Texte : Jean ii Riolan
Première Responsio (1652) aux
Experimenta nova anatomica
de Jean Pecquet (1651).
6. Sur la circulation du sang, note 12.
Note [12]

Lu hors de son contexte, ce propos fait aujourd’hui dresser les cheveux sur la tête, mais il mérite d’être approfondi car Jean ii Riolan ne parlait pas à la légère. Il a longuement défendu ses idées sur la circulation fœtale dans le chapitre viii, De vitali facultate, et admirabili structura vasorum cordis in fœtu [Sur la faculté vitale et l’admirable structure des vaisseaux du cœur chez le fœtus], livre vi, De fœtu humano [Sur le fœtus humain], de son Anthropographia. {a} Quatre passages éclairent utilement ce qu’il écrivait ici.

  1. Sur l’intérêt de la question (page 389) :

    Est enim res magni momenti ad humani generis conseruationem scire, An Cor in Fœutu propriâ vitali facultate sit præditum, et moueatur ? quæ ad Medicum, Iurisperitum et Theologorum pertinere videtur.

    Nam si Cor in Fœtu vitali facultate præditum moueatur, citra materni Cordis communionem ; per aliquod tempus potest viuere, quo temporis spatio extinctæ matri fœtus adhuc viuens, secto vtero eripi potest saluus et incolumis. Sic natum dicunt Æsculapium ex Matre Coronide. Sic natum Cæsarem secto matris Vtero. Sic Gorgiam Epirotam, Scipionem, Manlium, et alios in lucem prodiisse. Est enim inhumanum post obitum matris, fœtui pereunti et suffocari parato, auxiliares manus denegare, et sæpe vivuentem adhuc, cum matre mortua eodem tumulo contegere, et obruere. Idcirco Iurisconsulti eum necis reum damnant, qui grauidam sepelierit, non priùs extracto fœtu, quod spem animantis cum grauida peremisse videatur.

    Interest quoque Theologo scire, An Cor in Fœtu moueatur, vt extinctæ matri superstes, baptismi particeps fiat, et ad cælos rediens, in beatorum sedibus Dei conspectu fruatur, quia nunc Parisiis consueuimus in moribundis, atque etiam mortuis grauidis, si digito in sinum pudoris intruso, caput infantis hianti osculo matricis oppositum deprehendatur, aquâ benedictâ aspergere, vel digito intincto rigare, prolatis verbis baptismi, quem conferre, et administrare ridiculum foret, si mortuus esset infans.

    [Pour le médecin, le juriste et le théologien, une question de grande importance pour la conservation de l’espèce humaine me semble être de savoir Si le cœur du fœtus est doué d’une faculté vitale qui lui est propre et s’il bat.

    Si le cœur du fœtus, doué d’une faculté vitale, bat indépendamment de sa connexion avec la mère, il peut encore vivre quelque temps après qu’elle est morte, et une incision de l’utérus peut l’extraire sain et sauf. {b} On dit qu’Esculape est ainsi né de Coronis, sa mère, {c} et qu’une section de la matrice a permis à César, Gorgias l’Épirote, Scipion, Manlius {d} et autres de voir le jour. Il est en effet inhumain, après le décès de sa mère, de refuser du secours à un fœtus en train de succomber et sur le point de suffoquer ; souvent pourtant, il est enseveli avec elle, encore en vie et caché dans son sein. C’est pourquoi les juristes accusent de meurtre celui qui enterre une femme enceinte sans avoir extrait son enfant, parce qu’on le considère coupable, en agissant ainsi avec la mère, d’avoir détruit une espérance d’être vivant. {e}

    Il intéresse aussi le théologien de savoir Si le cœur du fœtus bat, afin que celui qui survit dans sa défunte mère reçoive le baptême et, remontant aux cieux, jouisse de la contemplation divine parmi les bienheureux : ainsi avons-nous aujourd’hui pour habitude, à Paris, chez les femmes enceintes moribondes, et même mortes, quand un doigt introduit dans le vagin perçoit la tête de son enfant appuyé au contact de l’orifice utérin, de l’asperger d’eau bénite, ou d’y tremper le doigt qui la touche, en prononçant les paroles du baptême ; mais l’administration de ce sacrement serait ridicule si l’enfant était mort].


    1. Dernière édition, Paris, 1649, v. supra note [4].

    2. Vnote Patin 7/159 pour la césarienne.

    3. V. note [4], lettre de Jacques Mentel.

    4. Un « brave et illustre » Gorgias l’Épirote (natif d’Épire) serait né par césarienne, au dire de Valère Maxime (vnote Patin 7/41), Faits et paroles mémorables, livre i, chapitre viii. Lucius Manlius Vulso Longus, consul romain du iiie s. av. J.‑C. s’est illustré durant la première guerre punique.

      V. notes Patin 18/34 pour Jules César, né en 100 av. J.‑C., et 4/561 pour Scipion l’Africain, né en 235 av. J.‑C.

    5. Digeste justinien (vnote Patin 22/224), livre xi, titre viii.

  2. Sur le dogme péripatéticien (page 391) :

    Quare cùm primum formatur Cor moueri incipit, ut docet Aristoteles, cap. 4. lib. de spiritu, quærens quænam ex tribus motionibus, respiratione, pulsu, et alimenti aduectione, siue nutritione præcedat, sic statuit. Quamuis attractionem menstrui humoris ad formationem fœtus sit necessaria, respiratio postrema succedat, pulsus tamen per initia statim in constitutione Cordis emergit : id quod in sectione viuorum, et pulli formatione ex ouo deprehendere licet, atque per actionem calidi in humidum, feruorem hunc, et pulsus agitationem cieri manifestum est. Quare Cordis primus erit motus. Id satis superque declarat motus arteriarum vmbilicalium, quæ cùm sint arteriis vterinis, nec contiguæ, nec continuatæ, vim tamen pulsatilem à Corde fœtus mutuantur. Quoniam motus Cordis, et arteriarum matris est improportionatus calori ipsius fœtus, ita ut idem rythmus ambobus nequaquam conuenire queat, siue alternatim cum Corde agitentur arteriæ, siue Cor et arteriæ in motu eundem seruent rythmum, eodem tempore per eandem motus speciem.

    [Puisqu’Aristote enseigne que le cœur commence à battre dès qu’il se forme, il se demande (livre du souffle, chapitre iv) {a} lequel de trois mouvements apparaît en premier : respiration, pouls et transport de l’aliment, ou nutrition. Il énonce que, bien que l’attraction de l’humeur menstruelle {b} soit nécessaire à la formation du fœtus, la respiration apparaît en dernier, mais le pouls s’établit dès le début, aussitôt qu’émerge la formation du cœur. C’est ce que permettent de voir la dissection des animaux vivants et le développement du poussin dans l’œuf, et ce sous l’impulsion manifeste de l’action du chaud sur l’humide, puis de l’ardeur résultante et de l’agitation du pouls. Le cœur est donc le premier à se mettre en mouvement. Cela est suffisamment et amplement démontré par le mouvement des artères ombilicales qui, puisqu’elles ne sont ni en contiguïté ni en continuité avec les artères utérines, empruntent leur battement au cœur du fœtus. Comme le mouvement du cœur et des artères de la mère n’est pas proportionné à la chaleur du dit fœtus, le même rythme ne peut en rien convenir à l’une et à l’autre : soit les artères battent alternativement avec le cœur de l’une et de l’autre ; soit le cœur et les artères en mouvement conservent le même rythme au même moment par la même espèce de mouvement]. {c}


    1. Première phrase du chapitre intitulé De tribus motionibus spiritus in arteria contenti [Des trois mouvements du souffle qui est contenu dans l’artère], 2e tome, pages 178‑179 des Aristotelis Opera omnia (Paris, Ægidius Morellus, 1639, in‑fo, bilingue grec et latin).

    2. La semence féminine (aujourd’hui l’ovule) : vnote Patin 1/8175.

    3. Ce charabia n’est pas dans Aristote, mais cherche à résoudre le fait que le cœur fœtal bat beaucoup plus rapidement que le cœur maternel.

  3. Avis de Riolan sur les deux communications ou « anastomoses » (foramen ovale et canal artériel) {a} qui caractérisent le cœur fœtal, et opinions de William Harvey et Galien (pages 392‑393) :

    Altera, quæ ab aorta cum vena arteriosa perficitur, ad nutritionem et vitalitatem pulmonis amplissimi visceris comparata est, qui cùm sit ex tenui et spumoso sangine concretus, eodem reficiendus erat : propterea scriptum ab Hippocrate, pulmonem contrarium alimentum trahere, reliqua membra simile. Altera anastomosis venæ cauæ cum arteria uenosa ad ditributionem sanguinis venosi, cùm non possit iungi venæ areriosæ, propter interiectam aortam, constructa est, vt sanguis effusus in sinistrum Cordis ventriculum, vitalis fiat, et in aortam refundatur. Itaque cùm sanguis venosus et arteriosus à Corde suppeditari non posset ad procreationem pulmonum, quia Cor primis conceptionis mensibus solidum est, sensim excauatur, spiritu insito ibi concluso, et parenchyma distendente. Idcirco natura per alia diverticula, nempe per illas anastomoses, sanguinem venosum et arteriosum deduxit. Venam arteriosam aortæ coniunxit, arteriam venosam venæ cauæ copulauit, propter vasorum contiguitatem, quia semper venæ arteria comes adiungitus, atque ista vasa Cordis sunt alternatim disposita, vt venæ cauæ et venæ arteriosæ sit interposita aorta : Inter venam arteriosam et venam cauam, arteria venosa media consistat. Vbi verò Cor excauatum est, et in duos sinus discretum, tum suscipit sanguinem, et eo modo distribuit quo in adultis.

    Doctissimus Medicus et Anatomicus Harueus, admittit quidem Cor in fœtu moueri, sed ex illo fundamento quod verum esse statuit, scilicet in infantibus in lucem editis sanguinem per pulmones traduci, anastomoses vasorum Cordis in fœtu factas fuisse iudicat, ob defectum respirationis, et pulmonis immobilitatem. Ideoque sanguis cùm è dextro Cordis ventriculo expulsus, nequeat permeare pulmonis parenchyma densum et immobile, in sinistrum Cordis ventriculum defertur, per anastomosim venæ cauæ cum arteria venosa. Altera portio sanguinis è caua transmissi in dextrum Cordis ventriculum, per alteram anastomosim venæ arteriosæ cum aorta labitur in aortam, atque ita sanguis in vtrumque ventriculum Cordis, tunc temporis peræque capacem et amplum æqualiter recipitur, vt amborum ventriculorum æqualis sit actio.

    Vt autem omnis dubitandi occasio rescindatur, Galeni dissentientes locos super ea quæstione componere oportet. Scribit lib. de format. Fœtus, ipsum Fœtum in principio suæ generationis, neque arteriarum, neque pulsuum, neque Cerebri, aut Cordis vtilitate indigere, quod plantæ more viuat. Is verum est, donec Fœtus suæ perfectionis motus edere incipiat : Nam, ut ipse ait, lib. 7 de usu partium, cap. 12. Cor non tantùm in perfectis, sed etiam in Fœtibus suppeditat arteriis vim quâ mouentur. Id quotidie obstetrices deprehendunt in ligatis vasis vmbilicalibus.

    [La première, qui s’établit, entre l’aorte et la veine artérieuse, {b} pourvoit à la nutrition et à la vitalité du poumon, viscère de très vastes dimensions qui, bien qu’étant un agrégat compact de sang délié et spumeux, doit être alimenté par du sang : c’est pourquoi Hippocrate a écrit que le poumon attire un aliment qui lui est contraire, quand les autres organes attirent un aliment qui leur est semblable. {c} La seconde anastomose, entre la veine cave et la veine artérieuse, {d} est établie pour distribuer le sang veineux, puisqu’il ne peut atteindre la veine artérieuse, étant donné l’interposition de l’aorte, {e} de manière que le sang parvenant dans le ventricule gauche du cœur devienne vital et s’écoule dans l’aorte. Le cœur ne peut pas délivrer aux poumons le sang artériel et veineux nécessaire à leur développement, parce que le cœur est un organe plein pendant les premiers mois qui suivent la conception, dont les cavités ne se forment que petit à petit, sous l’effet de l’esprit qui y est enfermé et de la distension du parenchyme. {f} La nature a donc fait passer le sang veineux et artériel par d’autres voies, qui sont ces deux anastomoses : elle a joint la veine artérieuse à l’aorte {b} et soudé l’artère veineuse à la veine cave, {d} étant donné leurs contiguïtés, parce qu’une artère est toujours assortie d’une veine, et que ces vaisseaux du cœur ont une disposition croisée, avec l’aorte placée entre la veine cave et la veine artérieuse : l’artère veineuse siège au milieu, entre la veine artérieuse et la veine cave. {g} Le cœur reçoit le sang quand ses cavités se sont vraiment creusées et forment deux sinus distincts, et il distribue alors le sang comme il fait chez l’adulte. {h}

    Harvey, très savant médecin et anatomiste, admet certes que le cœur bat chez le fœtus, mais en partant de ce fondement exact, il déclare que chez les nouveau-nés le sang passe à travers les poumons, jugeant que les anastomoses des vaisseaux cardiaques fœtaux s’expliquent par l’absence de respiration et par l’immobilité des poumons. Ne pouvant pénétrer dans le parenchyme pulmonaire qui est compact et immobile, le sang qui sort du ventricule droit gagne le ventricule gauche par l’anastomose de la veine cave avec la veine artérieuse. {d} Une autre partie du sang que la veine cave envoie dans le ventricule droit emprunte la seconde anastomose, entre la veine artérieuse et l’aorte, {b} pour s’écouler dans l’aorte. Ainsi les deux ventricules, dont les capacités sont égales, reçoivent-ils au même moment une égale quantité de sang et exercent-ils une action identique.

    Néanmoins, pour couper court à toute occasion de douter, il faut mettre en accord les passages où Galien s’est contredit sur cette question. Dans son livre sur la Formation du fœtus, il écrit qu’au début de son développement le fœtus n’a besoin ni d’artères, ni de pouls, ni de cerveau, ni de cœur, parce qu’il mène la vie d’une plante. {i} Cela est vrai jusqu’au moment où le fœtus commence à engager le mouvement qui le mène à sa perfection, car, dit-il lui-même, au chapitre xii, livre vii sur l’Utilité des parties du corps, le cœur procure aux artères la force qui les fait battre, et ce non seulement chez les individus entièrement développés, mais aussi chez les fœtus : {j} et c’est ce que les sages-femmes constatent tous les jours, quand elles lient les vaisseaux ombilicaux].


    1. V. note [3], Dissertatio anatomica, chapitre iv.

    2. Canal artériel joignant l’artère pulmonaire à l’aorte.

    3. Hippocrate, traité De l’aliment, § 29, Littré Hip, volume 9, page 109 :

      « Le poumon attire un aliment d’un genre autre que le corps ; toutes les autres parties attirent un aliment de même genre que le corps. »

      L’obscurité de ce paragraphe a incité Émile Littré à le sous-titrer Opposition entre l’aliment ou air que le poumon attire et l’aliment proprement dit qu’attirent les autres parties et à y ajouter une note :

      « Galien entend ceci de l’artère pulmonaire, qui apporte au poumon un aliment autre que l’aliment qui va aux autres parties ; mais cette explication me paraît erronée car, dans la phrase suivante, l’auteur dit expressément que cet aliment du poumon est le souffle ou air ; il dit aussi expressément que le souffle est aliment. »

    4. Trou de Botal ou foramen ovale, entre les oreillettes droite et gauche.

    5. Passage incompréhensible en dépit d’une transcription et d’une traduction fidèles : ce n’est pas l’aorte, mais la cloison interatriale qui barre le passage entre la veine cave (oreillette droite) et la veine artérieuse (oreillette gauche).

    6. Ainsi s’explique la prétendue inexistence du ventricule droit avant quatre mois (perception des mouvements fœtaux par la mère) dont Riolan accablait ici Pecquet.

    7. Torsion du pédicule cardiaque : l’aorte sort du cœur à droite de l’artère pulmonaire (« veine artérieuse »), pour passer entre cette artère et l’oreillette droite (« veine cave »), avant d’obliquer à gauche (crosse de l’aorte) ; mais l’oreillette gauche (« artère veineuse ») n’occupe pas une position exactement médiane entre l’artère pulmonaire et l’oreillette droite.

    8. Riolan se trompait : la circulation adulte ne s’établit qu’à la naissance, avec le premier cri de l’enfant, comme le pensaient William Harvey (dont l’avis suit) et Jean Pecquet (v. note [3], Dissertatio anatomica, chapitre iv).

    9. Loc. cit., Kühn, volume 4, page 665, avec une traduction latine différente, mais de même sens (sans le cerveau) :

      […] fœtum neque arteriarum, neque pulsuum, neque cordis ullo necessario usu in principio generationis, quemqdmodum nec stirpes, indigere.

    10. La référence fournie par Riolan est inexacte. Il s’agit de l’un des trois faits sur le mouvement du sang que Galien déclare prouver dans le chapitre xxi, livre vi sur l’Utilité des parties (traduction de Daremberg, 1854, volume 1, pages 454‑455) :

      « Les artères ne se dilatent que parce qu’elles se remplissent du pneuma {i} fourni par le cœur ; à chaque dilatation elles attirent quelque chose des veines ; enfin, chez les embryons, il est nécessaire, comme l’artère veineuse tire du sang de la veine cave, {ii} que le cœur, en se dilatant, fasse pénétrer dans la cavité {iii} gauche une quantité de sang assez considérable, lequel ne trouve pas d’obstacle dans les épiphyses membraneuses {iv} qui sont dirigées de dehors en dedans. Ainsi, l’on voit clairement que le cœur communique cette faculté d’impulsion aux artères non seulement chez les animaux déjà parfaits, mais encore aux fœtus. » {v}

      1. Esprit vital, air souffle.

      2. Passage du sang par le trou de Botal.

      3. Ventricule.

      4. Valves mitrale et aortique.

      5. Conclusion reprise par Riolan.

  4. Conclusion de Riolan après avoir exposé six objections (page 394) :

    Itaque de vsu anastomoseωn vasorum Cordis, et eius motus sic statuo, his iactis et constitutis fundamentis. Certum est venas et arterias vteri non expandi et dilatari in tot ramos, quot sunt rami vasorum vmbilicalium in placenta : nec possunt eadem vasa extendi vsque ad fundum vteri, ubi placenta adhærescit, quoniam vasa hæc non sunt eiudem naturæ, qualis est substantia spongiosa vteri. Propterea sanguis maternus, tam venosus quàm arteriosus effunditur in vteri substantiam spongiosam, et per tubulos ac elices quoquouersum distribuitur. Hoc posito verissimo fundamento, arteriæ vmbilicales non coëunt, et uniuntur vasis vmbilicalibus per anastomosin. Ideoque arteriæ non exsugunt, et eliciunt sanguinem vitalem maternum nisi permixtum, et venoso confusum intra placentam. Inde sequitur istum sanguinem, licèt puriorem et subtiliorem venoso, exuctum ab arteriis vmbilicalibus, indigere præparatione noua, vt reddatur fœtui propitius et consocialis. Vt id fiat, Cor et ante suam excauationem, et postquam excauatum est, moueri debuit ad eam actionem perficiendam. Quapropter anastomoses vasorum Cordis, quamuis vsque ad partum et vltra, peruiæ et integræ remaneant, eum dumtaxat vsum habent, quem præscripsit Galenus, donec Cor fuerit excauatum. Quod accidit eo potissimum tempore, quo mouetur fœtus : Tunc Cor incipit moueri ad elaborationem vitalis spiritus. Atque hoc modo exponenda videtur Galeni sententia de vsu anastomoseωn, et de motu Cordis, quod deberet esse immobile, si ad partum vsque staret ac permaneret vsus Anastomoseωn vasorum Cordis, qualis à Galeno describitur.

    [Quant à l’utilité des anastomoses entre les vaisseaux du cœur et à son mouvement, je déclare donc, sur les arguments que j’ai présentés et établis, que les veines et les artères de l’utérus ne se dispersent et ne se dilatent pas en autant de branches qu’en possèdent les vaisseaux ombilicaux dans le placenta ; et qu’ils ne peuvent pas s’étendre jusqu’au fond de l’utérus auquel est collé le placenta, parce que ces vaisseaux n’ont pas une nature identique à celle de la substance utérine, qui est spongieuse. Le sang maternel, tant veineux qu’artériel, s’écoule donc dans la substance spongieuse de l’utérus et s’y disperse en tous sens par des tubules et des rigoles. Sur cette base parfaitement sûre, les artères ombilicales ne se joignent et ne s’anastomosent pas aux vaisseaux ombilicaux. {a} Lesdites artères ombilicales ne puisent et ne distribuent donc pas le sang vital de la mère, sauf s’il se mélange et confond avec le sang veineux dans le placenta. Par conséquent, ce sang absorbé par les artères ombilicales, bien que plus pur et subtil que le sang veineux, requiert une nouvelle préparation qui le rendra favorable et adapté au fœtus. Pour accomplir cette action, le cœur doit battre, tant avant son excavation qu’après que ses cavités se sont creusées. {b} Leurs anastomoses, bien qu’elles demeurent perméables et intactes jusqu’à l’accouchement et après lui, n’acquièrent la fonction que Galien leur a assignée qu’à partir du moment où les cavités cardiaques se sont formées et qu’il s’est mis à battre, ce qui correspond au moment où le fœtus commence à bouger. {c} C’est ainsi, me semble-t-il, qu’il faut expliquer la sentence de Galien sur la fonction des anastomoses et le mouvement du cœur, parce que le cœur devrait être immobile si la fonction des anastomoses, telle que décrite par Galien, demeurait inchangée jusqu’à l’accouchement]. {d}


    1. Sic pour « utérins » : les vaisseaux de la mère (utérins) ne se joignent et ne s’anastomosent pas avec ceux du fœtus (ombilicaux).

    2. Les cavités du cœur fœtal se forment à la 4e semaine de grossesse et il commence alors à battre.

    3. La mère commence à percevoir les mouvements de son fœtus entre la 16e et la 20e semaine de la grossesse.

    4. Propos obscur même en lisant ce que Galien a écrit sur la fonction des anastomoses cardiaques fœtales : v. supra note [10].

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Jean Pecquet et la Tempête du chyle (1651-1655), édité par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Texte : Jean ii Riolan
Première Responsio (1652) aux
Experimenta nova anatomica
de Jean Pecquet (1651).
6. Sur la circulation du sang, note 12.

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(Consulté le 14/06/2024)

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