À Charles Spon, le 26 octobre 1655, note 10.
Note [10]

Guy Patin continuait ici à fournir d’intéressants compléments à la narration qu’Antoine Vallot a laissée de la gonococcie du roi (v. note [19], lettre 419) qui évoluait depuis mai 1655 et dont le diagnostic resta aussi soigneusement caché que possible. La querelle médicale fut vive. Vallot a voulu justifier sa conduite (Journal de la santé du roi, pages 106‑110) en étoffant son long récit de deux Digressions.

  • Dans la première, sur les eaux de Forges, le médecin proclame que les eaux minérales n’ont pas été responsables de l’aggravation du roi et que la reine avait consenti à leur prescription.

  • Dans la seconde, sur l’incommodité du roi dont j’ai parlé ci-dessus, Vallot s’échine à nier la nature vénérienne du mal qui affligeait son jeune maître :

    « < En délivrer le roi > m’était d’autant plus sensible qu’il était important à sa santé et au bonheur de pouvoir espérer des enfants, ce qui eût été tout à fait impossible si, par une grâce particulière du ciel, je n’avais entrepris courageusement d’arrêter le cours ou plutôt un flux continuel d’une matière séminale corrompue et infectée, non point d’aucun venin que les jeunes gens débauchés contractent ordinairement avec des femmes impudiques, parce que le roi n’avait pour lors couché avec aucune fille ni femme. Ce même mal n’avait point pareillement été produit par des pollutions sales et déshonnêtes, puisque le roi vivait en une chasteté toute pure et sans exemple ; mais je puis dire qu’il y avait deux causes principales qui nous ont donné ces alarmes. La première est la faiblesse des vaisseaux spermatiques que j’ai remarquée avec toute l’exactitude qui m’a été possible et dont il n’est pas nécessaire de donner ici des raisons et des lumières. Il suffit de dire que par mes soins ces parties lui ont été si heureusement rétablies qu’il n’y a personne dans le royaume qui ait plus de sujet que S.M. de se louer d’être si bien sorti d’une infirmité qui lui était naturelle et qui certainement ne se serait point rétablie si je n’en avais eu une particulière connaissance qui m’a obligé de m’y appliquer avec tous les soins imaginables. »

    Cette première explication est totalement obscure. La seconde est risible :

    « L’autre cause qui a fait naître ce flux ou perte continuelle de cette matière séminale corrompue et infectée, de plusieurs couleurs, qui s’échappait continuellement nuit et jour, sans douleur, sans plaisir et sans chatouillement, a été l’action violente que le roi a faite journellement à marcher à cheval et à voltiger lorsqu’il a commencé ses exercices à grande volée. Il a fait aussi des voyages fort rudes et fort longs en des saisons fort incommodes, par les excessives chaleurs et durant la rigueur de l’hiver, faisant gloire d’aller en guerre à cheval et non en carrosse, et préférant les exercices violents à toutes les douceurs et les commodités que S.M. pouvait prendre en plusieurs occasions. Ces raisons suffisent pour expliquer la cause et la grandeur de son mal. »

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 26 octobre 1655, note 10.

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(Consulté le 19/04/2024)

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