Texte : Jean Pecquet
Experimenta nova anatomica (1651)
Chapitre vi, note 1.
Note [1]

Jean Pecquet a ignoré la description du canal thoracique chez le cheval qu’a donnée Bartolomeo Eustachi (vers 1500-1574), professeur de médecine et d’anatomie à La Sapienza de Rome. Elle figure dans l’un de ses Opuscula anatomica [opuscules anatomiques], intitulé De Vena quæ Αζυγος Græcis dicitur [Sur la veine que les Grecs appellent Azygos], {a} Antigramma xiii, page 301 : {b}

Itaque in illis animantibus, ab hoc ipso insigni trunco sinistro iuguli, qua posterior sedes radicis venæ internæ jugularis spectat ; magna quædam propago germinat ; quæ præterquam quod in eius origine hostiolum semicirculare habet ; est etiam alba, et aquei humoris plena ; nec longe ab ortu duas partes scinditur ; paulo post rursus coeuntes in unam ; quæ nullos ramos diffundens, juxta sinistrum vertebrarum latus, penetrato septo transverso, deorsum ad medium usque lumborum fertur : quo loco latior effecta, magnamque arteriam circumplex, obscurissimum finem, mihique adhuc non bene perceptum, obtinet.

[Chez ces animaux, depuis ledit tronc remarquable qui est à gauche de la gorge, derrière lequel siège la racine de la veine jugulaire interne, {c} naît une grande branche : elle s’y abouche par un petit orifice semi-circulaire et est remplie d’une humeur blanche et aqueuse ; peu après son origine, elle se divise en deux pour se réunir à nouveau un peu plus bas ; sans émettre de rameaux, elle descend sur le flanc gauche des vertèbres ; puis après avoir traversé le diaphragme, elle se continue vers l’arrière jusqu’au milieu des lombes, où, après s’être élargie et épanouie autour de l’aorte, elle se termine d’une manière fort obscure, que je ne suis pas encore parvenu à bien discerner]. {d}


  1. Grande veine azygos, v. note [2], Historia anatomica, chapitre xi.

  2. Venise, Vincentius Luchinus, 1563, in‑4o.

  3. L’anatomie moderne du cheval ne lui reconnaît qu’une veine jugulaire externe ; elle s’unit à l’axillaire pour former le « tronc remarquable » dont parlait Eustachi.

  4. Eustachi a bien décrit l’anatomie et le contenu particulier du canal thoracique unique du cheval, mais sans percevoir son rôle exact dans le transport du chyle (dont il connaissait l’existence) depuis le mésentère jusqu’aux veines du cou.

Thomas Wharton a été le premier à exhumer ce texte dans son Adenographia, {a} paragraphe intitulé Ductus Eustachii [Canal d’Eustachi], chapitre xvii, pages 116‑118 :

Hic mihi in mentem venit thoracici ductûs chyliferi descrpitio, centum ferè ab hinc annis observati et evulgati à celeberrimo Anatomico D. Bartholomeo Eustachio libro de venâ sine pari, Venetiis, anno 1564. edito. Quem locum mihi primus indicavit Collega noster ornatis. D. Ent. Quia verò liber ipse rariùs occurrit venalis, et quòd haud facilè quis credat hujus vasis inventionem tantæ esse antiquitatis, verba authoris hùc transcriber lubet.

 […]Patet, authorem vidisse et hìc descripsisse ductum ipsum chyliferum.

[Ici me vient à l’esprit la description du canal thoracique, que le très célèbre anatomiste Bartolomeo Eustachi a observé et publié voilà presque cent ans dans son livre sur la veine azygos, paru à Venise en 1564. {b} Mon très brillant collègue M. Ent {c} a été le premier à me le signaler. Étant donné que ce livre s’offre très rarement à la vente, et que chacune aura du mal à croire que cette découverte est si ancienne, je prends la liberté de transcrire le propos de son auteur. {d}

(…) Il est clair que l’auteur a vu et ici décrit le canal chylifère proprement dit].


  1. Londres, 1656, vnote Patin 17/1111.

  2. L’anatomiste anglais George Ent, v. note [1], Trois lettres de William Harvey sur le chyle.

  3. Sic pour 1563.

  4. Suit la transcription fidèle du passage d’Eustachi.

  5. Dans le chapitre xiii sur le pancréas, page 74, Wharton s’est prononcé sans ambiguïté sur la fonction de ce qu’il appellait le « canal d’Eustachi » :

    Revera autem, nec hepar, nec lien, neque pancreas sanguificationis muneri præsunt. Lacteæ enim thoracicæ satìs evincunt, in illis sanguificationem non perfici ; neque chylum ad easdem transmitti ; sed ad venas subclavias.

    [En vérité pourtant, ni le foie, ni la rate, ni le pancréas ne président à la charge de sanguification : les lactifères thoraciques en dépossèdent assez clairement ces organes ; le chyle ne leur est pas transmis, mais l’est aux subclavières].

    Un paragraphe du chapitre xv (page 99‑100) est intitulé Lacteum succum ad nullas partes deferri antequam ad cor perveniat [Le suc laiteux n’est transporté dans aucune partie du corps avant d’être parvenu au foie]. Toutefois, la sanguification cardiaque n’est pas explicitement reconnue, le chyle se mélange directement au sang pour l’enrichir (page 100) ;

    Non dubium est, quin in corde et arteriis cum vitali sanguine commixta, aliquam alterationem, et, ut ita dicam, meliorationem, sive exaltationem, priusquam inde in alias partes derivetur, acquirat.

    [Il n’est pas douteux que, mêlé au sang vital dans le cœur et les artères, il n’y soit soumis à quelque altération et, dirai-je, quelque amélioration ou exaltation, avant d’atteindre les autres parties du corps].


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Jean Pecquet et la Tempête du chyle (1651-1655), édité par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Texte : Jean Pecquet
Experimenta nova anatomica (1651)
Chapitre vi, note 1.

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(Consulté le 14/06/2024)

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