L. latine 1.  >
À Johann Caspar I Bauhin,
le 3 juillet 1635

[Universitätsbibliothek Basel, cote Frey-Gryn Mscr II 18:Nr. 63 | LAT | IMG]

Très distingué Monsieur, [a][1]

Je ne sais à quel mauvais sort je dois de n’avoir reçu aucune lettre de vous depuis un an, ni vous, aucune des miennes, bien que j’aie écrit mainte et mainte fois, et que de trop fréquentes lettres m’eussent rendu impertinent, eu égard à votre supériorité sur moi. Je ne puis que rejeter le fléau d’un si grand malheur sur cette période de guerres, parce que tout est partout en flammes, et qu’il en va de même pour les lettres que nous envoyons d’ici à Rome ou que nous en attendons, la plupart d’entre elles étant interceptées. [1][2] Quand j’aurai appris que M. Zur Matten [3] aura quitté Rome et sera de retour en sa patrie, alors je vous écrirai plus sûrement et plus souvent par son intermédiaire, vous envoyant de plus fréquentes lettres pour vous assurer que je suis tout à vous. J’ai reçu votre dernière par M. Durninger de Colmar ; [2][4] par égard pour vous, je l’aiderai en tout ce que je pourrai, car c’est un jeune homme très savant et digne de la meilleure fortune. Je déplore de ne pas avoir ici un endroit où je puisse l’accueillir pendant le temps qu’il résidera en cette ville (car il songe à se rendre en Angleterre). Sachez du moins qu’il m’est extrêmement recommandé, à cause de notre amitié et de sa propre gentillesse. Les Espagnols ont récemment armé une très grosse flotte dans la mer d’Italie, avec de nombreuses troupes, pour envahir notre France ; mais Dieu, qui est très bon et très grand, a réduit leur tentative à néant, il a foudroyé et dispersé leurs armées et toutes leurs trirèmes en un insigne naufrage. Un ami en a écrit ces vers :

De classis Hispanicæ, in Galliam instructæ naufragio, ann. 1635.

Imperio metas quisquis vel ponit Ibero,
   Vel negat Austriaco subdere colla jugo,
Protinus hæreticum gravis illum censor Iberus
   Esse iubet ; Mauris adnumeratque suis :
Sic vetat infestum quod crescere Francus Iberum,
   Hæresos Francum clamitat esse reum :
Sic Patrem Ausonium, quod non famulatur Ibero,
   Hæreseos certas iurat habere notas :
Ecce Deus pelago classem modo mersit Iberam,
   Restat ut hæreticum sentiat esse Deum
[3]

J’ai appris la mort de M. Thomas Platter et déplore le sort malheureux de cet homme de bien. [5] Quand vous écrirez à M. Sennert, saluez-le s’il vous plaît de ma part. [4][6] Et pour tous ces bienfaits, vous me tiendrez pour entièrement attaché à vous, moi qui désire rester, χρησει και κτησει, [5][7]

votre Patin pour l’éternité.

De Paris, le 3e de juillet 1635.



Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Johann Caspar I Bauhin, le 3 juillet 1635

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(Consulté le 14/12/2024)

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