À Nicolas Belin, le 24 octobre 1646, note 1.
Note [1]

Les thèses dont Guy Patin parlait ici n’étaient pas les cardinales de Nicolas Belin lui-même (sans trace imprimée), mais celles de son oncle Sébastien qui venait lui aussi d’achever ses études médicales à Montpellier (sans nom, in‑4o de 8 pages) :

Q.B.V.D. {a} Quæstiones quatuor cardinales, consequenda, propositæ ab illustrissimis viris, Domino, D. Richerio de Belleval, Regis Consillario et Medico, necnon in alma Monspeliensium Medicorum Academia Professore Regio, Anatomico, Botanico, Cancellario amplissimo, et Iudice æquissimo, et Domino, D. Simeone Curtaudo, Regis Consilario et Medico, eiusdemque Academiæ Decano reverendo. Quibus accesserunt assertiones, problemata et paradoxa, quorum omnium veritatem (Deo favente) per triduum integrum publice tueri conabitur Sebastianus Belin, Trecensis, artium magister, et Medicinæ licentiatus. Disputantibus Cancellario amplissimo, Decano reverendo, professoribus regiis illustrissimis, doctoribus aggregatis meritissimis, doctoribus, licentiatis, baccalauræis et Medicinæ studiosis, diebus scilicet 30. et 31. Iulii, et 1. Augusti, anni 1646. In augustissimo Monspeliensis Apollinis Fano. A.R.S.H. m.dc.xlvi.

[Que Dieu veuille y accorder le succès. Quatre questions cardinales, pour obtenir le laurier suprême d’Apollon, {b} proposées par les illustrissimes Maître Richer de Belleval, conseiller et médecin du roi, et aussi professeur royal d’anatomie et botanique en l’Université de médecine de Montpellier, magnifique chancelier et juge très équitable, et Maître Simon Courtaud, conseiller et médecin du roi, vénérable doyen de la même Université. Avec les affirmations, problèmes et paradoxes dont Sébastien Belin, natif de Troyes, maître ès arts et licencié de médecine, a publiquement entrepris d’examiner la vérité (Dieu aidant) pendant trois jours entiers ; savoir les 30 et 31 juillet, et 1er août de l’an 1646. Les disputants ont été le magnifique chancelier, le vénérable doyen, les illustrissimes professeurs royaux, les très méritants docteurs agrégés, les licenciés, les bacheliers et les étudiants en médecine. À Montpellier, dans le très auguste temple d’Apollon. 1646].


  1. Quod bene vertat Deus.

  2. Dieu de la médecine, v. note [8], lettre 997.

Les titres des quatre cardinales sont :

  1. An dysenteriæ lactis usus ? [L’emploi du lait convient-il dans la dysenterie ?] (affirmative) ;

  2. An circa initia et fines morborum, remissiora sint omnia, circa statum vehementiora ? [Tout est-il plus calme au commencement et à la fin des maladies, mais plus agité à leur phase d’état ?] (affirmative) ;

  3. An somnus catarrho conferat ? [Le sommeil produit-il le catarrhe ?] (affirmative) ;

  4. An senes minus quam iuvenes ægrotent ? [Les vieillards sont-ils moins malades que les jeunes ?] (affirmative).

Sont seulement fournis les titres généralement gaillards voire paillards (à la mode de Montpellier) de :

  • sept Assertiones

    1. Vinum alimentorum optimum [Le vin est le meilleur des aliments] ;

    2. Vinum acuit ingenium [Le vin aiguise l’intelligence] ;

    3. Vinum lætificat cor hominis [Le vin réjouit le cœur de l’homme] ;

    4. Sine Baccho et Cerere friget Venus [Vénus est froide sans Bacchus et Cérés] ;

    5. Bacchi et Veneris arthritis filia [La goutte est fille de Bacchus et de Vénus] ;

    6. Meri potio cynorexiæ [Boire du vin pur soigne la faim effrénée] ;

    7. Vinum absinthites imbecillitati ventriculi [Le vin d’absinthe soigne la faiblesse d’estomac]) ;

  • huit Problemata

    1. An turpe obiectum sit remedium amoris ? [Une chose laide serait-elle un remède de l’amour ?] ;

    2. An philtris concilietur amor ? [L’amour serait-il procuré par les philtres ?] ;

    3. An cum clauda et claudicante sit maior viro voluptas ? [Un homme tirerait-il plus de volupté d’une femme qui boite ?] ;

    4. An a prima Venere vocis mutatio ? [La mue de la voix proviendrait-elle du premier rapport sexuel ?] ;

    5. An a cibo aut ante cibum Venus ? [Vaut-il mieux faire l’amour avant ou après le repas ?] ;

    6. An morbis a pituita coitus commodus ? [Le coït convient-il dans les maladies causées par la pituite ?] ;

    7. An turpis scortatio dysenteriæ medela sit ? [La débauche éhontée serait-elle un remède de la dysenterie ?] ;

    8. [Les jeunes filles de Montpelleier seraient-elles plus fécondes que les autres ?]) ;

  • et sept Paradoxa

    1. Vinum aqua salubrius [Le vin est plus salubre que l’eau] ;

    2. In vino veritas [La vérité est dans le vin] ;

    3. Vinum vini noxam tollit [Le vin soulage la gueule de bois] ;

    4. Vinum famem non solvit [Le vin ne dissipe pas la faim] ;

    5. Vino forma perit [Le vin détruit la beauté] ;

    6. Vinum phreneticis concedendum [On doit autoriser le vin aux fous] ;

    7. Vinum ægris non denegandum [On ne doit pas interdire le vin aux malades]).

A. Germain, Les anciennes Thèses de l’École de médecine de Montpellier. Collations de grades et concours professoraux (Montpellier, Boehm et fils, 1886, pages 8‑9) :

« Notre École de médecine {a} se distinguait par des pratiques non moins dramatisées. {b} On y avait seize épreuves à subir avant d’être proclamé docteur, indépendamment de celle de maître ès arts, garantie obligatoire d’études classiques préalables. L’épreuve du baccalauréat durait quatre heures à elle seule. {c} Quand ensuite le bachelier voulait, après les trois mois de cours publics qui lui étaient imposés à titre de stage et de noviciat, prendre le grade de licence, on l’admettait à se présenter aux quatre examens per intentionem, ainsi qualifiés parce qu’on les subissait avec l’intention d’arriver à la licence, per intentionem consequendi licentiam. Ces quatre examens se passaient publiquement devant quatre professeurs. Ils étaient suivis d’un cinquième examen à huis clos, dit rigoureux, pendant lequel on avait à répondre à tous les professeurs, docteurs et licenciés en médecine, après 24 heures de préparation, sur des textes de Galien et d’Hippocrate tirés au sort. Une fois admis, on allait recevoir la licence des mains de l’évêque ou de son vicaire général : on était conduit et ramené par les professeurs en costume et par les autres membres de l’École désireux de s’associer au cortège. Puis venaient les triduanes, nouvelles épreuves qui avaient lieu matin et soir durant trois jours, comme le mot l’indique. On y discutait quatre questions, dites cardinales, fixées à l’avance par le jury, et imprimées pour en rendre plus commode et plus précise l’argumentation. {d} Le doyen et les professeurs y ajoutaient, selon leur convenance, divers articles médicaux, problèmes et paradoxes, à étudier par surcroît. Il était bien permis, au bout d’un tel enchaînement d’épreuves, de qualifier le doctorat d’“ acte de triomphe ” (actus triumphalis). » {e}


  1. L’École de Montpellier était aussi appelée Université médicale, mais dédaignait ordinairement le titre de Faculté de médecine.

  2. Synonyme maladroit de « solennelles ».

  3. Contre une semaine entière à Paris, où il était suivi de deux pleines années de préparation à la licence, durant lesquelles le bachelier devait soutenir ses trois thèses (deux quodlibétaires et une cardinale, obligatoirement imprimées, v. note [1], lettre 1).

  4. L’Université médicale de Montpellier, contrairement à la Faculté de Paris, n’exigeait pas l’impression des thèses disputées par ses étudiants, ce qui rend aujourd’hui impossible leur recensement précis (Dulieu).

  5. Astruc (page 88) :

    « Les cérémonies du doctorat, qu’on pratique à Montpellier et qui sont établies par un usage presque aussi ancien que la Faculté, consistent : 1. à donner le bonnet ; 2. à mettre au doigt une bague d’or ; 3. à ceindre le docteur avec une ceinture d’or ; 4. à lui présenter le Livre d’Hippocrate ; 5. à le faire asseoir dans la chaire à côté du professeur ; 6. à l’embrasser ; 7. enfin, à lui donner la bénédiction. On accompagne chacune de ces cérémonies d’un petit discours qui en explique la valeur et la signification. »


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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Nicolas Belin, le 24 octobre 1646, note 1.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0139&cln=1

(Consulté le 29/03/2024)

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