À Charles Spon, le 25 octobre 1652

Note [25]

« Cette manière de soigner n’est assurément pas de la médecine, mais bien de la torture ; ou, pour parler comme Asclépiade dans Galien, une véritable préparation à la mort. »

Asclépiade (Ασκληπιαδης, Asklêpiadês, littéralement « fils d’Esculape », v. note [5], lettre 551) de Pruse (en Bithynie), médecin et philosophe grec du iie s. av. J.‑C., fut le praticien le plus célébré de l’Antiquité romaine. Il n’a rien subsisté de ses ouvrages, ce qui est fort regrettable car sa doctrine était vivement opposée à celle d’Hippocrate. On le connaît principalement par tout ce que Pline l’Ancien et Galien (qui, lui, n’a guère laissé de trace dans les écrits de ses contemporains ou des ses proches successeurs, v. note [6], lettre 6) ont dit à son sujet (les références à Asclépiade occupent une page et demie dans l’index de Kühn).

Guy Patin citait ce passage du livre de Galien De venæ sectione adversus Erasistratum [De la phlébotomie contre Érasistrate] (Kühn, volume 11, page 163, traduit du grec) :

Nam dogmaticum novi et Dioclem et Plistonicum et Dieuchem et Menesitheum et Praxagoram et Philotinus et Herophilum et Asclepiadem sanguinem detrahere ; etsi Asclepiades adeo fuerit contentiosus et gloriæ cupidus, ut fere omnia superiorum dogmata submoverit, neque ulli alii qui ante ipsum fuerat, neque Hippocrati pepercerit, ut qui veterum medicinam mortis curationem dicere non sit veritus. Attamen adeo non fuit impudens, ut plane venæ sectionem ex medicis præsidiis eximere sit ausus […].

[Je sais parfaitement que des dogmatiques, tels Diocles, Plistonicus, Dieuchés, Menesitheus, Paraxagore, Philotinus, Hérophile ou Asclepiades ont pratiqué la saignée ; bien qu’Asclepiades ait été si chicaneur et avide de gloire qu’il a rejeté presque tous les dogmes des Anciens et de tous ceux qui l’avaient précédé, sans même ménager Hippocrate, et qu’il n’ait pas craint de dire que leur médecine était un soin de la mort. {a} Il n’a pourtant pas poussé l’impudence jusqu’à oser exclure la phlébotomie du nombre des remèdes médicaux (…)].


  1. La traduction latine de Kühn donne mortis curationem [soin de la mort] et non mortis meditationem [préparation de la mort] ; mais peu importent ces synonymes : ils ont le même sens que le texte original, recourant à l’expression philosophique θανατου μελετην (thanatou mélétên, « inquiétude de la mort »), que Sénèque le Jeune a employée pour parler de l’asthme qui l’affligeait (v. note [2], lettre 661).

Ce passage depuis « On dit qu’en Hollande… » se trouve à l’identique (mais sans le latin) dans une lettre factice datée du 26 août 1654, destinée à Charles Spon dans Du Four (édition princeps, 1683, no lii, pages 174‑175) et Bulderen (no lxxxix, tome i, pages 241‑242), mais à André Falconet dans l’édition Reveillé Parise (no ccccxxvi, tome iii, pages 37‑38).


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 25 octobre 1652, note 25.

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(Consulté le 19/04/2024)

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