À Charles Spon, le 29 avril 1644, note 9.
Note [9]

Dicæologie, ou défense justificative pour Me Gaspard de Monconys, pourvu de l’office de lieutenant criminel en la sénéchaussée et siège présidial de Lyon, par la résignation de Me Pierre de Monconys, son père, sieur de Liergues, contre l’étrange, horrible et prodigieuse calomnie de Mes Claude Bernard, assesseur, Nicolas de Masso, Claude Terrat, conseillers, et Jacques d’Aveyne, substitut de M. le procureur général audit siège. Par Me Sébastien Roulliard, de Melun, avocat en Parlement (Paris, sans nom, 1620, in‑4o, 154 pages). Dicæologie est un latinisme (dicæologia, du grec dikaiologia) : figure de rhétorique par laquelle on fait ressortir la justice (dikaios) d’une chose.

En 1619, des concurrents jaloux avaient accusé Gaspard de Monconys d’avoir commis sous un nom d’emprunt un crime ignominieux pour lequel on l’avait lourdement condamné :

« Aussi tous les esprits qui, parmi l’obscurité de la calomnieuse accusation dont il s’agit à présent, ont entendu parler de l’effroyable vacarme divulgué çà et là d’un Gaspard de Monconys, travesti sous le nom d’un supposé François Louis, accusé l’an 1612, vers le mois de juillet, pour sacrilège commis en l’abbaye de Saint-Denis-en-France et condamné premièrement à mort puis par appel, à neuf ans de galères ; qui se sont en outre laissé dire que furtivement on l’ait soustrait d’icelles par l’artifice de même pseudonymie ou emprunt de faux nom ; bref qui ont ouï raconter au long cette fable et imposture ».

L’affaire avait été déterrée en 1617 quand Pierre de Monconys décida de démissionner de sa charge pour la transmettre à son fils Gaspard :

« Donc le fils ainsi pourvu s’étant mis sur les termes de se présenter et faire recevoir en la Cour, et le bruit en étant venu aux oreilles de Mes Claude Terrat, Nicolas Masso, et Claude Bernard, qui lors séjournaient en cette ville, {a} plutôt par contrainte d’affaires que de leur volonté, aussitôt ils conjurèrent d’y mettre empêchement, poussés à ce de la malignité de leur naturel et de cette envie canine quæ impedit, non ut ipsa fruatur, sed ne quis alius. » {b}


  1. Paris.

  2. « qui fait obstacle non pour en jouir elle-même, mais pour que nul autre n’en jouisse » (Pline le Jeune, Panégyrique de Trajan, chapitre l).

Un dénommé Jacques d’Aveyne s’étant joint aux autres accusateurs :

« La propre fête de l’Assomption de Notre-Dame en août 1617, au lieu d’élever leurs esprits au ciel pour méditer sur la candeur et pureté de celle qui avait si hautement frayé les voies de salut, tout à rebours {a} venant à s’enfondrer {b} aux abîmes de leur perdition, ils s’en vont en hâte à Saint-Denis {c} vers le bailli, le trouvent opportunément en son hôtel, là lui remémorent ce qu’ils disent avoir entendu s’être passé en juillet et août 1612 au fait de l’accusation et condamnation de ce François Louis, de son appel, de sa conduite, et écroué aux prisons de la Conciergerie de Palais ; et comme, par arrêt subséquent du 7e de septembre, la Cour, infirmant la sentence d’icelui bailli de Saint-Denis, aurait converti la peine de mort en neuf ans de galères. Lui remontrent que ce François Louis qui s’était dit natif de Vuarmes {d} près Nevers, était Gaspard de Monconys, fils du lieutenant criminel de Lyon, qui avait eu la ruse de changer son nom pour ne point déshonorer sa gent et sa famille ; qu’icelui bailli le pouvait bien croire par l’adoucissement de la peine d’icelui, attendu que sans de grandes et puissantes recommandations la Cour vraisemblablement n’eût sauvé la vie au coupable d’un sacrilège si exorbitant et si qualifié […] ; enfin lui proposent que si venant par eux à lui livrer ce vrai Monconys entre mains, il voulait entendre à lui faire son procès tant pour avoir supposé son nom que rompu le ban de sa cadène, {e} dont les neuf ans n’étaient encore échus ni expirés ; outre l’obligation qu’ils lui en auraient, l’or ni l’argent ne lui manqueraient de leur part. »


  1. Au contraire.

  2. Se briser.

  3. V. note [27], lettre 166.

  4. Sic.

  5. Chaîne attachant un galérien.

D’Aveyne avait alors abusé de la confiance de Monconys pour l’emmener à Saint-Denis, où le bailli prévenu s’était saisi de lui, qui éprouva toutes les peines du monde à se disculper. Sans avoir nulle part révélé la nature du sacrilège commis à Saint-Denis en 1612, la diatribe s’achève sur quatre vers :

« Fausse et horrible calomnie,
Je t’ai fait ici avorter,
Afin de pouvoir conforter
L’innocent te voyant punie. »

Imprimer cette note
Citer cette note
x
Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 29 avril 1644, note 9.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0104&cln=9

(Consulté le 07/12/2024)

Licence Creative Commons