À Charles Spon, le 22 mars 1648, note 14.
Note [14]

« Voyez de Thou, au tome v des Histoires de mon temps, dans l’éloge d’Alexandre de Parme » ; livre civ, Henri iv, 1592 (Thou fr, volume 11, pages 569‑570) :

« Peu de temps après, {a} le duc de Parme, afin d’être plus à portée de faire ses préparatifs pour rentrer en France, quitta Bruxelles et se rendit à Arras. Il plaça son quartier dans l’abbaye de Saint-Vaast, où l’incommodité de sa dernière blessure jointe à son ancienne maladie et le déplaisir de voir tomber en décadence les affaires en Flandre, tandis qu’on l’obligeait à porter la guerre dans un royaume étranger, augmentèrent son mal et le réduisirent à l’extrémité. Enfin, le second jour de décembre, sentant que ses forces diminuaient : C’en est fait, dit ce prince, les remèdes sont inutiles. Le comte Côme Mazi, son secrétaire, étant alors entré et l’assurant avec joie qu’il se portait mieux : Travaillons donc, dit-il, tant que mes forces pourront le permettre ; et ayant signé pendant quelque temps des lettres, on le remit sur son lit. Jean Sarafin, abbé de Saint-Vaast, lui ayant administré l’extrême-onction sur le soir, ce prince mourut peu après, âgé de 47 ans.

Ce fut un des plus grands capitaines de notre siècle, qui joignit à la prudence, l’habileté, la vigilance, la fermeté et le bonheur, auquel contribuait encore le souvenir de la duchesse de Parme, sa mère, qui avait gouverné les Pays-Bas avec beaucoup de modération et d’équité, et dont le rappel avait causé le malheur de ces provinces. En mémoire de cette sage gouvernante, les Flamands qui avaient marqué une aversion insurmontable pour l’orgueil et la domination des autres gouverneurs espagnols, dont les succès les jetaient dans le désespoir, voyaient au contraire avec tranquillité les victoires du duc de Parme et se livraient à sa bonne foi. Les Espagnols faisaient assez éclater la jalousie que leur causait cette affection des Flamands. C’est ce qui augmenta le soupçon qu’eurent les peuples qu’il avait été empoisonné ; mais on fut convaincu du contraire à l’ouverture de son corps, et il parut que sa maladie venait du défaut des parties intérieures et qu’il ne pouvait pas vivre longtemps à cause de la faiblesse de son tempérament. Il avait rendu de grands services à l’Espagne, mais la perte de cette flotte qui avait épuisé tant de trésors les avait effacés. {b} Ses envieux répandirent le bruit qu’il n’avait pas voulu secourir cette flotte avec des vaisseaux plats, dans le temps qu’elle luttait contre les vents ; ce qui l’avait fait soupçonner de vouloir plutôt prolonger que terminer la guerre, et d’avoir conçu de la jalousie de ce qu’on avait confié à un autre {c} qu’à lui l’expédition d’Angleterre. Ses succès en France avaient en quelque façon écarté ces soupçons ; il y avait fait lever le siège de Paris et de Rouen, et s’était acquis par là une telle réputation qu’on ne croyait rien au-dessus de son habileté militaire. Il était sorti avec honneur de la lice où il était entré avec un grand roi, {d} qui n’était pas moins bon capitaine et accoutumé à vaincre. Il mourut, pour ainsi dire, dans la fleur de ses succès. On ne put jamais lui rien reprocher du côté de la fidélité pour son prince {e} ni du côté de la guerre, ce qui mit le comble à son bonheur. On lui fit une magnifique pompe funèbre à Arras. »


  1. Le 8 novembre 1592.

  2. Invincible Armada (1588, v. note [8] du Borboniana 10 manuscrit).

  3. Le marquis de Santa Cruz.

  4. Henri iv.

  5. Philippe ii.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 22 mars 1648, note 14.

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(Consulté le 02/12/2024)

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