Aumale (Histoire des princes de Condé, tome vi, pages 29‑34) :
« Le “ pain du roi ” fut refusé aux prisonniers. Un arrêt du Conseil ayant prescrit aux intendants des princes de pourvoir à la dépense de leurs maîtres, le président Ferrand, que Condé avait commis à l’administration de ses affaires, refusa de se prêter à l’exécution de cet arrêt ; ses meubles furent saisis comme l’étaient déjà ceux de son mandant. D’autre part, l’entrée du château restant interdite aux serviteurs des princes et ceux-ci ne voulant pas toucher aux viandes préparées dans la cuisine de leur geôlier, il fallut envoyer des officiers du roi qui souvent refusaient le service, faute d’argent ; de là quiproquo, colère du gouverneur, coups de bâton ; les prisonniers n’en étaient pas moins fort irrégulièrement servis et nourris. […]
Malgré la surveillance, les prisonniers n’étaient pas sans communication avec l’extérieur. D’abord les médecins : on n’avait pu refuser à Conti des soins indispensables ; un jeune praticien nommé Dupré s’établit en permanence au château ; les visites du vieux médecin Guénault et du chirurgien Dalencé furent autorisées. On fit passer à Condé un bâton d’encre de Chine et de petits tuyaux de plume qu’il accrochait au col de sa chemise ; les livres qu’on lui envoyait étaient des in‑folios en grand papier ; il déchirait les marges, mouillait le bâton avec de la salive et parvenait à écrire des billets. Il n’était pas moins habile, la nuit, à se servir de ces in‑folios, à manœuvrer sa bougie, son rideau et sa couverture pour lire, sous les yeux des gardiens, les avis qu’on lui faisait parvenir. »
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