L. 500.  >
À Charles Spon,
le 6 novembre 1657

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 6 novembre 1657

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(Consulté le 09/12/2024)

 

Monsieur mon cher ami, [a][1]

Je vous envoyai ma dernière le mardi 16e d’octobre avec trois autres lettres, dont l’une était pour M. Guillemin, l’autre pour M. Falconet et une troisième pour M. Ravaud. Depuis ce temps-là, je vous dirai que j’ai reçu la lettre de M. Robert, [2] votre collègue, à laquelle j’ai déjà fait réponse par ma dernière à vous-même. Si vous prenez la peine de conférer [1] avec lui ce que je vous en ai écrit, comme aussi ce que j’en ai mandé à MM. Guillemin et Falconet, du jour d’hier, vous trouverez qu’il n’y a plus rien à faire de ce côté-là et qu’il ne faut plus prétendre d’accord avec un homme si enorgueilli, tel qu’est votre adversaire qui, au lieu d’entrer en composition de l’argent qu’il vous devrait rembourser, dit qu’il vous fera condamner de lui rendre celui qu’il a baillé et qu’on lui a escroqué ; et tout cela avec feu, flammes, menaces et colère. Serait-ce que cet homme se tiendrait assuré de gagner son procès par quelque mystère caché ? Nolim credere[2] ne serait-ce pas plutôt qu’il s’attend que je le veuille prier plus fort de cet accord ? S’il a cette pensée, il attendra longtemps. Je suis d’avis de ne lui en plus rien dire. Je veux devenir aussi glorieux que lui et par ci-après, je verrai si lui-même ne m’en viendra point parler ; et d’autant que je n’ai autre chose à dire là-dessus, je vous supplie de dire à M. Robert que je n’ai autre chose à répondre à sa lettre, si ce n’est que le sieur Basset [3] me revienne voir et m’en parle le premier, voire plutôt qu’il m’en prie car outre que je lui ai dit à lui-même que je ne lui en parlerai jamais, quand j’aurais besoin de le trouver pour quelque affaire plus pressée, je ne saurais où le prendre car je ne sais où il loge. Et d’autant qu’il ne reviendra peut-être plus céans (que peut-être pour me rapporter mon Silvaticus), je suis d’avis que vous aiguisiez bien vos couteaux et que vous pensiez bien à envoyer ici après la Saint-Martin un bon solliciteur qui tienne bien tête à ce jeune homme, qui ne me parle de son procès et de tout votre Collège [4] que par rodomontades, qui est une marchandise que je ne goûte nullement de personne et qui ne m’effraie guère, car je tiens ici pour tout certain que tel menace qui a grand peur, ou au moins la doit-il avoir ; et quand même (ce qui n’est peut-être pas) il aurait quelque assurance de la bonne volonté de son rapporteur, il ne s’ensuit pas qu’infailliblement il devienne le maître de son affaire. L’injustice ne va pas toujours si vite, il ne faut qu’un homme de bien ad sufflaminandos ceteros[3] et peut-être que l’on en trouvera plus d’un parmi ses juges. Je parle par peut-être car aujourd’hui dans le Palais règne un horrible désordre au jugement des procès, dont l’événement dépend du caprice ou de la malice du rapporteur, qui n’est pas toujours si fort homme de bien que Socrate, [5] Phocion [6] ou Aristide. [4][7]

Ce 21e d’octobre. Le roi est encore à Metz, [8][9] et même l’on dit qu’il n’arrivera ici qu’à la fin de novembre, et que le Mazarin [10] y est fort chagrin, affligé et tourmenté de la goutte [11] et de la gravelle, [12] et même de la fièvre. Je ne doute point que tout cela ne le fâche bien, vu qu’il est en beau train d’aller encore plus loin.

J’ai aujourd’hui vu deux Lyonnais auxquels j’ai parlé de vous. L’un est un jeune homme nommé M. Dandré [13] (j’apprends qu’il est affineur d’or et d’argent, mais il n’est pas si fin en ce métier-là que le Mazarin), [5] qui < vous > a bien reconnu dans votre tableau. [14] L’autre est un homme grasset nommé M. Badol, [15] marchand qui est ici venu vitement, en presse, à cause de la maladie de mademoiselle sa femme, laquelle il a trouvée guérie, ou tout au moins hors de danger. J’en vis hier un autre qui est un bon compagnon nommé M. Cloitrier, [16] il est des bons amis de M. Guillemin et hait fort le sieur Basset. Je pense qu’il est le fils du maître d’hôtel de Mme la maréchale de Villeroy, [6][17] il m’a promis de vous aller voir et de vous faire mes recommandations. M. Ferrus [18] vous a pareillement remarqué et reconnu, placé entre Michel de L’Hospital, [19] chancelier de France, et notre Fernel. [20]

Ce 22e d’octobre. On dit que le Mazarin est toujours malade, que sa pierre lui est tombée du rein dans la vessie, [21] mais qu’il ne l’a pas encore vidée ; qu’il est fort chagrin et fort fâcheux à ses médecins, qui sont Vallot [22] et Esprit. [23] M. Seguin, [24] médecin de la reine, n’est point à la cour, elle lui a donné trois mois de terme pour aller en Poitou y visiter et réformer une abbaye qu’elle lui a donnée et qu’il a obtenue depuis deux ans pro præmio taciturnitatis[7] Vallot et Guénault [25] sont en grosse querelle l’un contre l’autre. Ce dernier se porte mieux, mais on dit qu’il faut qu’il pisse d’heure en heure, si bien qu’il n’est pas encore échappé : is nondum evasit qui sua vincla trahit[8] Si le Mazarin n’amende, je tiens pour certain que l’on enverra quérir ici quelqu’un des nôtres.

Mais enfin, M. Fourmy [26] est arrivé et m’est venu voir, il a reconnu tout à l’heure votre portrait et m’a fort parlé de son Varandæus, duquel je lui ai donné bonne espérance de débit. Ses balles ne sont pas encore ouvertes et n’avons encore rien vu de ses livres ; même, il attend cette semaine par le messager de Lyon des premières feuilles d’une préface que M. Gras lui envoie, il ne faut plus qu’un peu de patience.

Ce 24e d’octobre. Je fus hier enlevé comme le prophète Élie, dans un carrosse, [9][27] pour aller voir un conseiller du Grand Conseil fort malade des poumons à quatre lieues d’ici. À mon retour, j’ai trouvé céans votre lettre, laquelle m’a donné beaucoup de joie en tant que j’y apprends votre bonne santé et le retour de mademoiselle votre femme, de la bonne disposition de laquelle je suis tout consolé, ayant eu peur pour elle par ci-devant, à cause de sa grossesse, dans un si grand et si long voyage. Deo sit laus [et honor in æternum]. [10] Et auparavant que je la quitte et que je passe aux autres articles de votre belle lettre, je vous supplie de lui dire que je lui baise les mains de toute mon affection, et à Mlle Seignoret [28] et aussi à Mlle Buisson, [29] la Genevoise.

Je vous ai mandé par ma dernière que j’ai reçu le Sennertus, je vous remercie du soin qu’en avez eu, vous et M. Devenet. Je ne vois plus le sieur Basset et ne me veux plus mêler de son affaire puisqu’il n’entend pas raison. Je voudrais seulement retenir mon Silvaticus[11] et après cela habeat sibi res suas, vel abeat in Morboniam iste nebulo, qui litibus delectatur[12]

Je n’ai jamais vu le livre de Poitiers qui traite de la rage [30] en français. [13] J’ai vu un Lavenicus criticus d’Avignon in‑4o[14] mais je n’y entends rien. Pour votre Labadie, [31] il a autrefois été carme[32] et puis est devenu janséniste, et a fait rage de prêcher autrefois à Amiens [33] où il était chéri de l’évêque, feu M. de Caumartin ; [34] et puis après, ayant donné des marques d’un esprit mal timbré, changea de religion et se mit de votre parti, s’en alla à Montauban [35] où, après son noviciat, il est devenu ministre. S’il a de la santé du corps, il peut faire de belles prédications car il a bien de l’étude et de l’acquis pour cela ; mais je ne sais s’il est tout à fait bien sage, au moins a-t-il autrefois été fou. [15]

Les nouvelles d’aujourd’hui portent que le roi [36] passera les fêtes de la Toussaint à Metz, et même peut-être la Saint-Martin, propter pertinacem valetudinem purpurati Mazarini[16] D’autres disent qu’il sera à Paris le 15e de novembre et qu’il passera les fêtes à Châlons-sur-Marne. [37]

On fit un nouveau contrôleur général des finances il n’y a qu’un mois, savoir M. Le Tillier [38] qui auparavant était intendant, mais il ne l’a guère gardée : on lui a ôté ladite charge, et a été baillée à M. de Breteuil-Tonnelier, [39] maître des requêtes, et à M. Hervart, [40] qui tous deux en ont donné de bon argent, et plus grande somme que n’avait fait M. Le Tillier. [17] La signora Olympia, [41] belle-sœur du feu pape Innocent x[42] est morte près de Rome. Elle a laissé des sommes immenses d’or et d’argent à ses enfants : c’est que per multos annos potuit gaudere de papatu [18] avec son beau-frère ; voilà où elle a tant gagné, ubi hausit aquas in gaudio de fontibus Salvatoris, et de vulneribus Christi, cuius caro pinguis est Romæ[19][43]

Ce 26e d’octobre. Je viens de rencontrer votre Basset qui m’a demandé si j’avais reçu des nouvelles de Lyon. Je lui ai dit qu’oui et que tout le Collège n’avait point désagréable la médiation que j’avais proposée ; sinon, que tous, tant qu’ils sont, ont résolu de pousser leur bon droit jusqu’au bout contre lui et qu’ils n’y épargneraient rien. Sur quoi il s’est mis en colère en disant qu’il vous ferait bien soutenir tous tant que vous êtes, [20] et que vous verriez dans cinq semaines ; qu’il accommodera bien votre Collège, et qu’il y a dans Lyon cinq récipiendaires qui prendront son parti et se feront recevoir comme lui. Je lui ai dit qu’il n’en serait jamais bon marchand et qu’il avait trop d’ennemis à Lyon. Il m’a aussitôt répondu que les plus méchants seraient morts avant qu’il retournât à Lyon et s’en est allé tout badaud. Petrus currit[21][44][45] laissez-le aller et songez à vous défendre. Cet homme est plaisant et d’une belle humeur : il a un procès et doit tout craindre, il fait tout au contraire, il ne craint rien et menace tout le monde. Melancholici omnia tuta timent[22][46] lui ne craint rien et ne s’épouvante d’aucune menace, et n’a aucune appréhension de ce que je lui propose ; vous diriez qu’il est assuré de gagner son procès et qu’il en a parole de son rapporteur.

Il y en a ici qui disent que le Mazarin n’a été que fort légèrement malade à Metz, mais qu’il a seulement fait semblant de l’être, d’autant qu’il voulait plus longtemps séjourner sur ces confins d’Allemagne. Je ne sais ce que j’en dois croire.

Feu M. de Châtillon, [47] qui fut tué durant le siège de Paris à l’attaque de Charenton, [48] laissa sa femme grosse : [49] c’était un fils [50] qui est mort depuis trois jours à 15 lieues d’ici ; si bien que voilà la race éteinte des Châtillon par cinq chefs, depuis 1572, lorsque l’amiral de Châtillon [51] fut tué cruellement et proditoirement [23] avec plusieurs autres, le 24e d’août, fête de Saint-Barthélemy. [52] Il est ici mort un vieux partisan nommé M. de Cornuel, [53] qui était fort âgé et qui était frère de cet intendant Cornuel [54] qui a fait autrefois tant parler de soi. [24]

M. Du Prat [55] me vint hier voir céans et lui ai promis de vous faire ses recommandations. Il est gaillard, il dit que M. Pecquet [56] s’amuse à distiller des eaux minérales de diverses fontaines et qu’il ne fait autre chose, et qu’il n’écrit rien du tout. Aussi n’en est-il pas capable : c’était un jésuite qui lui fit son premier livre et un autre, son second, et qui sont morts tous deux ; c’est pourquoi il n’a pu répondre au dernier livre de M. Riolan. [25][57]

Ce 29e d’octobre. Votre M. Basset m’a rapporté mon Silvaticus et fait comme un homme qui ne craint rien. Je ne lui ai rien dit de son procès, ni lui à moi ; je me tiens sur le bon bout comme lui, [26] et faisons tous deux bonne mine. Je vous prie, vous et tout votre Collège, de penser à vous bien défendre. Je ne lui parlerai jamais d’accord s’il ne m’en parle car autrement, j’aurais mauvaise grâce et me rendrais suspect envers lui. Combien qu’il ne me dise mot, je crois pourtant qu’il ne me visite que pour voir si je lui en parlerai.

Je viens d’apprendre que M. de Sorbière est arrivé et qu’il a apporté la nouvelle que toutes les œuvres de feu M. Gassendi [58] ne peuvent être achevées à Lyon que près de la Saint-Jean ; que Cromwell [59] affectionne fort sa conquête de Flandres, [60] à Mardyck [61] et Bourbourg, [62] et qu’il a même envie d’y venir lui-même en personne avec une armée de 40 000 hommes. On dit ici que ce qui embarrasse le plus nos gens de delà sont nos troupes qu’il faut conserver pour la guerre de l’été prochain en leur donnant des quartiers d’hiver.

M. Volckamer [63] m’a mandé qu’il a reçu les livres qu’avez eu le soin et la bonté de lui envoyer, dont je vous remercie, et que M. Guernerus Rolfinckus [64] s’en va faire réimprimer son Anatomie, augmentée de beaucoup ; en ce cas-là, il faut qu’il la mette in‑fo car elle est déjà bien grosse in‑4o.

Ce 2d de novembre. Voilà un jeune médecin nommé M. Monin, de Vivarais, qui a ici étudié quelque temps, et assez bien, et qui est fort honnête homme, qui me vient de dire adieu, s’en retournant en son pays. [27][65] Je lui aurais donné la présente (j’entends les quatre pages de ci-dessus), mais je m’en suis retenu quand il m’a dit qu’il pourrait bien ne partir que dans quatre jours. Il a dessein de vous aller voir, je lui ai fait voir votre portrait placé entre Fernel et le chancelier de L’Hospital, et m’a promis de venir encore une fois me voir avant que de partir ; et en ce cas-là, je pourrai bien lui donner quelque petit mot de lettre pour vous. Il dit qu’il demeurera quelque temps en son pays et par après, qu’il s’en ira demeurer à Grenoble. M. Dinckel [66] vient de sortir de céans, je lui ai donné une lettre pour être envoyée à Strasbourg et être rendue à M. Melchior Sebizius [67] qui est à mon gré un excellent homme ; mais comme il est fort vieux, je suis bien aise de faire connaissance avec lui avant qu’il parte de ce monde. J’ai délivré à M. Fourmy quatre exemplaires du nouveau Cornelius Celsus qui m’est dédié et qu’il enfermera dans la première balle qu’il enverra à Lyon, qui sera bientôt. Ces quatre sont pour vous, MM. Gras, Guillemin et Falconet, auxquels vous les distribuerez, s’il vous plaît, avec mes très humbles recommandations. Un homme m’a dit aujourd’hui que Basset lui avait dit (c’est un médecin de Gisors [68] nommé Rassyne, [69] qui a connu Basset à Montpellier) [28] qu’il n’a que faire des médecins de Lyon et qu’il espère de n’être point renvoyé devant eux, mais d’être examiné par quatre médecins de la Faculté de Paris en présence de son rapporteur, sunt propria eius verba, [29] et qu’il sera reçu, d’autant qu’il entend bien la chicane de l’École. Voyez-vous comment ce jeune homme parle confidemment et présomptueusement de l’événement de son procès ? Je viens de rencontrer M. Le Gagneur [70] qui m’a dit qu’il ne vous a pas vu en passant à Lyon, mais seulement MM. Guillemin, Falconet et Garnier qui l’avaient été saluer en son hôtellerie : n’est-ce pas que vous étiez obligé de l’aller là trouver ? Ce petit homme n’était autrefois que glorieux, mais aujourd’hui qu’il est courtisan, je le trouve fort impudent ; il n’y a pourtant guère de raison, ni à l’un, ni à l’autre.

On dit ici que M. de Servien, [71] surintendant des finances, s’en va être premier président. C’est pour avoir là un homme au gré du Mazarin qui soit à lui plus que n’était pas feu M. de Bellièvre. [72] On parle aussi d’ôter les sceaux à M. Séguier, chancelier. [73] {Faites-moi une grâce : M. Sauvageon [74] m’a dit en son dernier voyage que Louis Duret [75] était cité dans le Varandæus ; obligez-moi de me mander en quelle page c’est, et si d’aventure vous ne le savez, tâchez de le savoir de notre bon ami M. Gras.} Je l’ai trouvé, c’est dans le Pronostic[76] page cc[30] Le Io. Heurnius de M. Ravaud [77] est-il en bon train, est-ce leur dessein après cela d’imprimer tout le Cardan ? [78] Comme nous étions hier assemblés en notre Compagnie pro Decano prorogando et eligendis professoribus[31] un ancien chirurgien, [79] député de tout le troupeau, [80] nous vint demander la paix, au nom de Dieu la paix, et qu’ils ne voulaient point plaider contre nous ; [81] et après nous avoir fait force soumissions, il sortit. Sur quoi fut délibéré et conclu que quelques députés s’assembleraient jeudi prochain chez le doyen, [82] qui entendraient leurs propositions. Je suis un des neuf députés, nous verrons et ouïrons les plaintes et les soumissions de ces laquais bottés [83] et de ces corps glorieux qui ne seront de longtemps canonisés. [32]

Le roi est ici arrivé hier à cinq heures du soir et le même jour, mourut ici M. d’Elbeuf [84] le père, âgé de 63 ans.

J’ai appris aujourd’hui qu’au-devant des œuvres de feu M. Gassendi, [85] on a dessein d’y mettre sa vie. Un certain nommé M. de Neuré, [86] qui est précepteur du fils de M. de Longueville [87][88] et fort affectionné à M. Gassendi, avait entrepris de faire sa vie et en avait reçu des mémoires, que l’on dit qu’il a renvoyés. J’apprends que ce sera M. de Sorbière [89] qui la fera ; et pour cet effet, outre lesdits mémoires, on lui mettra entre les mains le tome de ses épîtres, duquel il pourra apprendre plusieurs particularités. [33]

Un des nôtres m’a aujourd’hui parlé d’un livret in‑8ode febribus, fait par un Anglais et imprimé en Angleterre, dans lequel il [90] blâme fort le bézoard [91] et la thériaque [92] dans la guérison des fièvres. [34] Enfin, j’espère que l’on se dépaysera et se désabusera de tant de bourdes et de fourberies que les Arabes [93] et les apothicaires ont fourrées dans la médecine.

Mais j’espérais que M. Gras [94] ferait mettre dans son Varandæus [95] quelque éloge aut breviarum vitæ [35] de cet auteur ; il méritait bien d’être connu à la postérité et j’ai regret que cela n’a été fait, il vaut mieux que beaucoup d’autres.

Le prince d’Harcourt, [96] fils aîné de M. d’Elbeuf, lequel mourut hier, est pareillement ici fort malade du poumon, dont l’on dit qu’il mourra. [36] Les Espagnols ont attaqué Mardyck et en ont été repoussés avec perte de cinq ou six cents hommes. On dit que le duc de Mantoue [97] a donné Casal [98] aux Espagnols qui, en récompense, lui donnent Crémone ; [37][99] cela est fort contre nous et contre le duc de Savoie. [100] On dit que le roi de Hongrie [101] arme puissamment en toute l’Allemagne et que cela nous obligera de penser à la guerre le printemps prochain, de bonne heure ; et même que le roi retournera de bonne heure à Metz à cause de ces nouveaux mouvements.

Je vous baise très humblement les mains, et à mademoiselle votre excellente femme, laquelle j’honore de tout mon cœur, et suis de tout mon cœur, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur,

Guy Patin.

De Paris, ce mardi 6e de novembre 1657.


Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr
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