Autres écrits : Ana de Guy Patin :
L’Esprit de Guy Patin (1709),
Faux Patiniana II-4, note 52.
Note [52]

En y leurrant curieusement le lecteur avec Empédocle, {a} cet article paraphrase le chapitre lxv, livre ii du traité de Cicéron de Divinatione [sur la Divination] :

Defert ad conjectorem quidam somniasse se ovum pendere ex fascea lecti sui cubicularis (est hoc in Chrysippi libro somnium) ; respondit conjector thesaurum defossum esse sub lecto. Fodit, invenit auri aliquantum, idque circumdatum argento ; misit conjectori quantulum visum est de argento. Tum ille “ Nihilne ” inquit “ de vitello ? ” Id enim ei ex ovo videbatur aurum declarasse, reliquum argentum. Nemone igitur umquam alius ovum somniavit ? Cur ergo hic nescio qui thesaurum solus invenit ? Quam multi inopes digni præsidio deorum nullo somnio ad thesaurum reperiendum admonentur ! Quam autem ob causam tam est obscure admonitus, ut ex ovo nasceretur thesauri similitudo, potius quam aperte thesaurum quærere juberetur, sicut aperte Simonides vetitus est navigare ? Ergo obscura somnia minime consentanea majestati deorum.

[Un quidam rapporte à un interprète {b} qu’il a vu en rêve un œuf pendu aux sangles de son lit (ce rêve est raconté dans le livre de Chrysippe). {c} L’interprète répond qu’il y a un trésor caché sous ce lit. Le songeur creuse et trouve une certaine quantité d’or avec de l’argent tout autour. Après quoi, il envoie au devin une partie de l’argent, tout juste assez pour ne pas avoir l’air de vouloir tout garder. « N’aurai-je donc rien du jaune ? », dit alors l’interprète pour qui cette partie de l’œuf apparu en rêve représentait l’or et le reste l’argent. Aucun autre homme n’a-t-il donc fait ce rêve d’un œuf ? Pourquoi cet inconnu est-il le seul qui ait trouvé un trésor ? Combien d’indigents méritant d’être secourus par les dieux n’ont jamais fait un songe pouvant les conduire à la découverte d’un trésor ? Et pourquoi un avis si obscur : cet œuf qui devient un trésor ? Pourquoi l’homme ainsi favorisé n’a-t-il pas été clairement invité à chercher le trésor, tout de même qu’il fut clairement enjoint à Simonide de ne pas s’embarquer ? {d} Ces songes obscurs me paraissent très peu compatibles avec la majesté des dieux]. {e}


  1. V. première notule {b}, note [32] du Faux Patiniana II‑3.

  2. C’est cet interprète des rêves que L’Esprit de Guy Patin a qualifié de « prophète onirocisique », sic pour onirocritique, « titre qu’on a donné à ceux qui ont jugé des événements par les songes » (Furetière).

  3. Chrysippe de Soles ou de Tarse, philosophe stoïcien grec du iiie s. av. J.‑C. Dans la liste de ses ouvrages, Diogène Laërce ne mentionne pas de liber somnium [livre des songes], mais Cicéron a plus longuement commenté cet ouvrage dans le chapitre xx du de Divinatione.

  4. Cicéron parle ailleurs (livre i, chapitre xxvii) du rêve que fit le poète Simonides : ayant trouvé un homme mort sur le bord d’un chemin, il l’avait dignement enseveli ; cet inconnu lui réapparut en rêve pour lui défendre de s’embarquer sur un navire qui, de fait, fit naufrage pendant sa traversée.

  5. Traduction de Charles Appuhn, 1936.

Je peine à croire Guy Patin capable d’un aussi piètre plagiat masqué de Cicéron.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
L’Esprit de Guy Patin (1709),
Faux Patiniana II-4, note 52.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=8217&cln=52

(Consulté le 25/04/2024)

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