Je vous envoie un récit nouveau que je n’ai pu lire tout entier sans rire, je crois que vous en ferez autant ; vous y verrez un bel échantillon des bagatelles que le temps présent nous fournit et deliria morientis sæculi. [1][2][2]
Pour ce qui est de Jean Liébault, [3] c’était un médecin bourguignon qui ne fit jamais ici fortune. Il était gendre de Charles Estienne, [4] qui mourut accablé de dettes dans le Châtelet. [2][5] Après cette mort, Liébault s’en alla mourir à Dijon, son pays. Sa femme s’appelait Nicole Estienne, [6] elle était nièce du grand Robert Estienne, [7] lequel quitta Paris après la mort de François ier, [8] se voyant privé de son bon maître et persécuté par les sorbonistes, [9] pour se retirer à Genève. Ce livre de la Maladie des femmes, de Liébault, n’est qu’une traduction de Marinellus, [10] qui l’avait fait en italien sous le titre de la Commare. [3][11][12]
On imprime ici l’Apologie des médecins de M. Lussauld. [13] Si M. Amyraut [14] daigne se donner la peine de répondre à ce livre, il est homme à dire là-dessus de belles choses que Lussauld ne sait point, et qui ne sont point dans son livre. Je lui en ai suggéré quelques-unes et entre autres, de beaux passages et de bonnes autorités, mais il n’en a pas fait cas ; aussi est-il d’une province qui n’est pas loin du pays d’Adieusias, [15] où ils sont plus glorieux que savants et ne manquent pas de vanité ; ainsi serait-ce contre la raison et même contre le droit des gens, qu’un Poitevin presque Gascon voulût apprendre quelque chose d’un Picard qui est sorti de la garenne des sots. [16][17]
Nos viles pulli, nati infelicibus ovis ;
Vervecum in patria, orasioque sub aere nati. [4]
Pour le nouveau catalogue de Francfort, [18] je n’y trouve rien. Les Allemands ne prennent point le chemin de faire quelque belle production pour le salut du genre humain, ils se laissent trop emporter à leur génie et aux belles promesses de la chimie. [19] Je vous baise les mains, et à votre famille.
De Paris, ce 3e de juillet 1663.