Le 16 octobre 1659, on avait déchiré un ordre du roi en plein hôtel de ville de Marseille, insolence sans précédent, si indocile qu’eût pu être cette cité. Les troupes royales avaient occupé Marseille le 20 janvier 1660 ; le 11 février, on y posait la première pierre de la citadelle Saint-Nicolas ; le 2 mars, Louis xiv pénétrait dans la ville par la brèche (R. et S. Pillorget).
Relation véritable, contenant ce qui s’est passé à Marseille en exécution des ordres du roi. Ensemble l’arrêt rendu par la Chambre de justice établie par Sa Majesté contre les séditieux et rebelles, et l’entrée de leurs Majestés en ladite ville par la brèche (sans lieu ni nom, ni date, in‑4o de 3 pages) :
« Quoique les rois ne puissent pratiquer une vertu plus digne d’eux que la clémence, il y a des occasions où ils ne sauraient négliger l’usage de la justice sans hasarder le repos de leurs sujets. Cette considération a obligé le meilleur monarque du monde à l’employer pour la tranquillité de Marseille qui depuis longtemps se trouvait troublée par quelques factieux, dont il n’y en a toujours que trop grand nombre dans les États les plus heureux et les plus florissants. Ayant donc résolu de faire construire une citadelle pour retenir désormais les esprits turbulents dans leur devoir, l’onzième du mois de février, le duc de Mercœur, {a} assisté des sieurs de Fourille et Pradel, du chevalier de Maupeou et de tous les officiers du régiment des gardes qui sont en garnison dans cette ville-là, comme aussi du chevalier de Clerville, commis par le roi à l’intendance des fortifications de Provence, en posa la première pierre au bruit de tout le canon, tant de la ville que des vaisseaux et des galères qui étaient dans le port, et qui firent leurs salves après celles de deux bataillons des gardes françaises et suisses postés à l’endroit où l’on construit cette forteresse. Mais comme il ne suffit pas de se précautionner contre l’avenir et qu’il fallait venger les insultes faites aux bons et véritables sujets de Sa Majesté, et même à la dignité des lois et au respect du souverain, elle établit au même lieu une Chambre de justice pour faire procès aux principaux auteurs des divisions passées. À quoi ayant incessamment travaillé, elle a rendu arrêt […].
Après l’exécution de ce jugement, Leurs Majestés étant parties d’Aix le 2e de mars, arrivèrent le même jour en la ville de Marseille et y entrèrent par une brèche d’environ deux toises faite proche de la porte royale. Le duc de Mercœur et toute la noblesse les furent recevoir, et le sieur de Pilles fit harangue au roi et lui présenta les clefs qui lui furent en même temps remises, et avec grande acclamation du peuple et réjouissances publiques, Elles furent conduites aux maisons qui leur étaient préparées, et à la clarté d’un nombre infini de lumières, flambeaux et feux de tous côtés ; et le lendemain, les Corps rendirent leurs soumissions, et ensuite Sa Majesté visita la citadelle composée de quatre bastions déjà fort avancés. »
- Gouverneur de Provence.
La Grande Mademoiselle ne prisa guère son séjour à Marseille (Mlle de Montpensier, Mémoires, deuxième partie, chapitre ii, pages 433) :
« Pendant que l’on y était, il y avait des corps de garde de cavalerie et d’infanterie dans toutes les places, comme en une ville de guerre. On y demeura trois ou quatre jours, mais j’en fus deux dans mon lit avec la migraine. Je trouvais si pitoyable de voir ces galériens enchaînés dans les rues aller et venir. Cela me paraissait effroyable. L’on se promena un jour sur le port où on avait encore ces objets-là continuellement devant les yeux. Il y avait force vaisseaux et quelques galères, mais elles n’étaient pas toutes armées. Il y avait des boutiques le long du port, où je ne trouvai rien de si beau et de si rare que j’avais entendu dire que l’on trouvait. »
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