Les Œuvres complètes
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Vésale aurait trouvé un rude adversaire si Eustachi avait publié le texte explicatif des quarante-six planches promises pendant que Vésale vivait ; dans le livre où il traite des Dissensions et controverses entre anatomistes (De dissensionibus ac controversiis anatomicis), il reconnaît les mérites de Vésale, mais condamne son emportement dans ses attaques contre Galien. Vésale semble désigner Eustachi lorsqu’il dit que ceux qui font des affirmations tout en étant plus enclins à suivre les opinions des autorités que la vérité des faits, disent des balivernes et qu’ils interprètent la pensée de Galien d’une autre manière que lui lorsqu’ils prétendent qu’il refuse de voir des foramina dans l’os cunéiforme.

De même que beaucoup se sont inspirés des textes du grand Vésale pour écrire leurs ouvrages d'antomie, de même beaucoup ont plagié ses Tables, de son vivant, en différents lieux et en des temps divers, non sans réduire honteusement leur format et porter tort à leur élégante beauté. Il semble que cela ait fait plus souffrir Vésale que les invectives les plus acérées de ses adversaires. Un imprimeur, Geminus, qui avait vécu avec lui, fit des résumés de ses livres, sans réaliser aucune dissection, à l'exemple d’autres, au grand dam de l’art. Ensuite il alla en Angleterre où il copia les figures de l’Epitome de manière peu intelligible, sans talent, mais à grands frais ; et Vésale eut honte que l’on pût imaginer qu’elles avaient été faites par lui : il se plaint en effet que les trajets des vaisseaux, dessinés par lui-même au prix de grands efforts, aient été corrompus au point qu’il ne pouvait plus voir un seul témoignage de ses propres efforts et que le format de ces planches avait été honteusement réduit sans préserver une seule proportion. Il déclare alors ouvertement qu’il préfère, avec la perte de sa propriété, donner ses figures et toutes autres choses gratuitement à n’importe quel imprimeur plutôt que ce qui avait été réalisé par un travail de spécialiste soit honteusement détérioré[70]. Il se plaint, par considération et appréhension de telles gens, qui résument des textes sans rien connaître de la dissection, de devoir être bref, mais il affirme que dans la deuxième seconde édition il pourrait ajouter beaucoup de choses, et des plus utiles.

Voilà donc, lecteur, les points essentiels que nous avons pensé devoir vous présenter au début de l’ouvrage. Nous avons retracé la vie de l’auteur, essentiellement d’après ses propres ouvrages, et d’après de Thou, Zwinger, Riolan, Pierre Castellan, Jean Schenk, Melchior Adam, van der Linden, Merklin, Platter.

À Leyde, le 1er novembre 1725.

×Ces dernières informations, revenant sur les plagiats dont Vésale fut victime, tirées de la « Lettre à Oporinus » semblent un codicille tardif.