À Charles Spon, le 12 octobre 1643, note 2.
Note [2]

Jean Duvergier de Hauranne, abbé de Saint-Cyran (Bayonne 1581-Paris 11 octobre 1643) appartenait à une opulente famille basque. Après une formation chez les jésuites d’Agen puis de Louvain, il s’était plongé dans l’étude des Pères de l’Église à la Sorbonne. En 1609, il avait fait la connaissance de Cornelis Jansen (Jansenius, v. note [7], lettre 96), étudiant en théologie à Louvain, et ils vécurent sous le même toit jusqu’en 1616 afin de mieux travailler ensemble. Placé sous la protection de l’évêque de Poitiers, Henri-Louis de La Roche-Pozay (v. note [6], lettre 266), Duvergier de Hauranne s’était fait ordonner prêtre en 1618 et avait reçu en 1620 l’abbaye de Saint-Cyran (à Saint-Michel-en-Brenne, dans le département de l’Indre). Installé à Paris, il était nommé aumônier honoraire de Marie de Médicis et faisait connaissance avec la cour. En 1622, il avait abandonné tout son patrimoine pour s’attacher à la personne du cardinal Pierre de Bérulle, fondateur de l’Oratoire.

En 1624, Saint-Cyran avait eu ses premiers contacts avec les religieuses de Port-Royal-des-Champs et avait entrepris, en attaquant un ouvrage du P. Garasse dirigé contre Bérulle, les grandes querelles qui l’ont opposé aux jésuites pendant tout le restant de sa vie. En 1632, il dénonçait sous le pseudonyme de Petrus Aurelius (v. note [9], lettre 108) l’orgueil de la Compagnie de Jésus, son mépris de la vieille Faculté de Paris, sa casuistique et sa piété surtout faite de pratiques extérieures.

Opposé de plus en plus ouvertement aux conceptions théologiques (contrition et attrition) et politiques (validité du mariage secret de Gaston d’Orléans avec Marguerite de Lorraine) de Richelieu, Saint-Cyran s’en était fait un ennemi résolu qui finit par le faire emprisonner à Vincennes en mars 1638. Malgré sa détention prolongée, Saint-Cyran avait continué d’animer et d’inspirer Port-Royal, dont en 1637 il avait instauré les Petites Écoles et recruté les premiers solitaires.

L’Augustinus, ouvrage posthume de Jansenius paru en 1640 (v. note [7], lettre 96), allumait la grande querelle sur la grâce et donnait naissance au jansénisme, dont Saint-Cyran, épaulé par Port-Royal, s’affirma l’ardent défenseur. L’Inquisition romaine avait condamné l’ouvrage en 1641, entraînant le jansénisme naissant dans la suspicion. Libéré le 6 février 1643, Saint-Cyran s’était trouvé au cœur de la querelle, avivée par la publication, la même année, de la bulle In Eminenti (19 juin) et du livre d’Antoine ii Arnauld, De la fréquente Communion (août) ; mais épuisé par sa longue détention et par une récente opération des hémorroïdes, le réformateur de Port-Royal s’était éteint le 11 octobre.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 12 octobre 1643, note 2.

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(Consulté le 19/04/2024)

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