Dans la première phrase de ce paragraphe, pour donner un sujet au verbe suppeditavit (« a procuré à foison »), j’ai interprété Ex instructissima parentis bibliotheca comme un cas nominatif, pour dire « La bibliothèque de mon père jadis extrêmement riche », où ex est une particule signifiant « précédemment » ou « ci-devant » ; et non comme un cas ablatif, « Tiré de la bibliothèque extrêmement riche de mon père », où ex est une préposition (souvent abrégée en e). Je pousse peut-être trop loin la spéculation en pensant que :
- parlant ainsi d’ex instructissima bibliotheca, Charles Patin déplorait la dispersion de la Bibliothèque de son père, entamée dès 1669 et complète en 1674 ;
- sans en dire plus que ce minuscule ex, Charles devait se tenir pour cruellement spolié par son frère aîné Robert puis par sa veuve, Catherine Barré (v. Comment le mariage et la mort de Robert ont provoqué la ruine de Guy Patin) ;
- avant l’âge de 11 ans, Charles était dévoré par une véritable furie de lire ; stimulé par la parole de Guy Patin, son père et précepteur, qui le rendait « patron » (propriétaire ou protecteur) de tous les livres qu’il serait capable de lire dans leur version originale, le jeune garçon avait appris le grec puis lu une impressionnante liste d’ouvrages (dont les auteurs sont tous mentionnés ailleurs dans notre édition), et même aussi, semble-t-il, s’était initié à l’italien et l’espagnol ; ce qui pourrait signifier que la bibliothèque contenait des ouvrages dans ces trois langues que Guy Patin ne comprenait pas ;
- si Charles n’avait pas dû quitter définitivement Paris en novembre 1667, la fameuse bibliothèque, qui faisait la fierté de son père, n’aurait sans doute pas connu un si déplorable destin ; mais par ironie du sort, c’est la folie des livres (bibliomanie) que Guy Patin avait attisée en lui qui a provoqué l’exil de son fils puîné (v. les Déboires de Carolus).