À Charles Spon, le 17 septembre 1649, note 13.
Note [13]

Roger de Lorraine, chevalier de Guise (1624-Cambrai 6 septembre 1653) était fils de Charles, duc de Guise, et de Henriette-Catherine de Joyeuse, duchesse de Montpensier. Frère cadet du duc de Guise, Henri ii de Lorraine, Roger était chevalier de Malte (Adam et Jestaz).

Journal de la Fronde (volume i, fo 95 ro et vo) :

« De Paris, le 17 septembre 1649. Vous avez su que la cour revenant de Picardie il y a deux ans, le roi voulut voir la mer à Saint-Valéry, et delà passa à la ville d’Eu, {a} qui appartient au duc de Guise, où il y a une bonne abbaye {b} dont l’abbé était fort malade. Le chevalier de Guise demanda cette abbaye en cas qu’elle vînt à vaquer, ce que la reine lui accorda et M. le cardinal lui donna la parole qu’il l’aurait lorsque cet abbé viendrait à mourir, en quelque temps que ce fût. Dans cette espérance, ce chevalier n’avait pas voulu depuis ce temps-là importuner Son Éminence pour le paiement d’une pension de dix mille livres qu’elle lui promit il y a quatre ans sur l’abbaye de Saint-Pierre de Corbie lorsque le duc de Guise demandait la restitution de ses bénéfices, et notamment de celui-ci. Maintenant, l’abbé d’Eu étant mort depuis sept ou huit jours, le chevalier de Guise fut trouver Son Éminence le 11 de ce mois et le pria de lui tenir la parole qu’elle lui avait donnée il y a deux ans, et que la reine lui avait confirmée ; à quoi Son Éminence répondit qu’elle ne croyait pas de lui avoir rien promis et que la reine avait donné cette abbaye à M. Le Tellier, secrétaire d’État, pour un de ses enfants. Sur cela ce chevalier lui repartit que personne n’en pouvait avoir eu l’avis parce que l’abbé était mort d’apoplexie et qu’aussitôt qu’il était expiré, le gouverneur de la ville d’Eu lui avait envoyé promptement un courrier pour lui en donner avis et avait en même temps fermé la porte de la ville afin que d’autres courriers que le sien n’en pussent apporter la nouvelle ; ce qui n’empêcha pas que M. le cardinal ne persévérât dans sa première réponse, dont ce chevalier fut si outré qu’il commença à pester contre Son Éminence dans sa chambre même, jurant des morts et des têtes qu’il lui ferait tenir parole ou qu’il le périrait, et qu’il empêcherait bien la jouissance à celui pour qui il l’avait destiné. Le 13, M. le duc d’Orléans dit à ce chevalier qu’il le voulait accommoder avec M. le cardinal ; à quoi il répondit qu’il obéirait toujours à Son Altesse Royale, mais qu’il la croyait assez raisonnable pour juger qu’il n’y avait point d’accommodement à faire que M. le cardinal ne lui eût auparavant payé 40 mille livres qu’il lui doit pour quatre années de sa pension sur l’abbaye de Corbie, et qu’il ne lui eût tenu parole pour celle de la ville d’Eu que la reine lui avait donnée par avance il y a deux ans. De sorte que Sadite Altesse, trouvant qu’il avait raison, dit à M. le cardinal qu’il était juste de donner cette abbaye au chevalier, auquel M. Le Tellier envoya le 15 la démission de son brevet, et ainsi ce chevalier a emporté de haute lutte ce qu’il demandait. »


  1. Le 31 juillet 1647.

  2. Laurent (Laurence) O’Toole (Lorcán Ua Tuathail), archevêque de Dublin, mort à Eu en 1180, est le saint (canonisé en 1225) dont l’abbaye célébrait la mémoire ; détruite à la Révolution, il en subsiste la collégiale Notre-Dame-et-Saint-Laurent.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 17 septembre 1649, note 13.

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(Consulté le 12/12/2024)

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