« sur la Syphilis » : cinquième partie du sommaire donné dans la note [16] supra ; dans l’original français (édition française de Paris, 1639, pages 379‑380), ce chapitre est intitulé De l’origine de la vérole, et qu’elle a été apportée des Indes [Occidentales]. André i Du Laurens y défendait la nouveauté de la maladie en Europe, mais avec ces curieuses remarques : {a}
« Opinion des astrologues touchant l’origine de la vérole. {b} Les astrologues rapportent son origine aux astres, à savoir à une certaine constellation et conjonction de Mars, Jupiter et Saturne, qui apparut l’an 1482, laquelle ils disent avoir été comme le présage et l’avant-coureur de la vérole future.
Autres opinions. {b} Les autres veulent qu’elle ait été engendrée par le vice particulier de l’air ; et les autres, qu’elle ait commencé d’elle-même {c} et se soit engendrée par l’infection et corruption des humeurs. Un certain médecin voyageant par l’Italie et passant par Naples, s’étant diligemment enquis de cette maladie, témoigne avoir entendu de son hôte, âgé de 80 ans, que la famine s’étant mise aux armées, {d} les vivandiers qui fournissaient de<s> vivres aux gens de guerre, faisaient secrètement manger aux soldats de la chair d’hommes, et que tout aussitôt, la maladie se mit parmi le camp : de sorte que ce médecin croit la vérole être venue aux hommes pour avoir mangé de la chair de leurs semblables. Et pour confirmer son opinion, il dit avoir nourri plusieurs animaux, comme chiens et pourceaux, de la chair d’autres chiens et pourceaux leurs semblables, et que tout aussitôt, le poil leur tombait, {e} qu’il leur venait des ulcères par tout le corps, et qu’ils demeuraient tout transis. Il dit outre-plus {f} que cette maladie est familière et ordinaire aux Indiens, parce que ces barbares se nourrissent de chair humaine et mangent les hommes, qui est la raison que les anciens les ont nommés Anthropophages, c’est-à-dire vivant de chair humaine. » {g}
- Par curiosité, voici la traduction latine de cet extrait par Guy Patin (avec mise en gras des trois passages commentés dans les notules qui suivent) :
Astrologorum opinio de Luis Venereæ origine. Astrologi novas syderum conversiones, concursus aspectúque primam huiusce morbi originem extitisse tradiderunt. Incusant scilicet illi insolentem quandam syderum constitutionem, et Maris ac Iovis cum Saturno coniunctionem, quæ anno 1482. apparuit, quámque tanquam certissimum indicem et futuræ Luis Venereæ prodromum fuisse asserunt.
Opiniones aliæ. Alii peculiari quodam aeris vitio genitam volunt ; Alii nullum aliud habuisse principium quàm humorum corporis infectionem et corruptionem autumant. Medicus quidam Italiam perlustrans, cùm ad Neapolim appulisset, et de juius morbi causa diligentissimè inquisivisset, ab hospite suo viro octogenario rescivisse testatur, extremam famem morbum hunc in Italiam intulisse, hoc modo. Cùm enim, inquit, extrema illa fames exercitum utrumque invasisset, qui cibos nutriendis militibus suppeditare debebant, humanas carnes clàm et latenter ijs ingerebant ; indéque novus ille morbus in utroque exercitu statim vigere cœpit ; ita ut Luem hanc Veneream hominibus accidisse, quod humanas carnes comederint, Medicus ille censeat. In cuius suæ sententiæ confirmationem, se plura animantia ut carnes et porcos, canina et porcina carne aluisse testatur, unde statim pilorum defluvio, multis per totum corpus, ulceribus, et horrore quodam correpta illa animantia se deprehendisse affirmat. Addit insuper, morbum hunc Indis vernaculum esse et familiarem, quod barbaræ eiusmodi gentes carnibus humanis vescantur ; qua de causa ab antiquis Anthropophagi dicti sunt.
- Sous-titre original de Du Laurens.
- Assertion omise par Patin, qui l’a remplacée par nullum aliud habuisse principium quàm, « n’a pas eu d’orignine autre que ».
- Patin a ajouté inquit, « dit-il », devant savoir que Du Laurens empruntait son conte aux :
Secreti Médicinali di M. Leonardo Fioravanti Medico Bolognese, divisi in tre libri…
[Secrets médicaux de M. Leonardo Fioravanti, médecin natif de Bologne, {i} divisés en trois livres…]. {iii}
Le livre i, pages 42 ro‑vo, situe ces événements durant la guerra quello Giovanni figliulo de Rinato duce d’Angoi, contra il Re Alfonso di Napoli, nel regno, circa l’anno 1456 [que mena Jean, {iii} fils de René d’Anjou, {iv} contre le roi Alphonse, {v} dans ce royaume {vi} vers l’an 1456].
- Médecin, chirurgien et alchimiste (1517-1588).
- Venise, Lodovico Avanzo, 1591, in‑8o de 366 pages.
- Jean ii de Lorraine (1437-1470).
- Le roi René (1409-1480), roi de Naples, d’Aragon et de Jérusalem, duc de Lorraine, d’Anjou, etc.
- Alphonse v d’Aragon (mort en 1458, v. note [56] des Deux Vies latines de Jean Héroard.
- Le royaume de Naples que les Angevins disputaient aux Aragonais.
- Une chute de cheveux par plaques, dite en clairière, peut survenir lors de la syphilis, au stade secondaire de son évolution.
- « En outre » : pléonasme archaïque que Patin a fidèlement traduit par Addit insuper, « Il ajoute en plus ».
- V. notule {e}, note [12] du Faux Patiniana II‑6 pour les anthropophages de Java.
Si elle n’est pas d’une élégance renversante, la traduction de Patin est donc exacte (hormis ma remarque de la notule {c} supra) ; la notule {d} supra laisse même penser qu’il a poussé le scrupule jusqu’à trouver la source de cette fable étiologique.
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