M. Fabert [2] m’a visité ce matin. Il est premier échevin de Metz [3][4] et frère du maréchal de Fabert, [5] gouverneur de Sedan. [6] Il y a plus de 25 ans que je suis son médecin. Eius uxor vocatur Magdalena Foesia, [1][7][8] je l’ai autrefois traitée ici fort malade ; elle est fille de François de Foës, [9] savant médecin de Metz, et petite-fille de M. Anuce de Foës [10] cui debemus Hippocratem cum commentariis, ac eius Œconomiam. [2][11] Il m’a dit que le roi [12] partira samedi prochain pour Compiègne [13] et que, l’année qui vient, il ira à Nancy, [14] Metz et autres villes de par delà, mais que ceux de Metz doivent appréhender que ce voyage ne leur coûte quelque chose ; devinez le reste. [3] M. Morange [15] vient de sortir de céans pour me dire adieu, c’est un honnête homme, bien fait et qui a bon esprit. Je rencontrai hier votre M. Gras, [16] il est fait comme un rabbin de la vieille Loi, c’est toujours lui-même. Noël Falconet [17] a vu faire la perforation du scrotum pour l’hydrocèle [18] du petit Renaud François, fils de l’hôte chez qui était logé votre joaillier, M. Simonet ; [19] quand vous le verrez, vous m’obligerez de lui faire mes recommandations. Nous sommes députés, M. Blondel [20] et moi, pour examiner et voir opérer ceux qui doivent tailler [21] de la pierre dans l’Hôtel-Dieu. [22] Je n’y irai point pour l’opération que je n’y mène notre jeune homme, qui aura toujours occasion d’apprendre quelque chose ; cette opération sera plus difficile que celle de l’hydrocèle. Je ne doute point que ce ne soit M. le premier président [23] qui m’y ait nommé. Je crois que vous avez entendu parler d’une Histoire que l’on vend ici en trois volumes in‑fo du cardinal de Richelieu [24] faite par M. Aubery. [25] Le libraire la veut vendre 50 livres reliée, c’est trop cher ; mais les libraires sont insolents et abusent des gens de lettres ; on la va imprimer in‑4o, elle sera à meilleur marché. [4] On parle ici du voyage du roi pour l’an prochain en Bretagne et en Normandie, c’est-à-dire que l’on cherche toutes sortes de moyens de le divertir car on dit qu’il devient mélancolique. [5][26] Noël Falconet étudie fortement, la diversité des matières de médecine le réjouit. Je l’ai entretenu aujourd’hui d’un homme qu’il connaît, qui a été jusqu’à l’apoplexie [27] exclusive ; pourtant, propter nimiam plenitudinem cerebri, adorat balbuties et aphonia ; tandem levatus et liberatus per quinquies repetitam venæ sectionem [6] en 24 heures ; sur quoi je lui ai fait lire le chapitre de Apoplexia dans la Pratique de M. Riolan [28] le père. [7] Je vous baise les mains, à Mlle Falconet et à notre bon ami M. Spon, et suis de tout mon cœur votre, etc.
De Paris, ce 24e de septembre 1660.