Ce passage mêle des emprunts à quatre sources.
- Juvénal, Satire vi, vers 646‑649, à propos des mères qui tuent leurs enfants :
minor admiratio summis
debetur monstris, quotiens facit ira nocentem
hunc sexum et rabie iecur incendente feruntur
præcipites.
[De telles monstruosités doivent moins étonner : ce sexe se précipite dans l’abîme chaque fois que la colère le rend pernicieux et que la rage lui incendie le foie]. {a}
- Dans l’ancienne médecine, le foie était le siège des passions.
- Sénèque le Jeune, Questions naturelles (livre i, chapitre xvi), à propos d’un certain Hostius Quadra, que ses esclaves avaient tué pour venger les outrages qu’il leur avait fait subir :
At illud monstrum obscenitatem suam spectaculum fecerat et ea sibi ostentabat, quibus abscondendis nulla satis alta nox est.
[Mais ce monstre avait transformé son ignominie en spectacle, il se mirait dans ces actes que la plus sombre nuit ne saurait cacher]. {a}
- Sénèque a expliqué avec force détails que ledit H. Quadra employait des miroirs grossissants pour mieux jouir des copulations passives dont il se délectait.
- L’adjectif néolatin lumbifragus, « qui brise les reins », est tout à fait exceptionnel ; je ne l’ai vu précédemment imprimé avec un sens lubrique que dans les Ioannis Leochæi Epigrammatum libri quatuor [Quatre livres des Épigrammes de John Leech], {a} livre iv, xxxi, De Franciscano vinum dilutum fugiente [Le franciscain qui fuit le vin dilué] :
Dum parat apposito lymphas sociare Lyæo,
temperet ut mixtis vina minister aquis,
cordiger acclarans : “ Puer, o puer improbe, siste.
Non facit stomachum res, ait, ista meum.
Non mihi lumbifraga lassatus Cypride Bacchus,
sed sine concubitus crimine purus eat. ”
[Tandis qu’on apprête l’onde {b} à côté de Lyæus, {c} afin que le prêtre tempère le vin en l’y mêlant, le cordelier refuse nettement : « Arrête, méchant garçon ! voilà qui ne convient pas à mon estomac. En mon corps, Cypris, qui brise les reins, {d} n’a point épuisé Bacchus : qu’il y entre donc pur, pour se coucher avec moi sans crime ! »] {e}
- Londres, Bernardus Alsopus, 1623, numérisé par l’Early English Books Online Text Creation Partnership.
John Leech est un poète néolatin écossais, actif au début du xviie s.
- Nom poétique de l’eau, équivalent de la lympha latine.
- Épithète de Bacchus (le dieu qui délivre des soucis, luaïos en grec), mais aussi dénomination poétique du vin.
- Cypris est le nom sous lequel on vénérait Vénus à Chypre.
V. notule {c}, note [30], lettre 195, pour le substantif lumbifragium, inventé par Plaute (avec le sens de bastonnade), qui a donné naissance à l’adjectif lumbifragus.
- La satire des moines et le lien entre le vin et la luxure m’ont convaincu qu’il n’était pas absurde de déterrer ces vers pour en faire la source d’un emprunt caché de Guy Patin.
- Valère Maxime (v. note [7], lettre 41), Faits et dits mémorables, livre ii, chapitre i, § 5 :
Quia proximus a Libero patre intemperentiæ gradus ad inconcessam Venerem esse consuevit.
[Car il n’y a d’ordinaire qu’un pas de l’intempérance de Bacchus {a} à l’impiété de Vénus].
- Liber pater, dieu romain de la fécondité, est assimilé à Bacchus.
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