate isolé de la pulpe par une couche de cire. Quatre ans après les travaux de Hermann, Jean Polus proposera une nouvelle méthode de coiffage pulpaire au nitrate d’argent.

L’actinothérapie localisée.

Le principe de la lampe à vapeurs de mercure, dont le globe était à l’origine en verre, avait été découvert par Ahrens vers la fin du XIXème siècle. En 1904, Cooper Hewitt inventait la lampe de mercure à globe de quartz ; puis, en 1913, l’hôpital londonien Volterra utilisera la lampe de Siemens pour guérir abcès froids et toute sortes de plaies tuberculeuses.

La lampe d’Arpad v. Dobrzyniecki, 1909.

 

Kromayer, à Berlin, construira ensuite une lampe dentaire à vapeur de mercure et, en 1921, Kaudeker (de Berlin) invente la lampe à arc de carbone, tandis qu’à Florence, Arnone obtient quelques résultats favorables avec la lampe à arc de charbons imprégnés. En 1925, Saidman décrit une lampe à étincelles fonctionnant sur courant bipolaire de haute fréquence, tandis qu’à Paris Louis C. Barail étudiait les lampes à rayons U.V. (lampes à arc de carbone pur et lampes à arc de charbon imprégné, lampes à arc de tungstène, lampes à vapeur de mercure et lampes-électrodes, lampes à effluves ou lampes à étincelles bipolaires et unipolaires) et mettait au point des appareils producteurs d’oscillation de haute fréquence à électrodes courtes.

L’action analgésique et bactéricide de l’actinothérapie localisée présentait une valeur thérapeutique à la fois dans le traitement des stomatites, des plaies infectées et des accidents de dents de sagesse (trismus). Ces techniques servaient aussi à soulager les irritations gingivales des enfants ; dans certains cas elles pouvaient hâter l’éruption des dents.

Les électrodes courtes de Louis Barail, 1926.

Progrès enregistrés en matière d’anesthésie

Depuis de nombreuses années, les auteurs classiques et notamment Guido Fischer recommandaient de faire les injections dans la fibro-muqueuse en poussant le liquide anesthésique dans le tissu cellulaire sous-muqueux avoisinant la dent. A partir du mois d’avril 1920, Chompret introduit une nouvelle méthode d’injection en proposant d’anesthésier directement le ligament alvéolo-dentaire.

A la suite des nombreuses tentatives d’anesthésie tronculaire du nerf dentaire inférieur de Reclus, Chevassu, Sauvez (1903), Richard Hall, William Halstead et Raimond, la technique s’affirmera et suscitera un réel enthousiasme auprès des stomatologistes, d’autant plus qu’en 1906 Nogué en avait précisé le procédé d’injection au niveau de l’épine de Spix.

Dans la pratique courante du chirurgien-dentiste les choses iront moins vite ; les différentes méthodes d’anesthésie ne s’imposeront dans les cabinets qu’à la suite des efforts de vulgarisation menés pour les procédés d’anesthésie par voies intrabuccales par Nogué, Nevin, Nivard, Dieulafé, Gérard-Maurel, etc. et pour les anesthésies transcutanées par Bercher, Peckert, Kein, Sicher, etc. En 1926, Jean Vilenski mettra en valeur la technique de l’anesthésie du nerf maxillaire supérieur par le canal palatin postérieur.

Rappelons aussi qu’en mai 1921, V.E. Miégeville et Lericolais présentaient à la Société d’Odontologie de Paris le nouvel appareil à protoxyde d’azote des Drs. Desmaret et Lericolais.

Nouvelles étapes dans la conception des prothèses adjointes et conjointes.

Les pivots articulés

L’emploi de pivots articulés, dits à rotule, comme éléments de bridges mobiles, datait d’environ une vingtaine d’années. Edmond Touvet-Fanton, de Paris, considérait que ces éléments de bridges mobiles étaient excellents, car ils permettaient de prolonger la longévité des racines de soutien, surtout lorsqu’on y adjoignait des pièces limitatives sous forme d’anneaux ou d’épaulement. Touvet-Fanton estimait que les ponts fixes de grande portée et d’une seule pièce étaient voués à l’échec à plus ou moins brève échéance à cause de la désagrégation des piliers (obliquité des points d’appuis, contrariété des efforts, gauchissement, arthrite, etc.).

Prothèses complètes et stellites de contention

En 1921, Georges Aspa étudie la stabilité et l’adhérence des appareils complets au cours de la mastication. Il rejette d’emblée les modèles à succion qui produisent des déformations de la voûte palatine. Les empreintes des maxillaires sont faites au plâtre et les deux modèles coulés dans le même matériau. Aspa vulcanise ensuite sur les modèles des plaques de caoutchouc ordinaire. Après avoir ajusté les plaques ainsi obtenues en bouche, il les borde avec de la pâte de Kerr sur une largeur de 5 à 6 mm et sur une épaisseur de 2 à 3/10 de mm. La succion doit alors être parfaite. Correctement ajustées, ces plaques seront stables ; l’occlusion sera alors d’autant plus facile à enregistrer.

 

L’origine des premiers appareillages prothétiques de contention de dents mobiles se perd dans la nuit des temps, les dentistes ayant depuis toujours eu le désir de maintenir en place, par divers artifices, les dents branlantes de leurs patients. Une conception rationnelle d’un système de contention de dents mobiles (dans les cas de pyorrhées alvéolaires) commence à naître réellement dans l’esprit des praticiens vers 1922. Cette année là, Haderup publie un travail dans lequel il reproduit les dessins de certaines attelles de contention imaginées antérieurement par Bryan, Herbst, Resch, Sachs, Case, Thiersch, Carmichael, Mamlock, Rhein, Elander et Wolff. Haderup avait d’ailleurs perfectionné lui-même une attelle en 1911. Puis, en février 1923, Georges Villain présente un nouveau procédé d’immobilisation des dents en mettant au point ce qu’on appellera le  » stellite de contention « . Deux ans plus tard, René Ninck invente la presse à air comprimé pour couler les métaux sous pression.


Presso-pompe de René Ninck

 

Les nouveaux matériaux prothétiques

La résine synthétique, corps résultant de la condensation du phénol en présence de formol, était bien connue des laboratoires, notamment des laboratoires Trillat et De Laire, de Bayer, Backeland, et Lebach. L’émaillage artificiel des appareils dentaires au moyen de résines synthétiques apportera un profond changement dans l’élaboration des prothèses.

Vers 1928, le Dentolith, produit d’invention anglaise à base d’acétate de cellulose, se répand largement Outre-Manche, ainsi qu’aux Pays-Bas, en Allemagne, dans les pays nordiques, en Suisse, en Italie, sans oublier les Etats-Unis. En France, on s’intéresse à l’Hécolite, produit à base de celluloïd, dont le goût, la fragilité et la coloration interdisent toute utilisation en prothèse partielle.

Notons encore qu’au cours de la même année 1928, G. Vajda invente de nouveaux instruments destinés au travail des matières plastiques (sondes, spatules interdentaires).

Nouvelles solutions thérapeutiques pour le traitement des tumeurs malignes du maxillaire et du cancer de la langue

La thérapie par le radium (curiethérapie) et par les rayons X avait révolutionné le concept du traitement des tumeurs malignes du maxillaire supérieur ou des cancers de la langue. Avant l’avènement de ces nouvelles techniques physiques, le traitement se bornait aux méthodes chirurgicales, c’est-à-dire à la résection pure et simple du maxillaire, opération généralement extrêmement mutilante et surtout insuffisante. Depuis le début du siècle, les chirurgiens avaient la possibilité de recourir à l’une ou à l’autre de ces méthodes de traitement ou de les associer. Pour les sarcomes du maxillaire supérieur, on procédait habituellement à la résection partielle de ce maxillaire. Pour le traitement des cancers de la langue, Robert Proust, chirurgien de l’hôpital Broca, à Paris, préconisait l’ablation chirurgicale des ganglions cervicaux et la ligature de la carotide externe, puis l’application dans la tumeur de 8 tubes de radium pendant 8 jours. Le traitement se poursuivait ensuite par la radiothérapie.

Notons qu’en 1928, aux Journées médicales de Bruxelles, Heyninx rappelait que dans les culs-de-sac gingivo-dentaires de patients atteints de pyorrhée alvéloaire, on trouvait quelquefois de petits foyers de proliférations épithéliales morphologiquement identiques à ceux d’un néoplasme. Selon cet auteur, ce pouvait être le point de départ d’une généralisation carcinomateuse ; ulcérations buccales et irritations de la muqueuse dues à une dent fracturée, leucoplasies, épulis fibreux, étaient susceptibles de préparer le lit du cancer.

Les différentes radiographies dentaires

La qualité des radiographies dentaires avait considérablement évoluée. En juillet 1922, la maison Gaiffe et Gallot présente un nouvel appareil de radiologie transportable, monté sur une colonne en ébonite, dont le tube de Coolidge avait été fabriqué par les établissements Pilon. Il me semble très important de rappeler que la plupart des constructeurs ne munissaient pas leur appareil d’un dispositif assurant une protection suffisante contre l’électrocution.

Les radiographies dentaires pouvaient être faites selon trois méthodes différentes:

les méthodes intra-buccales

la méthode rétro-alvéolaire : le rayon central du faisceau de rayons passe par l’apex de la dent et tombe perpendiculairement sur le plan bissecteur de l’angle formé par la dent et le film.

le film est maintenu en position horizontale par l’occlusion des arcades : le rayon central y arrive à 45 degrés en passant par les apex.

Le film est horizontal ; l’incidence perpendiculaire. Le rayon central est orienté suivant l’axe des dents.

Le film de 6,5 centimètres sur 9 environ est horizontal ; la projection perpendiculaire passe par le centre de courbure du maxillaire.

Les méthodes extra-buccales

Le film est placé contre la joue ; la projection est oblique et le patient couché sur le côté, la tête en extension, la bouche ouverte. Pour le maxillaire inférieur, l’ampoule est portée vers l’épaule et orientée à 45 degrés. Pour le maxillaire supérieur, l’ampoule est portée vers le menton avec la même incidence.

Le film est placé contre la joue ; la projection est perpendiculaire, le film horizontal et la position identique.

Le film est placé contre la partie antérieure de la face ; projection perpendiculaire centrée sur l’occiput. Le sujet est couché sur le ventre, face sur un film horizontal. Cette position sert à l’étude des sinus.

Le film est placé contre la région sous-mentonnière ; projection oblique. Le patient est couché sur le ventre. Le rayon central est dirigé obliquement vers le centre de courbure du maxillaire inférieur et passe en avant du vertex Cette vue sert à étudier la base du crâne, des sinus, des maxillaires et des dents.

La stéréo-radiographie

Pour la stéréo-radiographie on centre comme pour une radiographie simple, puis on décale l’ampoule de 3 centimètres à droite. On prend un premier cliché. On décale ensuite l’ampoule de 3 centimètres à gauche et on prend un second cliché. Les deux images obtenues sont observées dans un stéréoscope et donnent la vue en relief.

Le cinéma fait son entrée en art dentaire

En décembre 1923 une nouvelle révolution bouleverse l’enseignement de l’art dentaire : le cinéma fait son entrée à l’Ecole dentaire de Paris avec un film de Th. Morineau sur l’aurification. Il sera suivi, en 1924, d’un film sur les principes généraux de préparation des cavités. Le coût d’un film éducatif s’élève alors à environ 30.000 francs.

Histologie et étiologie des caries dentaires

W. D. Miller avait montré que l’acide lactique formé par la décomposition des aliments hydrocarbonés dissout les composants inorganiques de la dent. Les recherches sur l’étiologie carieuse seront marquées non seulement par les travaux de Miller, mais aussi par ceux de Black, de Léon Williams, de Bunting et de Rickert. On savait que les bacilles acidophiles étaient présents dans toutes les caries actives. Les techniques de microscopie n’avaient cependant pas encore permis de visualiser les microbes d’un émail désintégré, ni de différencier le caractère de ces bactéries. En 1928, Charles F. Bödecker va montrer que la pénétration microbienne ne se fait pas entre les prismes comme on l’avait supposé antérieurement, mais au travers du corps du prisme de l’émail.

L’acide trichloracétique : un médicament polyvalent

En 1895, Rodier utilisait déjà l’acide trichloracétique. En 1922, Gâtineau l’emploie pour la cautérisation des lésions gingivales. Puis, en 1929, Marcel Darcissac et son élève Eymeri réactualisent les données relatives à ce caustique ; ils estiment que ce médicament est indiqué pour les érosions traumatiques plus ou moins profondes provoquées par le meulage des couronnes ou à la suite d’un détartrage, pour la cautérisation des capuchons muqueux enflammés au cours de l’évolution des dents de sagesse, pour les cautérisations des ulcérations, en particulier des ulcérations des stomatites gangreneuses, pour les cautérisations des culs-de-sac pyorrhéiques ou des plaies opératoires, dans les hémorragies secondaires, pour la dépulpation des dents saines et pour le traitement des dents infectées.