Dr John Welshman
Institut de Recherche en Santé Publique
Université de Lancaster, Grande-Bretagne.
Traduction française de Marguerite ZIMMER

Introduction

Au Royaume-Uni, un certain nombre de facteurs étroitement liés les uns aux autres ont attiré récemment l’attention sur le partage des compétences en art dentaire. Ils incluent le fait que, dans l’ensemble, la santé bucco-dentaire a énormément évolué par rapport aux 20 années passées, même s’il subsiste des différences géographiques et sociales. Il y a une plus grande prise de conscience en matière de soins bucco-dentaires, même si, pour beaucoup de personnes, il est de plus en plus difficile de trouver un dentiste relevant du National Health Service (le Service de la Santé Publique). On sait aussi que de nombreux travaux, couramment exécutés par les dentistes, ne sont que des services standards. On insinue aujourd’hui que plusieurs de ces travaux pourraient être délégués aux auxiliaires dentaires, permettant de ce fait au dentiste d’exercer son rôle de chef au sein de l’équipe dentaire. Aujourd’hui, le rôle des auxiliaires est reconnu dans ce que l’on appelle maintenant les « Professionals Complementary to Dentistry ».

Certains signes montrent qu’au Royaume-Uni, les législateurs sont plus réceptifs à l’idée d’une plus grande participation de ces « Professionals Complementary to Dentistry ».

A part le rapport de 1976 du Court Committee (le Conseil de la Cour) et le rapport de la Royal Commission du NHS (1979), d’autres rapports importants, comme le rapport Bloomfield (1992), le rapport Nuffield sur l’Education et la Formation continue (1993) et le rapport du Groupe des Auxiliaires Dentaires (1998) (1), s’y sont ajoutés. Lors du congrès annuel de l’Association Dentaire Britannique, par exemple, en avril 1998, Alan Milburn, Ministre de la Santé, affirma que les objectifs du gouvernement étaient de réduire les inégalités en matière de santé bucco-dentaire, d’élargir l’accès aux soins, d’offrir aux communautés locales un service de santé mieux intégré, d’assurer des soins de la qualité la plus élevée et de prendre des mesures pour que tous les membres de la profession dentaire y contribuent totalement. Il indiqua qu’il allait réfléchir au rapport du Conseil de l’Ordre sur les  » Professionals Complementary to Dentistry  » et voir comment ce dernier pourrait aider le gouvernement à atteindre ces objectifs. (2) De même, un document récent,  » Modernising NHS Dentistry « , publié en septembre 2000, a montré qu’il existait des projets d’inscrire d’autres genres d’auxiliaires au Conseil Dentaire Général, d’élargir le rôle des thérapistes et des hygiénistes dentaires et de créer de nouvelles familles de techniciens-cliniciens dentaires et d’assistants en orthodontie.

De même, jusqu’à tout récemment, aucune enquête scientifique de fiabilité des nombreuses études n’a été faite qui permettrait de comparer les travaux des dentistes et des auxiliaires dentaires. C’est aujourd’hui le sujet d’un compte-rendu systématique, mis en place par le NHS R & D Programme pour les Soins Dentaires Primaires, et réalisé par les collègues de l’Université d’Oxford et de York et par l’Institut Dentaire Eastman, à Londres. Cet article ne tient pas compte de cette étude systématique, qui est presque terminée à l’heure actuelle. Il porte plutôt sur un autre aspect de la question, qui est celui de l’histoire des auxiliaires dentaires. Ainsi, cet article cherche à faire une étude historique sur les auxiliaires dentaires, en se penchant en particulier sur celle des assistantes dentaires de la Nouvelle Zélande et sur différentes études réalisées en Nouvelle Zélande dans les années 1950.

Les « professionals Complementary to Dentistry »
(les professionnels assistants dentaires)

Les Professionnels assistants dentaires se composent actuellement de différents groupes ayant chacun sa propre histoire et ses propres domaines de connaissances techniques. L’un de ces groupes correspond aux assistantes dentaires, dont la durée de vie professionnelle est particulièrement courte, n’excédant souvent pas 4 ou 5 années. Les hygiénistes dentaires forment le second groupe, qui, habituellement, réalisent les nettoyages, le polissage et le détartrage des dents. L’Association Américaine des Hygiénistes Dentaires a été créée en 1923, et l’Association Britannique des Hygiénistes Dentaires en 1949. Un troisième groupe est représenté par les thérapeutes dentaires qui, au Royaume-Uni, sont autorisés à obturer des dents et à extraire des dents de lait – la plupart ne travaillent que sur des enfants. Ils sont peu nombreux – en 1993, par exemple, il y en avait 371.

Les techniciens dentaires réalisent les couronnes veneers, les inlays, les couronnes, les bridges et les appareils d’orthodontie. En 1993, on a estimé qu’il y avait environ 7900 techniciens au Royaume-Uni. Certains travaillent illégalement comme denturologues, c’est-à-dire qu’ils exécutent toutes les étapes cliniques et pratiques nécessaires à l’élaboration d’une prothèse. Les techniciens de la maxillo-faciale ont tendance à travailler dans les hôpitaux en accord avec des cliniciens, leurs travaux incluent les restaurations à la suite de fractures, la réhabilitation prothétique, l’implantologie, et les plannings pré-opératoires. En dernier, il y a les auxiliaires d’orthodontie, quoique actuellement au Royaume-Uni elles ne fassent pas partie de l’équipe orthodontique. . (3) Il y aussi de réelles différences dans les divers pays entre les dénominations et les fonctions et, de ce fait, elles ont été complémentaires des soins dispensés par les dentistes.

Le contexte de la Santé bucco-dentaire au Royaume-Uni

Plusieurs études, notamment le rapport de la Cour relatif aux Child Health Services (Services de Santé infantile) (1976), et le rapport de la Commission Royale du NHS (1979) ont montré des aspects révélateurs de la santé bucco-dentaire au Royaume-Uni. Elles ont eu également des conséquences importantes sur la manière dont l’histoire de l’art dentaire a été appréhendée et décrite.

Le rapport de la Cour, par exemple, a révélé que l’étude de 1968, portant sur la santé bucco-dentaire des adultes, avait montré que plus de 15% des 15- 34 ans du Nord avaient perdu toutes leurs dents – 37% de la population adulte était édentée. Il montrait qu’en Nouvelle Zélande, où les enfants étaient soignés par les assistantes dentaires, l’effet en a été démontré de manière impressionnante. Le rapport affirmait que les soins dentaires avait largement été dirigés vers des traitements pour adultes et que ‘la priorité devrait s’écarter de la dentisterie et des reconstitutions pour adultes, pour se diriger vers la dentisterie et la prévention pour les enfants’. Il donnait le conseil suivant : que des assistantes dentaires, comme les hygiénistes ou celles formées à l’École du New Cross, à Londres, puissent apporter une contribution importante pour assurer les soins dentaires des enfants.(4)

Le chapitre sur l’art dentaire était l’un des plus intéressants du rapport de la Commission Royale du NHS. Il montrait qu’il n’y avait pas eu de compte-rendu complet sur les services dentaires du NHS dans les vingt dernières années, et que la santé bucco-dentaire de la nation était ‘mauvaise’. Le taux d’édentations totales avait chuté depuis l’étude de 1968 sur la santé bucco-dentaire des adultes. En 1978, en Angleterre, les édentations totales, tous âges confondus, avaient baissé de 37% à 29%, et en Écosse de 44% à 39%. Cependant, la Commission Royale avait aussi noté qu’il existait des variations régionales et inter-régionales importantes dans les ressources dentaires. Le pourcentage de dentistes était, par exemple, de 1 sur 2494 au Sud-Ouest de la Tamise et de 1 sur 5445 dans les régions du Nord. Le pourcentage d’individus sans dents naturelles montrait des différences frappantes selon la région et la classe sociale – souvent plus élevées dans les catégories sociales I, II et III, ainsi qu’en Écosse et aux Wales. Comme dans le rapport de la Cour, la Commission Royale avait remarqué la contribution potentielle du groupe des auxiliaires, recommandant que la flexibilité pour les demandes de réunions pourrait être appliquée en fonction de l’augmentation de leur nombre.(5)

Les deux rapports mettaient en avant un certain nombre d’autres points, notamment le fait que la fluoration de l’eau n’avait pas été introduite dans la plupart des régions, que l’accent avait été mis davantage sur le traitement que sur la prévention, et que finalement les changements de mode alimentaire et d’utilisation de dentifrices fluorés avaient été de plus d’importance que le fait de prodiguer des soins dentaires. Pour les historiens de l’art dentaire, ils ont cependant une signification plus large . Depuis trop longtemps, l’histoire de l’art dentaire s’est intéressée à l’histoire des professionnels plutôt qu’à celle des patients, aux services plutôt qu’aux besoins, et en mettant en évidence les succès plutôt que les erreurs.

L’Assistante dentaire scolaire de la Nouvelle Zélande

L’histoire des premières Assistantes dentaires scolaires de la Nouvelle Zélande a souvent été relatée dans des travaux plus anciens, et n’a nullement besoin d’être répétée ici. (6) Brièvement, à partir de 1921, et sous la supervision de Sir Thomas Hunter, la plus grande part de responsabilité des soins dentaires des enfants scolarisés de la Nouvelle Zélande avait été assurée par les assistantes dentaires scolaires. Leurs fonctions comprenaient les examens dentaires, les préparations des cavités et les restaurations (avec des amalgames au cuivre, des amalgames d’argent, des ciments au silicate), et les amputations pulpaires. Elles pouvaient aussi extraire des dents de lait, étaient responsables de l’éducation bucco-dentaire et pouvaient adresser les enfants aux dentistes.

D’une certaine façon, l’évolution des Assistantes dentaires scolaires de la Nouvelle Zélande peut être vue comme une réponse aux modèles géographiquement et démographiquement différents de ce pays. En 1950, la population de la Nouvelle Zélande était de 18 millions d’habitants., avec une forte proportion de personnes jeunes – en 1946, par exemple, elle comptait 590.000 enfants. Les plus grandes villes étaient Wellington, Auckland, Christchurch et Dunedin, mais aucune n’était particulièrement grande, selon les standards européens, car la plus grande comptait au maximum 300.000 personnes. La majeure partie de la population vivait dans de petites villes de 2 à 3000 habitants et dans des communautés rurales. Certaines régions du sud de l’île étaient inhabitées.

Une étude comparative de l’histoire des soins dentaires de la Nouvelle Zélande et de celle du Royaume-Uni serait extrêmement intéressante.  Il y a des signes qui montrent un intérêt de plus en plus grand pour l’étude de l’histoire des soins bucco-dentaires de la Nouvelle Zélande. (7) De plus, il est évident que les médecins du secteur public qui ont émigré de la Nouvelle Zélande vers la Grande-Bretagne et qui ont travaillé pour la Santé Publique anglaise dans les années quarante, ont été choqués par ce qu’ils ont trouvé là-bas.(8) Mais une véritable étude historique reste à faire. Nous nous intéressons ici aux Assistantes Dentaires Scolaires de la Nouvelle Zélande créées au cours des années 1950. Il y avait plusieurs études mineures. Mais les plus importantes furent celles d’Allen Gruebbel à la demande de l’Association Dentaire Américaine (1951), celle du Ministère de la Santé du Royaume-Uni (1950) et celle de John Fulton, à la demande de l’OMS (1951).

L’étude de Gruebbel était très critique à l’égard du Service Dentaire Scolaire de la Nouvelle Zélande, montrant que les équipements étaient inadaptés et que la qualité des traitements était mauvaise. Les assistantes dentaires scolaires ne possédaient que deux sortes de ciments au silicate. Gruebbel assurait qu’elles faisaient des obturations à l’amalgame de cuivre et qu’elles travaillaient avec des fauteuils pliants et des tours à pédale. Il affirmait que la santé bucco-dentaire des soldats de la Nouvelle Zélande n’était pas meilleure en 1939-45 qu’en 1914-18, car 58% présentaient une prothèse quelconque. Gruebbel écrivait : ‘une assistante dentaire scolaire n’est pas un dentiste, c’est un technicien formé pour l’art mécanique des obturations, du nettoyage et de l’extraction des dents’. Mais la plus grande critique de Gruebbel ne concernait pas le Service Dentaire Scolaire de la Nouvelle-Zélande en soi, mais l’intervention de l’état et les soins dans un système socialiste. C’est pourquoi ce système était largement influencé par la politique culturelle différente des Etats-Unis – ‘une législation sociale excessive détruit les efforts et les initiatives individuelles’. (9)

L’étude de John Fulton, à la demande de l’OMS, a été diffusée entre février et avril 1950. Fulton rapportait que 4072 écoliers âgés de 7 à 14 ans ont bénéficié d’un examen dentaire. La fréquence des caries était élevée en Nouvelle Zélande. Néanmoins un grand nombre d’enfants avait été traités. En 1949, environ 715 enfants par assistante ont été soignés dans les cliniques dentaires scolaires, pour un coût approximatif de £1 8s 11d. Fulton affirmait que « le programme dentaire public de la Nouvelle Zélande avait remporté un grand succès en assurant le contrôle du taux carieux des enfants scolarisés » (10)

Une équipe du Ministère de la Santé du Royaume Uni a visité la Nouvelle Zélande en mars 1950, voyageant par air, mer et terre. L’envoi de l’équipe avait été suggéré par l’effondrement imminent du Service Dentaire Scolaire, et son rapport fut bien plus positif sur de nombreux points. Les cliniques dentaires scolaires de la Nouvelle Zélande étaient de simples structures en bois, se composant d’une antichambre, d’un cabinet de chirurgie et d’une petite salle de repos. L’équipe gouvernementale estima que le niveau clinique des étudiants de la dernière année d’études de l’École de Formation et de la clinique dentaire scolaire de Wellington était élevé. Elle en conclut que ‘nous sommes unanimement convaincus que la formation des assistantes dentaires scolaires de la Nouvelle Zélande a acquis une efficacité technique de haut niveau…le système des assistantes dentaires de la Nouvelle Zélande nécessite une aide urgente’. (11)

L’un des membres de l’équipe, A. T. Wynne, amplifia ces résultats dans un article publié l’année suivante dans le British Dental Journal. Wynne répéta que son impression première sur les travaux des assistantes dentaires scolaires était ‘leur détermination vraiment étonnante à sauver des dents’. Wynne était très critique à l’égard du rapport de Gruebbel, affirmant que ce qu’il disait n’était pas une critique à l’encontre des assistantes dentaires. Finalement, Wynne soutint que ‘l’essentiel était que la bouche de la majorité des enfants de la Nouvelle Zélande soit maintenue en bon état, avec un minimum de pertes dentaires, grâce aux travaux des assistantes dentaires’. Il avait cependant noté qu’au Royaume-Uni, le recours aux assistantes se devait d’être un supplément par rapport au système existant – quelques travaux pouvaient être délégués aux assistantes dentaire, mais elles ne pouvaient pas remplacer les dentistes. (12)

Par la même occasion il est important de faire remarquer que des études plus récentes ont montré qu’un pourcentage bien plus important de Néo-zélandais porte des prothèses complètes, comparé aux groupes ayant un taux similaire de pathologies dentaires dans les autres pays. (13) Il est incertain qu’il y ait un rapport entre ceci et le Service dentaire scolaire néo-zélandais. Le fait que le modèle de la Nouvelle Zélande ait été pris en compte en Australie, dans certaines régions reculées du Canada et aux Pays-Bas, est bien plus significatif. Les assistantes dentaires scolaires de la Nouvelle Zélande ont eu une influence très importante sur l’émergence d’un système de soins bucco-dentaires, particulièrement en Asie du Sud-Est, où un certain nombre de pays adoptèrent le modèle néo-zélandais.

L’auxiliaire dentaire au Royaume Uni

En effet, les rapports sur le Service de la clinique dentaire scolaire de la Nouvelle Zélande ne furent que les étapes les plus récentes dans l’histoire des auxiliaires dentaires du Royaume-Uni. Elles ont été clairement impliquées dans les soins dentaires au XIXe siècle, lorsqu’elles furent employées comme apprentis. Leur emploi augmenta avec l’introduction des anesthésiques à partir de 1850, quand elles servirent de chaperon aux patientes féminines. Vers la fin du XIXe siècle, les veuves et les filles de dentistes étaient employées comme réceptionnistes ou comme secrétaires. (14) Aux Etats-Unis aussi, la coopération potentiellement plus grande entre dentistes et assistantes dentaires a été reconnue dès 1920. (15)

Jusqu’en 1859, il n’y a eu aucune qualification officielle pour celles qui assuraient des soins dentaires. Cependant, à partir de 1916, quelques auxiliaires dentaires (appelées ‘dental dressers’ = préparatrices dentaires) furent employées par les  » Local Education Authorities  » (les Autorités Locales de l’Education ou LEA), en réponse au nombre insuffisant de dentistes qualifiés et aux difficultés de les employer à un salaire inférieur à celui du privé. Le Derbyshire était l’un des plus importants de ces LEA, de même que le Sheffield et le Shropshire. Dans le Derbyshire, deux préparatrices travaillaient en petite équipe avec un dentiste, examinant et traitant les enfants sous l’autorité du dentiste. On disait que c’était moins onéreux et que la productivité était meilleure. La constitution de ces LEA fut encouragée par l’Acte des Dentistes de 1921, qui permettait de faire, au sein du service médical scolaire, ‘des soins dentaires mineurs, sous l’autorité d’un dentiste patenté, par une personne qui n’était pas un dentiste’.

Cependant, les préparatrices dentaires furent effectivement supprimées en 1923 par le Ministère de la Santé qui appliqua les lois de l’Acte des dentistes de 1921. Les mots ‘travaux dentaires mineurs’ furent mieux définis en 1932. (16) Un plan expérimental de formation des hygiénistes dentaires fut déposé à l’University College Hospital à la suite d’une opposition de la profession dentaire. Les dentistes s’opposèrent aussi avec succès aux tentatives d’introduction d’auxiliaires dentaires,dans l’Acte des Dentistes de 1957.

Ce n’est qu’en 1959, avec l’ouverture d’une école au New Cross Hospital qu’il y eut quelques progrès. On forma 60 thérapeutes par an, qui allaient ensuite apporter une réelle contribution au Service Dentaire Scolaire. Cependant, même à ce moment-là, le travail des thérapeutes se limita aux extractions des dents de lait, et c’est une décision politique qui écarta l’École du New Cross des autres écoles dentaires existantes. L’emploi de thérapeutes dentaires semblait s’être limité au Sud-Est de l’Angleterre. Des auxiliaires furent introduites en Grande-Bretagne, mais ce ne fut qu’une vague imitation du système qui existait en Nouvelle Zélande. (17) Malgré leur remarquable contribution au Service Dentaire Scolaire de la Santé Publique, les thérapistes dentaires furent employées d’une façon très limitée au Royaume-Uni.

La question la plus intéressante est de savoir pourquoi il y a eu tant d’opposition à l’emploi des auxiliaires dentaires. Plusieurs raisons ont été invoquées. On a invoqué, par exemple, à partir de la littérature sociologique sur la professionnalisation, que les dentistes avaient un monopole professionnel et qu’ils étaient déterminés à limiter tout accès à la profession. Les auxiliaires dentaires représentaient une menace sérieuse pour leurs revenus et leur niveau de vie ; ils n’étaient pas prêts à leur concéder le contrôle de leurs patients. On soutint que les  » dental dressers  » feraient baisser le niveau de qualité des soins – ils représentaient une sorte d’exercice de qualité inférieure et leur élimination a été vu comme représentant un progrès social. (18) Au cours de cette période, l’accès aux soins a également été vu par le législateur comme étant une priorité de bien moindre importante.

Conclusion

La nature cyclique de ces discussions indique la valeur d’une approche historique au sein de l’histoire de l’art dentaire. Comme dans les années cinquante, l’intérêt se porta sur un mélange potentiel dans le domaine de l’art dentaire du fait de la raréfaction de l’emploi. Les difficultés de plus en plus importantes pour la population de trouver un dentiste du National Health Service a soulevé des craintes au sujet de l’accès aux soins, et il est clair que des différences géographiques et sociales subsistent. Aujourd’hui, comme autrefois, d’autres pays ont proposé un modèle différent, en particulier dans les régions rurales isolées et dans les pays développés où les problèmes de logistique associés aux faibles ressources ont poussé ceux qui assurent les soins à innover à la fois en personnel et en matériaux. Les dentistes restent concernés par la nécessité de déléguer certaines tâches aux Professionnels Complémentaires à l’Art Dentaire, jusqu’à ce qu’on ait prouvé de manière scientifique que ces derniers sont capables de travailler aussi bien que les premiers. Ainsi les ‘dental dressers’ du Derbyshire et les assistantes dentaires scolaires de la Nouvelle Zélande continuent d’être tout à fait d’à propos pour les législateurs actuels.

Cependant, quoiqu’il y ait une importante continuité dans cette histoire, il est aussi très clair qu’au Royaume-Uni, le contexte de la loi est actuellement bien différent de celui d’il y a cinquante ans. En premier lieu, le Gouvernement semble s’être davantage engagé à surmonter les obstacles liés à l’accès aux soins bucco-dentaires et à se préoccuper de l’inégalité dans le domaine de la santé. Deuxièmement, l’Association Dentaire Britannique reconnaît la valeur potentielle de la contribution d’une équipe dentaire plus large, et a eudans tous les cas une influence moins directe sur l’évolution de la loi. Troisièmement, une augmentation de la qualité des soins bucco-dentaires de la population en général, signifie qu’une grande partie des travaux dentaires peut être considéré comme un service routinier. Finalement, les Professionnels Complémentaires à l’Art Dentaire sont mieux organisés qu’autrefois et ont une idée plus précise de leur identité professionnelle. Il reste à savoir si ces facteurs pourront assurer que le partage des compétences devienne finalement une réalité. La valeur d’une histoire sociale de l’art dentaire est cependant indéniable.

Références

1 Fundamental Review of Dental Remuneration: Report of Sir Kenneth Bloomfield KCB (London, 1992), 45-6, para. 9.6.
2 Department of Health, Modernising NHS Dentistry-Implementing the NHS Plan (London, 2000) pp. 37-8, 48. John Galloway and Jean Gorham, ‘Improving Access to NHS Dentistry? Professionals Complementary to Dentistry: A Consultation Paper by the General Dental Council’, Community Dental Health, 15 (1998), 129-31.
3 Nuffield Foundation, Education and Training of Personnel Auxiliary to Dentistry (London, 1993), 38-88.
4 Fit for the Future: Report of the Committee on Child Health Services, Volume 1 (London, 1976), pp. 197-218.
5 Royal Commission on the National Health Service: Chairman: Sir Alec Merrison, Cmnd 7615 (London, 1979), pp. 101-24. See also Charles Webster, The National Health Service: A Political History (Oxford, 1998), pp. 128-9, 158.
6 J. Llewellyn-Saunders, The New Zealand School Dental Service, 1920-1960 (Wellington, 1964); Jay W. Friedman, ‘The New Zealand School Dental Service: Lesson in Radical Conservatism’, Journal of the American Dental Association, 85 (1972), 609-17; Derek A. Dow, Safeguarding the Public Health: A History of the New Zealand Department of Health (Wellington, 1995), pp. 106-7, 126, 163-4, 172, 192, 208, 238, 240.
7 Linda Bryder, ‘A New World? Two Hundred Years of Public Health in Australia and New Zealand’, in Dorothy Porter (ed), The History of Public Health and the Modern State (Amsterdam, 1994), pp. 313-34; Linda Bryder and Derek A. Dow (eds.), New Countries and Old Medicine: Proceedings of an International Conference on the History of Medicine and Health, Auckland, New Zealand, 1994 (Auckland, 1995).
8 Voir par exemple, Edgar Henry Wilkins, The Medical Inspection of School Children (London, 1952).
9 Allen O. Gruebbel, ‘Report on the Study of Dental Public Health Services in New Zealand, I-III’, Journal of the American Dental Association, 41 (1950), 275-83, 422-36, 574-89.
10 John T. Fulton, Experiment in Dental Care: Results of New Zealand’s Use of School Dental Nurses (Geneva, 1951).
11 Ministry of Health, Department of Health for Scotland, Ministry of Education, New Zealand School Dental Nurses: Report of United Kingdom Dental Mission (London, 1950). See also ‘Report of the United Kingdom Dental Mission on New Zealand School Dental Nurses’, New Zealand Dental Journal, 47 (1961), 62-78.
12 A. T. Wynne, ‘Some Aspects of School Dentistry in New Zealand and the USA’, British Dental Journal (1951), 11-17.
13 Peter Davis, ‘Culture, Inequality and the Pattern of Dental Care in New Zealand’, Social Science and Medicine, 15A (1981), 801-5.
14 Nuffield Foundation, Education and Training, p. 38.
15 C. N. Johnson, ‘The Possibilities of Professional Service Through Co-operation Between the Dentist and his Assistant’, Journal of the American Dental Association (1925), 44-8.
16 Nuffield Foundation, Education and Training, pp. 51-2.
17 Ibid., p. 60.
18 G. V. Larkin, ‘Professionalism, Dentistry and Public Health’, Social Science and Medicine, 14A (1980), 223-9.