< L. latine 35.
> À Johann Georg Volckamer, le 9 avril 1655 |
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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. –
À Johann Georg Volckamer, le 9 avril 1655
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[Ms BIU Santé no 2007, fo 30 ro | LAT | IMG] Très distingué Monsieur, [a][1] Bien que je n’aie ici rien qui mérite de prendre la plume, voici pourtant que j’écris pour vous faire savoir que je suis en vie et me porte bien, entièrement disposé à tout genre de service et de déférence toutes les fois que vous voudrez. Mais tandis que rien ne se présente à vous dire, voici un petit vers de Martial, parfaitement troussé, mais aussi parfaitement vrai, qui vient à mon secours : Au lieu de vous récompenser de tant de services que vous m’avez rendus par ci-devant, me voici en effet qui vous confie et assigne une nouvelle tâche, pour ne pas dire un fardeau : si vous voulez bien, je vous charge d’une autre commission, qui est de m’envoyer, s’il vous plaît, quelques livres publiés en Allemagne, car l’envie de les posséder me tenaille vivement ; mais ce désir m’a si promptement pris que je m’en ouvrirai à vous en quelques lignes. De ratione ditescendi, qui est un petit livre d’un écrivain de chez vous, Johann Paul Felwinger, [2][3] m’est par hasard tombé entre les mains ; tandis que je le feuilletais, comme j’en ai l’habitude, j’y ai découvert les noms de certains auteurs, dont voici la liste que je vous transmets ; [3] et j’implore votre générosité afin que vous me les obteniez, si faire se peut. Vous en recevrez le paiement par notre ami, M. Picques, [4] et me lierez à vous par une insigne faveur, quoique vous y soyez accoutumé. Il ne paraît chez nous aucun nouveau livre de médecine, hormis trois qui sont écrits en français, contre la malignité de l’antimoine et sa nature vénéneuse. [4][5] Prescrit par certains chimistes, c’est de son fait que tant de gens, et parmi eux certains excellents hommes, ont malheureusement péri victimes du massacre ; à tel point que, les dieux me pardonnent, ces philosophi per ignem ont entièrement succombé et misérablement anéanti leur réputation ; [5][6] chacun éprouve ici grande aversion pour ce poison paracelsiste et s’estime incapable de le tolérer. [7] On dit qu’on imprime les œuvres de Paracelse en deux tomes in‑fo à Genève, qui est Cologny. O mores ! o tempora ! [6][8][9] Des imprimeurs vont chercher les œuvres d’un si grand vaurien et d’un tel banqueroutier, quand les meilleurs livres gisent honteusement et végètent dans l’oubli, au plus grand dam de la république des livres. Je n’ai eu aucune nouvelle de Thomas Bartholin. Puisse-t-il être en vie et se bien porter, et publier quelque ouvrage comme il en a coutume. [10] Notre Riolan est en vie, mais ne se porte pas bien. Il est tourmenté tantôt par la fièvre et l’ophtalmie, tantôt par la goutte ; son petit corps est si faible, et soumis à l’opiniâtreté des études laborieuses et à quantité de maladies liées au grand âge. [11][12][13] J’exerce ma charge de professeur royal et, depuis la harangue inaugurale que j’ai donnée en public, j’enseigne trois fois par semaine au Collège royal de Cambrai. [14][15][16] J’apprends qu’on imprime à Genève l’Hippocrate grec et latin de Foës, [7][17][18] et qu’à Lyon on achève la nouvelle édition in‑fo des œuvres de Van Helmont, [8][19] qui est un autre misérable novateur et aussi un vieux renard de la pire espèce ; je ne me serai pas grandement fourvoyé quand je le mettrai sur le même pied que Paracelse. Nous aurons dans quelques mois une nouvelle édition des œuvres complètes de M. Sennert, revue et bien meilleure ; elle s’achève à Lyon en seulement deux tomes, certes de plus petits caractères, mais belle pourtant ; j’entends le Lyon des Celtes, et non celui des Bataves. [9][20] Je me réjouis d’une telle édition, car j’honore et j’admire cet auteur qui est, après Thomas Éraste [21] et notre ami le bien méritant Caspar Hofmann, [22] comme une grande étoile et une éminente gloire de votre Nation. Je pense vraiment qu’on doit le placer loin devant tous les autres écrivains médicaux modernes qui ont enseigné l’art tout entier et l’ont embrassé en un seul et même ouvrage. Que font vos savants, MM. Conring, Rolfinck et Schelhammer ? [23][24][25] Vous les saluerez, s’il vous plaît, de ma part, tout comme vos professeurs, MM. Nicolaï et Hoffmann. [26][27] Vale, très distingué Monsieur, et aimez-moi, aussi longtemps que l’avenir vous sourira. Vôtre de toute mon âme, Guy Patin, docteur en médecine et professeur royal. De Paris, le 9e d’avril 1655. [10] [Ms BIU Santé no 2007, fo 31 vo | LAT | IMG] Calixtus in harmonia sua. [11][28] | |||||||||||||
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Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr | |||||||||||||
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