« Le collège promis par François ier, créé par Charles ix le 27 juillet 1658, fut très prospère sous la direction de Me Jean Garnier qui, de 1602 à 1649, en fut le principal. Mais vers la fin de ce long principalat, il se produisit un relâchement qui aboutit à une crise. Nous ne rapporterons ici que les détails qui touchent de près ou de loin à l’histoire du protestantisme.
Le Collège confié aux minimes.
1649, 17 septembre. — Les pères minimes sont agréés comme régents du collège par le Conseil de la ville qui, d’ailleurs, subordonne sa décision à l’approbation de l’assemblée générale la plus prochaine.
29 novembre. — Assemblée générale des habitants. Le procès-verbal de cette assemblée constate que “ depuis six mois et plus, Me Jean Garnier, principal du collège, et autres habitants auraient fait de continuelles plaintes aux échevins et gens du Conseil du peu d’affection que témoignaient les régents dudit collège pour l’instruction de la jeunesse, et qu’en outre, ledit Me Jean Garnier n’est plus en état de continuer la charge de principal, attendu son grand âge… ” Nomination d’une commission à laquelle s’adjoindront soixante notables.
28 décembre. — Les soixante notables décident qu’on priera les R.P. minimes du couvent de Vitry-le-François de se charger de l’instruction de la jeunesse.
La ville s’engage à leur payer 1 000 livres annuelles pour ce service, à charge par eux de reverser sur cette somme 300 livres à l’ancien principal.
1650, 7 février. — Les minimes sont mis en possession par un échevin.
Il n’est pas invraisemblable qu’en faisant passer la direction du Collège aux mains de ces réguliers, on ait eu en vue autre chose encore que la bonne administration de l’établissement : c’est du moins ce que donnent à entendre les faits qui suivirent et les documents qui nous en ont conservé la mémoire.
Il y avait dans la ville un parti hostile aux minimes ; et le chef de ce parti n’était rien moins que le chanoine Hurbal, délégué aux fonctions curiales. {a} Un procès s’engagea ; et le 29 mars, Hurbal obtint un arrêt qui ordonnait aux anciens régents de continuer leurs cours jusqu’à nouvel ordre. À peine cet arrêt obtenu, le chanoine se présenta à la porte du collège avec les régents et essaya, “ par voies de faits et violences ”, de chasser les minimes de leurs classes (selon la requête suivante).
1650, avril. — Requête des habitants de Vitry à Nosseigneurs du Parlement. Ils se plaignent que les élèves du collège, “ non seulement perdaient le temps sans tirer aucun profit, à cause du peu de capacité des régents, mais même couraient risque de se corrompre par l’exemple des mauvais déportements et friponneries ordinaires desdits régents ”. Ils reprochent à Hurbal d’avoir “ grande habitude et fréquentation journalière avec plusieurs habitants faisant profession de la religion prétendue réformée ”. — Opposition à l’arrêt du 29 mars.
Sans date [1650]. — Plainte des habitants de Vitry contre les régents. “ Les régents sont trois jeunes hommes, lesquels n’ont ni le caractère de la prêtrise ni aucun ordre sacré qui les lie à l’Église…, qui, abusant de leur condition, faisaient friponneries avec leurs écoliers, prenant du tabac et buvant le vin que ceux-ci tiraient secrètement des caves de leurs pères et mères… ” Par indulgence, on les avait congédiés civilement au commencement du mois de janvier de cette année 1650 ; “ mais ledit Hurbal, qui a de la vanité assez pour se figurer que toute la ville doit ployer sous ses volontés, les fit retourner lorsqu’il fit signifier l’arrêt à l’exécution duquel les échevins ont formé opposition… ”.
Les échevins gagnèrent leur procès, {b} mais cette victoire se transforma bientôt en défaite car les minimes, fatigués sans doute de toutes ces difficultés, demandèrent eux-mêmes la résiliation de leur contrat avec la ville ; et en 1651, les anciens régents furent encore une fois rétablis dans leurs fonctions. »
- À qui l’évêque avait confié les affaires concernant les curés du diocèse.
- Les minimes étaient confirmés dans leur attribution du collège, et Hurbal, ses régents et ses partisans déboutés : on en était là quand les ennemis des moines sollicitèrent l’appui de l’Université de Paris (qui le leur refusa).