À Charles Spon, le 21 avril 1643, note 16.
Note [16]

Après la mort de Richelieu, dont il était homme de confiance, François Sublet de Noyers, secrétaire d’État au département de la guerre, avait tenté d’évincer Mazarin du Conseil. Il était renvoyé brusquement et remplacé par Le Tellier. Ses tentatives pour revenir en grâce furent vaines et il se retira en Normandie où il mourut le 20 octobre 1645.

Olivier Le Fèvre d’Ormesson (Journal, tome i, pages 23‑25) :

« Le dimanche 12 avril, M. de Jouy, gentilhomme de Monsieur, frère du roi, dîna avec mon père, qui me dit que M. de Noyers, après avoir reçu deux ou trois fâcheuses attaques du roi, s’était enfin résolu de lui demander congé ; et que, le vendredi, sur une contestation arrivée entre lui et le roi pour la guerre, le roi lui ayant dit qu’il semblait qu’il eût pris à tâche de le contredire, M. de Noyers prit occasion de lui dire que voyant que son service ne lui était plus agréable, il le priait de lui permettre de se retirer. Le roi lui dit qu’il n’avait jamais refusé le congé à personne ; de quoi M. de Noyers l’ayant remercié, il se retira en sa chambre et puis après, reçut ordre par M. de Guénégaud de se retirer à Dangu {a} et de laisser ses deux commis avec la cassette de ses papiers. M. de Noyers envoya un courrier aussitôt à M. de La Meilleraye avec un mot pour lui donner avis de son congé, et partit à quatre heures du matin.

L’on disait que cette disgrâce nuirait aux jésuites, qui étaient le conseil de M. de Noyers, et qu’ils ne poursuivraient plus le procès commencé pour être du Corps de l’Université ; {b} ce qui les avait rendus si odieux que le peuple criait contre eux et prenait occasion de dire qu’ils étaient cause de la cherté du blé par le transport qu’ils en avaient fait en Flandres, et qu’il y avait sept prisonniers à la Bastille pour ce sujet. M. de Jouy nous assura qu’il avait vu un homme qui avait vu conduire lesdits sept pères jésuites dans la Bastille pour ce sujet ; ce que j’ai grande peine à croire. Il nous dit que M. Le Tellier, maître des requêtes, employé en Italie, devait prendre la place de M. de Noyers. […]

Le mercredi, {c} M. le comte de Bruslon me vint voir et me dit que M. de Noyers n’avait été chassé que parce que, comme il croyait être fort homme de bien et avait une absolue disposition de plus de trente millions par an, sans en rendre compte, sous M. le cardinal de Richelieu, il voulait continuer de même et n’en rendre aucun compte au roi qui s’en était offensé plusieurs fois ; et ce ne fut point à cause qu’il demanda son congé que le roi le lui donna, y ayant plus de cinq semaines que la résolution en était prise, et dont il était averti lorsqu’il demanda son congé […]. Quoi qu’il en soit, l’on condamne M. de Noyers de n’avoir pas voulu souffrir et il sera malaisé de savoir la véritable cause de sa disgrâce. »


  1. Terre de Normandie, dans l’Eure, dont de Noyers était seigneur.

  2. V. note [34] du Patiniana I‑3.

  3. 15 avril 1643.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 21 avril 1643, note 16.

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(Consulté le 19/04/2024)

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