Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Patiniana I‑1 (1701), note 24.
Note [24]

L’extraordinaire de la Gazette (no 117, du 10 octobre 1647), intitulé La Vie et la mort du maréchal de Gassion, est riche en renseignements sur Jean de Gassion, décédé à Arras le 2 octobre 1647, après une blessure reçue au siège de Lens (v. note [6], lettre 31).

  • Page 897 (sur son père) :

    « Le maréchal de Gassion a eu pour père Messire Jacques de Gassion, second président au mortier du parlement de Pau, à présent de Navarre, qui avait été procureur général au même parlement. » {a}

  • Pages 900‑901 (sur sa bravoure et ses exploits guerriers) :

    « En toutes lesquelles occasions il courut bien grand risque de sa personne, mais d’autant plus volontiers qu’il croyait < en > la prédestination, qui est l’une des doctrines auxquelles l’avait engagé le malheur de sa créance, faisant profession de la religion prétendue réformée, qu’il avait sucée avec le lait, par le vice du pays et du temps, qui n’avait pas encore dessillé les yeux à une grande partie des plus beaux esprits et des meilleures familles, pour apprendre que la foi est un don de Dieu, qui ne vient pas de la capacité et dignité des hommes ; {b} sans lequel malheur, nous aurions plus de quoi le louer, et il eût mieux obtenu le souhait qu’il répétait souvent : Tout m’est gain, à vivre et à mourir, pourvu que ce soit en servant Dieu et le roi. »

  • Pages 905‑906 (sur ses mœurs) :

    « Toutefois, il n’y a pas tant à s’ébahir qu’une personne qui ne s’était adonnée, depuis l’âge de seize ans, qu’à un seul exercice, savoir à celui de la guerre, le fît en perfection ; car il se peut dire de lui que le temps, lequel plusieurs autres perdent à l’amour, au vin, au jeu, à la chasse et à une infinité d’autres divertissements de la vie, qui en font écouler la plupart inutilement, n’était par lui employé qu’à faire des entreprises contre les ennemis du roi, et à les exécuter.

    L’amour ne lui était pas seulement indifférent : il avait une si grande aversion aux filles et aux femmes, et à toutes les coquetteries qui en dépendent, qu’il est malaisé de concevoir comment, étant de cette humeur, il ne laissait pas de pratiquer fort adroitement la civilité et courtoisie, qui semblent s’apprendre mieux avec ce sexe que dans toutes les écoles de la morale. {c} Il n’était pas seulement ennemi de ces autres habitudes que l’excès rend mauvaises, l’entretien lui en était odieux. Aussi n’était-il savant qu’en son métier, et affectait de paraître peu versé en toute autre matière, écartant le plus qu’il pouvait les occasions d’en parler, mais avec tout le respect et la complaisance possibles. »


    1. Jean était le cinquième des sept enfants (dont deux filles) de Jacques de Gassion.

      Dans son historiette sur Le maréchal de Gassion, Tallemant des Réaux (tome ii, pages 78‑87) dit :

      « Son aïeul était second président du parlement de Navarre, et y exerça par commission la charge de premier président, car Henri iv, par quelque considération, ne la lui voulut pas donner en titre. Son père, fils de celui-là, y fut aussi deuxième président. Comme il était huguenot, on lui disputa cette place, qui lui appartenait par ancienneté ; mais il s’avisa d’un bel expédient. Un dimanche, étant parti de chez lui pour aller au prêche, au lieu d’y aller, il alla à la messe, en disant : “ N’y a-t-il que cela à faire ? ” Mais il ne continua pas, et n’allait ni à prêche ni à messe. »

    2. Conception différente de la grâce divine chez les protestants (prédestination) et chez les catholiques (libre arbitre), dont l’exposé incisif à l’encontre des premiers peut tout de même faire douter que Théophraste Renaudot (calviniste converti à la religion romaine) fût auteur de cet article de sa Gazette.

    3. V. note [58], lettre 104, pour le projet sans lendemain de marier le maréchal de Gassion, en 1644, avec la fille du maréchal de Châtillon, Gaspard iii de Coligny.

      Tallemant (v. supra notule {a}) :

      « C’était un des plus méchants courtisans de son siècle. À la cour, beaucoup de filles, qui eussent bien voulu de lui, le cajolaient et lui disaient : “ Vraiment, Monsieur, vous avez fait les plus belles choses du monde ! – Cela s’entend bien ”, disait-il. Une ayant dit : “ Je voudrais bien avoir un mari comme M. de Gassion. – Je le crois bien. ” Segur, fille de la reine, de la maison d’Escars, avait quelque espérance de l’épouser, assez mal fondée pourtant, car elle n’était ni jeune ni belle ; lui disait : “ Elle me plaît, cette fille, elle ressemble à un Cravate. ” {i} […]

      Comme j’ai remarqué, il était fort sobre ; il n’était point joueur non plus, ni adonné aux femmes. “ Femmes et vaches ”, disait-il, “ ce m’est tout un, mordioux ! ” Et Marion Cornuel (Melle le Gendre) disait : “ Bœufs et Gassions, ce m’est tout un. ” »

      1. Cavalier croate.

Cet article du Patiniana imprimé ne vient pas du manuscrit de Vienne.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Patiniana I‑1 (1701), note 24.

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(Consulté le 27/04/2024)

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