À André Falconet, le 18 novembre 1664
Note [1]
Troisième enfant du couple royal, Marie-Anne allait mourir le 26 décembre suivant ; {a}
La Grande Mademoiselle a donné une troublante version de cette naissance tourmentée (Mlle de Montpensier, Mémoires, seconde partie, chapitre vii, pages 14‑15) :
« La reine tomba malade {b} et accoucha à huit mois, ayant de grands accès de fièvre tierce. […] Monsieur {c} me conta l’effroi que l’on avait eu sur la maladie de la reine, le monde qui était au Louvre lorsque l’on lui apporta Notre-Seigneur, et comme M. l’abbé de Gordes, présentement évêque de Langres, son premier aumônier, s’était évanoui d’affliction ; que M. le Prince avait ri, et tout le monde ensuite ; que la reine avait fait une mine (je ne m’en étonnai pas ; quand l’on est dans cet état et que l’on voit rire, on n’est pas trop aise) ; que la fille dont elle était accouchée ressemblait à un petit maure que M. de Beaufort avait amené, qui était fort joli, qui était toujours avec la reine ; que quand l’on s’était souvenu que son enfant y pourrait ressembler, on l’avait ôté, mais qu’il n’était plus temps ; que la petite fille était horrible ; qu’elle ne vivrait pas ; que je me gardasse bien de le dire à la reine, ni qu’elle mourrait. Ces avis étaient assez inutiles : on ne dit guère de ces choses-là, à moins que de vouloir fâcher les gens, et on n’a pas cette intention pour la reine.
J’allais tous les jours au Louvre. Comme elle commença à se mieux porter, elle me conta qu’elle n’avait point été à l’extrémité ; que c’était Mme de Brégy qui avait entré dans sa chambre fort parfumée ; que cela lui avait donné des vapeurs qui lui avaient fait perdre la parole et que pour marque de cela, elle faisait signe que l’on la saignât au pied ; {d} que l’on l’avait fait, et que l’on lui avait donné de l’émétique {e} un peu brusquement ; mais qu’heureusement cela avait réussi ; le chagrin où elle avait été de quoi l’on avait ri lorsque l’on lui avait donné le viatique ; {f} qu’elle sentait bien qu’elle n’était pas en cet état-là ; mais que la reine mère lui ayant proposé de le recevoir, elle n’avait osé le refuser. »
- Ou un peu plus tôt : v. note [11], lettre 802, qui relate aussi les romans qu’on a imaginés sur cette obscure affaire.
- V. note [1], lettre 798, pour l’inquiétante maladie de la reine Marie-Thérèse, mère de Marie-Anne.
- Philippe d’Orléans.
- V. Le point d’honneur médical de Hugues ii de Salins, pour une discussion sur la meilleure manière de saigner dans la fièvre des accouchées.
- Antimoine.
- V. note [15], lettre 251.