Texte : Jean ii Riolan
Responsiones duæ (1655),
Responsio ad Pecquetianos
1re de 6 parties, note 42.
Note [42]

Jean ii Riolan résumait l’introduction de ses Animadversiones in Caspari Hofmanni Anatomica suis Institutionibus inserta [Animadversions sur les notions d’anatomie que Caspar Hofmann a placées dans ses Institutions], {a} pages 789‑790 : {b}

A triennio Hofmannus Institutiones Medicas emisit in lucem coactus, postquam vidit non sine lacrymis, quàm malè consuleretur nostris adolescentibus. In his vera et vtilia continentur, quibus perlectis, addo et bene intellectis, spondet fide sua, progressus secundos Deo, et proximo amicabiles : Magna est hæc operis sui fiducia, sed tanto fastu et arrogantia. carpit Authores Medicos septem, quos selegit castigandos, tanquam ignaros, imperitos, vt viris doctis et probis displiceant eius Institutiones Medicæ, nec pepercit Fernelio, quem Scholæ venerantur omnes, et agnoscunt à Galeno secundum,

——— cui Phœbi chorus assurexerat omnis.

Ego, inquit, hoc ago vt nauseam creem, ad mentionem hominis immeritissimò tanti. Passim ipsum suggillat, et iniustè ac iniuriosè reprehendit : Scripsit Hofmannus, notas absurdas et erroneas, aduersus libros Fernelij vniversæ Medicinæ, cum Præfatione ad Lectorem temeraria et insolenti ; quæ hominis rabiem et insaniam manifestè declaret : Ipsum enim Fernelium adeo contemnit. […] nec contentus Fernelij doctrinam malignè contempsisse, inuidiam suam ad Medicos Parisienses transtulit, Fernelij fautores et collegas […].

Appellat Patrem meum simiam Fernelij, et eius Institutiones medicas tanquam ridiculas fastidit. Sed illi obiicere possem, quod Martialis cuidam Zoilo.

Sunt quidam qui me dicunt non esse Poëtam,
Sed qui me vendit Bibliopola putat.

Riolani Institutiones plusquam vigesies à quadraginta quinque annis fuere excusæ, et diuenditæ in Gallia et Germania, talem applausum nunquam recipient Institutiones Medicæ Hofmanni, quia obscuræ, nulla methodo descriptæ. Sed sinamus hominem frui sua philautia.

Ipse sapit solus, reliqui velut vmbra vagantur.

[…] Reprehendit Institutionistas suos, quod prætermiserint Anatomicam doctrinam, ac proinde mutilas et imperfectas descripserint Institutiones Medicas : ipse præcedentibus accuratior Anatomica proposuit, sed adeo erronea et absurda, vt ipsum visis istis Animadversionibus, pudere debeat suæ scriptionis : lubenter abstinuissem ab ista Animaduersione, nisi minuenda esset eius authoritas, quam sibi arrogat in Rebus anatomicis, ne iisdem erroribus Medici decipiantur, quibus ipse deceptus fuit. Reliquas Medicinæ partes excutiendas, et erroribus vitæ humanæ pernitiosis expurgandas aliis relinquo. Nec debet more suo bene monenti oppedere, et sarcasmo exsibilare ac explodere istas Animaduersiones, quia prodeunt ex Officina Professoris Anatomici, qui consenuit in operibus Artis, atque ex tuo iudicio ius istud possidet. In Anatomicis, qui tantum temporis et tædij sumere non vult, non sumat sibi licentiam arbitrandi de tantis viris, ne in bonam quidem partem (quod notandum.) Nam vbi error, ibi quoque malum est : si Anatome falsum quid afferat, et quod in praxi nos errare faciat, ne Anatome quidem dicenda est, ex Hofmanno, Institut. Medic. pag. 69.

[Voilà trois ans qu’Hofmann a publié ses Institutions médicales, qu’il a réunies après avoir vu, non sans larmes, à quel point notre jeunesse était mal instruite. Elles contiennent de justes et utiles propos, et après les avoir entièrement lues, je les dis aussi bien pensées car il y promet en toute bonne foi des progrès favorables à Dieu et bienveillants envers tout un chacun. Il a grande confiance en son ouvrage, mais y déchire avec tant de faste et d’arrogance sept auteurs médicaux de son choix dont il doit corriger l’ignorance et l’incompétence, que ses Institutions médicales déplaisent fort aux savants honnêtes. il n’a pas ménagé Fernel, que toutes les écoles vénèrent, et reconnaissent pour le second après Galien,

——— cui Phœbi chorus assurexerat omnis. {c}

Je fais en sorte d’inciter au dégoût quand on y mentionne ce grand homme, qu’on tient pour grand sans qu’il mérite du tout de l’être. Il le meurtrit en maints endroits, en le blâmant injustement et injurieusement. Hofmann a écrit des annotations absurdes et erronées contre ses livres de sa Médecine universelle, {d} avec une insolente et téméraire Préface au lecteur qui fait manifestement voir sa rage et sa folie. (…) et non content d’avoir si malicieusement méprisé la doctrine de Fernel, il a transporté sa jalousie contre les médecins de Paris, ses défenseurs et collègues (…).

Il qualifie mon père de singe de Fernel et dédaigne, comme ridicules, ses préceptes médicaux, {e} mais je pourrais lui objecter ce propos de Martial sur un zoïle :

Sunt quidam qui me dicunt non esse Poëtam,
Sed qui me vendit Bibliopola putat. {f}

Depuis quarante-cinq ans, les préceptes de Riolan ont été imprimés plus de vingt fois, {g} et se sont bien vendus en France et en Allemagne, mais les Institutions médicales d’Hofmann ne rencontreront jamais un tel succès car elles sont obscures et rédigées sans méthode.

Ipse sapit solus, reliqui velut vmbra vagantur. {h}

Il reproche à ses précepteurs d’avoir négligé la doctrine anatomique, et ainsi rédigé des institutions médicales incomplètes et imparfaites. Lui-même aurait proposé une anatomie plus exacte que ses prédécesseurs, mais elle est si fautive et absurde qu’il devrait avoir honte de ce qu’il a écrit après avoir vu mes animadversions. Je me serais volontiers abstenu de les rédiger s’il n’avait pas fallu rabattre l’autorité dont il se targue en anatomie, afin qu’il n’abuse pas les médecins avec les erreurs qui l’ont lui-même abusé. Je laisse à d’autres le soin d’attaquer le reste de sa médecine et d’en ôter les fautes qui mettent en danger la vie humaine. Il ne doit pas, comme il en a l’habitude, se moquer de celui qui le met en garde, ni huer mes animadversions en les couvrant de sarcasmes parce qu’elles sortent de l’officine d’un vieux professeur d’anatomie que l’exercice du métier a épuisé, ainsi qu’Hofmann s’en arroge le droit (comme il faut bien le remarquer) : « Qui ne veut pas consacrer son temps et sa peine à l’anatomie ne peut se permettre de porter un jugement sur de si grands auteurs, s’il veut être pris au sérieux. Là où est l’erreur est le mal, et l’anatomie ne mérite pas même son nom si elle apporte quelque chose de faux, et qui nous égare dans la pratique » (Hofmann à la page 69 de ses Institutions)]. {i}


  1. Vnote Patin 12/92 pour les six livres des Institutiones Medicæ de Caspar Hofmann (Lyon, 1645).

  2. Opera anatomica vetera et nova, Paris, 1649, v. supra première notule {a}, note [26] : j’ai mis en exergue les fragments que Jean ii Riolan a repris dans sa Responsio ad Pecquetianos où je les ai traduits entre guillemets.

  3. « pour qui s’était levé tout le chœur d’Apollon » ; Virgile, Bucoliques, vi, vers 66, sur Silène : Utque viro Phœbi chorus assurexerit omnis [Et comment devant cet homme s’éleva tout le chœur d’Apollon].

  4. La Medicina universa ou Pathologie, en 23 livres, est le plus célèbre ouvrage de Jean Fernel : vnote Patin 1/36.

  5. Jean i Riolan a loué Fernel dans ses ouvrages, mais aucun ne porte le titre d’Institutiones medicæ : vnote Patin 9/22.

  6. « Certains disent que je ne suis pas poète, mais le libraire qui me vend n’est pas de cet avis », Épigrammes, livre xiv, cxciv.

  7. Cette date permet d’identifier les Opera omnia de Jean i Riolan comme étant ses Institutiones [préceptes], publiées pour la première fois par son fils à Paris en 1610.

  8. « Lui seul est sage, les autres errent comme l’ombre » : adaptation d’Homère, L’Odyssée, chant x, v. notule {g‑iv}, note Patin 37/8202.

  9. Livre ii, section iv, De partibus dissimilaribus, seu de Anatomia [Des parties non similaires, ou de l’anatomie], chapitre xxii, Quid sit Anatomia ? et qua Methodo tradi debeat ? [Qu’est-ce que l’anatomie, et par quelle méthode doit-on en traiter ?] page indiquée, avec Anatomia pour Anatome.

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Jean Pecquet et la Tempête du chyle (1651-1655), édité par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Texte : Jean ii Riolan
Responsiones duæ (1655),
Responsio ad Pecquetianos
1re de 6 parties, note 42.

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(Consulté le 13/06/2024)

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