Les Theologica dogmata [Dogmes théologiques] sont l’œuvre théologique principale du P. Denis Petau, jésuite (v. note [6], lettre 54). Quatre tomes ont paru au temps de Guy Patin, entre 1640 et 1655 (Paris, Sébastien Cramoisy, 5 volumes in‑fo), mais l’ensemble (8 tomes) ne fut entièrement publié que bien plus tard, en 1867. Leurs sous-titres sont, dans l’ordre : i. De Deo uno denique proprietatibus agitur [Le Dieu unique et de ses caractères propres] ; ii. De Sanctissima Trinitate [La très Sainte Trinité] ; iii. De Angelis, ac mundi opificio et Ecclesiastica disciplina [Les Anges, le créateur du monde et la discipline ecclésiastique] ; iv. De incarnatione Verbi [L’Incarnation du Verbe].
Ces ouvrages d’exégèse sur les Pères de l’Église valurent à l’auteur deux grandes querelles concernant certaines de ses interprétations.
La première a touché la Trinité (Bayle sur le P. Petau, tome 3, note B, pages 691‑692) :
« < Le P. Petau > avait eu pour but de représenter naïvement la doctrine des trois premiers siècles. Il n’avait point déguisé l’opinion des Pères qui avaient eu de fausses notions sur le mystère des trois personnes. Il ne s’était piqué que de rapporter l’état des choses et d’y joindre les explications les plus naturelles que les mots pouvaient avoir. C’était apprendre au public que plusieurs Pères de la primitive Église avaient débité des faussetés bien absurdes sur la génération du Verbe et sur les mystères annexés à celui-là. Ceci donnait une forte atteinte à l’autorité des Canons du concile de Nicée. On en pouvait conclure que l’article de la Trinité n’est pas un dogme fondamental dans la religion puisque ceux qui avaient erré sur cette matière n’avaient pas laissé d’être sauvés. Les nouveaux antitrinitaires {a} pouvaient tirer de là plusieurs conséquences. Le P. Petau en fut averti et se trouva obligé d’apporter quelque remède à ce mal. Il fit sa Préface dans cette vue : son but, ses motifs passèrent du blanc au noir ; il ne fut plus question que de soutenir l’orthodoxie des Pères, il fallut leur faire amende honorable ; en un mot, il fallut se contredire. »
- Notamment les sociniens et les calvinistes.
La seconde grande dispute a porté sur l’interprétation du libre arbitre chez saint Augustin, et les jansénistes ne manquèrent pas d’en faire leurs gorges chaudes. Bayle cite là-dessus l’Histoire du jansénisme (pour l’an 1651) :
« Le P. Denis Petau, jésuite qui, après avoir enseigné dans ses Dogmes théologiques {a} la doctrine de saint Augustin comme celle de l’Église, que chacun devait suivre, y avait renoncé pour défendre les intérêts et les opinions de sa Compagnie ; < il > entreprit d’expliquer {b} suivant Molina la distinction que met saint Augustin entre la grâce par laquelle on sait, auxilium quo, qui est la grâce efficace, et la grâce sans laquelle on ne peut rien, auxilium sine quo non, qui est la grâce suffisante. {c} Il intitula cet écrit Dissertatio brevis de adiutorio sine quo non et de adiutorio quo ; ad mentem B. Augustini. » {d}
- Tome i, livre ix.
- Tome i, livre x.
- V. note [50], lettre 101.
- « Court essai sur la grâce sans laquelle et de la grâce par laquelle ; en conformité avec la pensée de saint Augustin » (Paris, 1651, Sébastien Cramoisy, in‑8o).
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