Autres écrits : Ana de Guy Patin :
L’Esprit de Guy Patin (1709),
Faux Patiniana II-4, note 33.
Note [33]

Dans le langage dogmatique, le dictamen rationis est « le commandement de [ce que dicte] la raison » ou de la conscience (dont les cas difficiles étaient soumis à l’arbitrage des casuistes).

Si Guy Patin est la source de cet article de son Esprit, il a pu lui être inspiré par ce passage de La Démonomanie des sorciers… de Jean Bodin, {a} livre quatrième, chapitre v, page 246 ro :

« Quand vous verrez porter des images sur les épaules pour les faire révérer, vous direz en vos cœurs : “ C’est à toi, ô Dieu éternel, à qui l’honneur appartient. ” Ainsi faisaient plusieurs en la primitive Église, qui assistaient, ou par force ou par crainte, aux sacrifices des païens où, pour éviter {a} au scandale qu’on ne les estimât athéistes, ores qu’ils {b} fussent à genoux devant les images, ils priaient Dieu néanmoins à ce qu’il lui plût les garder de toute pollution et idolâtrie, et qu’il prît en gré la conscience bonne, tant d’eux que des pauvres ignorants. Je conclus donc que la volonté et intention, d’une part et d’autre, est le fondement de toute action, bonne ou mauvaise ; en sorte que si la volonté contrevient à ce que la raison juge et croit être bon, encore que {c} la raison soit abusée, on offense Dieu. C’est la décision de Thomas d’Aquin au traité qu’il a fait de Bonitate actus interioris voluntatis, où il dit ainsi : Quando ratio errans ponit aliquid ut preceptum Dei, tunc idem est contemnere dictamen rationis et Dei preceptum : suivant de saint Augustin. » {d}


  1. Paris, 1580, v. note [25], lettre 97.

  2. Échapper.

  3. Quoiqu’ils.

  4. Bien que.

  5. Somme théologique (v. note [24], lettre 345), première partie de la seconde partie, question 19, article 5, « sur la Bonté d’un acte de la volonté intérieure » :

    Præterea, secundum Augustinum, inferioris potestatis præceptum non obligat, si contrarietur præcepto potestatis superioris, sicut si proconsul iubeat aliquid quod imperator prohibet. Sed ratio errans quandoque proponit aliquid quod est contra præceptum superioris, scilicet Dei, cuius est summa potestas. Ergo dictamen rationis errantis non obligat. Non est ergo voluntas mala, si discordet a ratione errante.

    [D’après saint Augustin, {i} le précepte d’un pouvoir inférieur n’oblige pas s’il est contraire au précepte d’un pouvoir supérieur : lorsque, par exemple, un proconsul ordonne ce que défend l’empereur. Or la raison qui se trompe propose une action interdite par le précepte d’un supérieur, qui est Dieu, le Maître suprême. Donc le commandement de la raison n’oblige pas lorsqu’elle se trompe. La volonté n’est donc pas mauvaise lorsqu’elle refuse de suivre la raison erronée].

    1. Peu clair « suivant de saint Augustin » dans le texte de Bodin.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
L’Esprit de Guy Patin (1709),
Faux Patiniana II-4, note 33.

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(Consulté le 19/03/2024)

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