Livre II
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Puisque ce muscle se présente ainsi, les deux parties - celle du début qui est proximale du muscle adducteur du bras sur la poitrine, et celle qui est à la base de la scapula-, sont toutes deux plus proéminentes et sont situées au-dessus de la partie du début qui provient du sommet de l'épaule [acromion], comme si cette partie ressemblait au sommet très obtus d'un triangle. Vous formerez ce triangle en joignant les deux côtés très courts au long côté ; ils formeront alors un angle obtus, auquel les Anciens avaient comparé la forme de l'origine de ce muscle. Ses fibres diffèrent les unes des autres uniquement dans le fait que les fibres antérieures, qui appartiennent à la clavicule, sont dirigées en diagonale en bas et en arrière, alors que les fibres postérieures qui dépendent de l'épine de la scapula, descendent en diagonale en avant. Celles originaires de l'acromion et de son articulation avec la clavicule s'avancent verticalement en bas, mais elles ne se coupent cependant pas de la même façon que celles du muscle adducteur du bras sur la poitrine, même si à cause de certaines lignes dirigées en diagonale, les fibres semblent momentanément se mêler. Aussi, si la partie du muscle originaire de la clavicule était tendue, le bras serait porté en haut vers l'avant du cou et vers la face. Mais si les fibres tirant leur origine de l'acromion et de la région de la clavicule qui lui attachée se contractaient, le bras serait levé verticalement sans aucune inclinaison. Et si la partie postérieure du muscle provenant de l'épine de la scapula était contractée, le bras serait mû vers l'arrière de la nuque et vers l'occiput lui-même[325]. Donc les débuts de ce muscle ne sont pas originaires de toute la surface des os que nous venons de mentionner, mais seulement de leur partie la plus proéminente comme d'une ligne assez épaisse, aussi l'épaisseur de l'origine de ce muscle est très faible aussi. Et il ne faut pas négliger le fait qu'en-dehors de ce muscle, aucun autre ne donne au bras ce mouvement qui lui est propre, et que le bras possédant ce muscle n'a besoin d'aucun autre muscle pour accomplir la même fonction. Je ne suis pas sans ignorer que Galien décrit plusieurs muscles à cet endroit, mais il n'est pas constant avec lui-même dans le treizième livre de l' Utilité des parties et dans le cinquième livre des Procédures anatomiques, et si je devais commenter tous ces passages, le présent chapitre aurait une prolixité excessive. C'est pourquoi j'exhorte avec énergie quiconque étudie l'anatomie et la doctrine de Galien (que nous devons tous embrasser), à ne pas hésiter à comparer nos propos avec la leçon de Galien, en observant toujours très soigneusement aussi la dissection que je commenterai rapidement en lieu opportun; je l'exhorte aussi à consentir que j'ajoute un point, à savoir que l'apparence de ce muscle élevant le bras chez le cercopithèque est tout-à-fait semblable à celui chez l'homme. En effet, pour l'amour de Galien, j'ai soigneusement examiné ce muscle chez ces animaux[326]. Mais les chiens, les chevaux et les bovins diffèrent beaucoup de l'homme dans la structure de cette articulation, non seulement dans les os mais surtout dans les muscles et les ligaments.Le troisième muscle moteur du bras Le musclepp S dans planche XIII ; M dans planche VII ; K dans planche VIII ; N dans planche IX ; R dans planche X ; L dans planche XI ; R dans planche XII
q Δ dans les planches III et IV
portant le bras horizontalement vers le rachis[327]accomplit une action opposée à celle de ce muscle [m. grand pectoral]q qui, lorsque toutes ses fibres sont contractées, est adducteur du bras sur la poitrine ou vers l'avant. Ce muscle ci est également charnu et épais, et complètement rond par rapport à tous les autres muscles de cette articulation. Son début est charnu et est originaire de l'angle inférieurrr Y dans les fig. 1, 2, 3, chap. 12, livre I. La région d'où provient le muscle est marquée p dans la fig. 1 et T dans la fig. 2 de la base de la scapula, prenant une petite partie de son début de cette base, mais une plus grande partie du côté inférieur de la scapula ; son début continu et charnu est originaire du milieu de ce côté, qui est proximal de la base de la scapula, et de la partie externe ou convexe de l'angle inférieur de la base. Ce muscle quitte l'os de la scapula à la moitié de ce côté inférieur, s'étend quelque peu vers le haut et en avant jusqu'à accéder à l'humérus ou os du bras, où il se termine en un tendon solide et court, mais large, ressemblant par sa forme au tendonss Q, T dans le muscle marqué Δ , planche IV que le muscle adducteur du bras sur la poitrine insère sur l'humérus. Le tendon du muscle en question ressemble non seulement par la forme (c'est-à-dire par la largeur, l'épaisseur et l'insertion sur la surface de l'humérus) au tendontt O, planche VII
u Θ , planche X
du muscleu adducteur du bras sur la poitrine, mais les deux muscles s'insèrent à peu près dans la même région, laissant entre eux un espace dans lequel s'insère le tendon du muscle que je vais décrire dans peu de temps comme étant le muscle dirigeant le bras vers le bas vers le rachis [m. grand dorsal], vers les os des hanches. Cependant le tendon du muscle originaire du côté inférieur de la scapula s'implante un peu plus près de la tête de l'humérus que celui du muscle dont nous avons dit qu'il porte le bras sur la poitrine[328]. Et à nouveau, il ne m'échappe pas ici que Galien a compté à tort ce muscle parmi ceux qui donnent un mouvement de rotation au bras et qu'il a placé le muscle triangulairexx Γ , planche XI occupant la partie convexe de la scapula, et qui pour moi doit être placé dans la catégorie des muscles donnant un mouvement de rotation au bras, parmi les muscles moteurs du bras vers le rachis.Livre 13 de l' Utilité des parties et Livre 5 des Procédures anatomiques En fait, lorsqu'une chose me paraît différente, je m'éloigne délibérément de l'enseignement de Galien[329], comme vous le ferez certainement aussi, lorsque vous étant débarrassés de toute dévotion et bien avertis, vous entreprendrez une dissection ou vous assisterez à des dissections correctement faites. Car je ne voudrais pas qu'on me fasse ici confiance d'après un livre, puisque je ne cesse d'affirmer qu'il ne faut pas avoir confiance dans les livres sur des points qui n'ont pas encore été vus par la dissection.Le quatrième muscle moteur du bras Le bras est tiré vers le bas par un grand et très large muscleyy Γ dans planche II ; Θ planche X ; N planche I ; V planche III ; m planche IV ; O planche VII et IX, c planche XI
a De S à T, planche X
[m. grand dorsal], originaire des sommets des épines [épines vertébrales], depuis l'épine de la sixième vertèbre cervicale jusqu'au milieua du sacrum ; il n'a pas un début épais comme la plupart des muscles moteurs du bras, mais il est fin et continu, comme une large membrane, originaire des épines sus mentionnées et se dirigeant selon un axe rectiligne.

×Assez fine description des trois parties de ce muscle volumineux et des mouvements attachés à chacune d'elles.
×Sous des dehors respectueux de l'autorité ancienne, le procédé permet à Vésale de substituer à l'enseignement de Galien une autorité nouvelle, la sienne, fondée sur l'expérience et la pratique anatomiques.
×Nous avions identifié ce muscle probablement comme le muscle grand rond dont l'insertion scapulaire est plus basse que le muscle petit rond, non décrit par Vésale qui l'a peut-être attaché au muscle infra-épineux, dans notre édition de l'Epitome (p. 122 note 51). Aussi bien l'état des connaissances à l'époque de Vésale que les procédés qu'il a utilisés ne permettent pas toujours d'établir une correspondance parfaite avec ce que nous connaissons du corps aujourd'hui. Garrison et Hast, op. cit, I p. 533, assurent qu'il s'agit du grand rond (teres major), mais commentent en note l'action des muscles épineux chez Galien.
×L'absence de nomenclature est ici compensée par la répétition de l'action exercée par le muscle, mais allonge considérablement le texte descriptif.
×La phrase est subversive et peut être lue comme un appel à secouer le poids des autorités anciennes, à fonder une nouvelle autorité sur le témoignage des sens et du raisonnement. Cf. note 326.