À Charles Spon, le 29 mai 1648

Note [52]

Pierre-Ancise : « Pierre-Scise est le nom d’un quai de la Saône dominé par un rocher (petra scissa) qu’Agrippa fit couper pour le passage d’une voie militaire » (G.D.U. xixe s.). Il y avait là une prison-forteresse où le capitaine Complet de Saujon avait été enfermé (v. note [46], lettre 155). Il fut relâché sur les instances de Mademoiselle et en vertu de la déclaration royale du 22 octobre 1648 qui, en conséquence de la Fronde parlementaire (v. note [7], lettre 157), remettait tous les sujets du roi à leurs juges naturels et ordonnait que tous les prévenus seraient interrogés dans les 24 heures et remis en liberté s’ils étaient innocents.

Mme de Motteville (Mémoires, page 156) :

« Mademoiselle fit parler au cardinal et le fit prier de travailler à changer l’esprit de la reine sur l’accusation qu’elle faisait contre elle. Chacun pressa Monsieur de devenir bon père et de lui pardonner. Plusieurs personnes parlèrent à l’abbé de La Rivière de la part de Mademoiselle ; et le ministre, {a} qui était bien aise de se faire un mérite envers elle, témoigna désirer de la servir. Le favori de Monsieur {b} suivit ce même exemple ; et comprenant qu’il était juste que son maître prît le parti de la pitié, il oublia ses petits ressentiments pour la servir aussi ; de sorte que l’onzième jour de sa captivité, {c} après de grandes conférences qu’il fallut avoir avec la reine de la part de Monsieur, l’abbé de La Rivière alla porter à Mademoiselle quelques paroles de douceur qui furent accompagnées de grandes leçons et de respectueuses réprimandes sur sa conduite. […]
Dès le même jour de cet adoucissement, {d} Mademoiselle vint voir la reine, qui la reçut froidement. Elle lui dit qu’elle ne devait pas se glorifier d’avoir tenu bon contre son père et contre elle, n’avouant point les fautes qu’elle avait faites ; que ceux qui l’avaient conseillée lui en donneraient sans doute de grandes louanges, mais qu’elle ne devait point se laisser flatter par eux qui ne la conseillaient pas bien ; et qu’elle devait croire que sa faute était grande puisqu’elle la voyait désapprouvée par un aussi bon père que le sien, et par elle, qui l’avait toujours traitée comme sa propre fille. Quelques jours après la paix se fit entièrement par une visite qu’elle eut permission de rendre à M. le duc d’Orléans qui, après une conversation particulière, lui pardonna ces petites fautes. Ensuite de cela, la cour s’occupa de quelque nouvelle matière, celle-là étant déjà trop vieille pour en parler davantage ; et Saujon fut envoyé à Pierre-Ancise, d’où il sortit bientôt après. » {e}


  1. Mazarin.

  2. La Rivière.

  3. En ses appartements.

  4. Vers le 11 mai.

  5. Le 11 mai. Saujon fut bien accueilli par la cour à Saint-Germain en janvier 1649, au début du siège de Paris.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 29 mai 1648, note 52.

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(Consulté le 02/12/2024)

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