À Charles Spon, le 16 novembre 1649, note 3.
Note [3]

Brouage en Saintonge était un port de mer fortifié situé à 35 kilomètres au sud de La Rochelle, flanqué au sud d’un bourg dénommé Hiers, les deux formant aujourd’hui la commune de Hiers-Brouage (Charente-Maritime). Le port avait été au Moyen Âge une île du golfe de Saintonge. Sa première richesse, le commerce du sel produit par les marais du voisinage, était en train de causer lentement sa perte : avant de charger leur précieuse cargaison les bateaux vidaient en mer le sable qui leur avait servi de lest pour venir jusque-là sans encombre ; tout ce sable s’accumulant, l’île se rattacha au continent, puis la mer s’éloigna d’elle peu à peu ; le port de Brouage, voué à la guerre et au commerce, connaissait alors son dernier siècle de rayonnement grâce à son profond canal ; aujourd’hui 4 kilomètres de marais séparent la forteresse ensablée du littoral.

Louis Foucault de Saint-Germain-Beaupré (1616-Paris 10 octobre 1659), comte Du Dognon (ou Daugnon), avait d’abord été page du cardinal de Richelieu. Il était ensuite entré dans la marine : vice-amiral en 1639 sous Armand de Maillé-Brézé, il avait fait les campagnes de 1640 à 1642, battant les Espagnols devant Cadix et sur les côtes de Catalogne. Il avait obtenu en récompense de ses services le gouvernement de Brouage en 1643, puis ceux d’Aunis et des îles de Ré et d’Oléron. Pendant la Fronde, il servit d’abord les intérêts du roi en repoussant plusieurs fois la flotte des Bordelais frondeurs ; mais l’année suivante, Du Dognon se rangea, moyennant finances, dans le parti du prince de Condé et fut destitué de toutes ses charges. On parvint pourtant à l’en détacher en 1653 et pour le dédommager de la perte de son gouvernement, il fut fait maréchal de France et reçut un brevet de duc et pair, avec 500 000 livres, somme qui était à la hauteur du fruit de sa défection puisqu’elle contribua à la chute de Bordeaux et à la défaite de Condé (Michaud, G.D.U. xixe s. et Jestaz).

La prise du château Trompette, le 18 octobre (v. note [38], lettre 203), par les parlementaires n’avait pas mis fin à la guerre de Bordeaux ; Journal de la Fronde (volume i, fos 124 ro et vo, 130 ro et 139 vo) :

« De Bordeaux, du 28 octobre. […] On eut hier avis ici que le comte du Dognon est à L’Épineuil, demi-lieue de la ville de Saintes, malade d’une fièvre tierce, et que son secrétaire y était arrivé en poste venant de Paris et lui avait apporté les ordres de la cour pour se tenir prêt à se mettre en mer avec les vaisseaux qui doivent venir au secours de M. d’Épernon du côté de la Bretagne. Les mêmes avis ajoutaient que M. le marquis de Montauzier, gouverneur de Saintonge, était aussi arrivé audit Épineuil revenant de Paris ; qu’il avait fort maltraité le maire de la ville de Saintes pour avoir permis que quelques gentilshommes de son gouvernement aient levé des troupes pour notre parlement. […]
Le 10, on eut ici {a} avis par courrier extraordinaire que le comte du Dognon était entré dans la rivière de Bordeaux avec neuf vaisseaux qu’il a amenés au duc d’Épernon ; et que le Périgord s’étant révolté avec une partie du Limousin, ce duc y avait envoyé quelques troupes commandées par M. de Biron, qui avait commencé à les réduire. […]
L’on a eu nouvelles {b} que M. d’Épernon a reçu du secours, entre autres le régiment d’Uxelle, qui n’est que de 150 hommes. Il attend les deux < régiments de > Navailles et < de > la Couronne. On dit que le régiment colonel de la cavalerie l’a joint. On a aussi avis que le comte du Dognon a des vaisseaux prêts, bien armés, pour entrer en la rivière. On se résout à la défense et à faire toutes les choses nécessaires pour cela. »


  1. Novembre 1649 à Paris.

  2. À Bordeaux, le 22 novembre.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 16 novembre 1649, note 3.

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(Consulté le 23/04/2024)

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