[Ms BIU Santé no 2007, fo 116 vo | LAT | IMG]
Au très distingué M. Christiaen Utenbogard, à Utrecht. [a][1]
Prévenu par votre compatriote chirurgien qui loge chez M. Du Hallier, dans le faubourg Saint-Germain, [2][3][4] que quelqu’un part en hâte pour votre pays par la poste à cheval, j’ai écrit ce petit mot pour vous faire savoir que je suis en vie et me porte bien. Je m’inquiète de votre santé, comme celle de M. Marten Schoock : [5] s’il va bien ; s’il a terminé l’édition de son livre de Fermentatione et la seconde, augmentée, de son livre de Cervisia ; [6] et aussi s’il pense à envoyer son fils aîné chez nous cet hiver, ou au printemps prochain. [1][7] Vous m’écrirez de tout cela quand vous voudrez, et vous présenterez de ma part mes plus profondes salutations, s’il vous plaît, à ce très distingué M. Marten Schoock. Faites en sorte, je vous prie, que la lettre ci-jointe soit remise à Simon Moinet, à Amsterdam. [8] Notre différend avec le pape n’est pas encore apaisé. [2][9][10] Notre roi a racheté Dunkerque à l’Anglais, rubis sur l’ongle et argent comptant, pour la somme de cinq millions ; [11][12][13] il s’y rendra en belle compagnie après l’accouchement de la reine, qui est imminent. [3][14][15] Un médecin de Bordeaux, nommé Galateau, a récemment publié un petit livre en français sur la fermentation, contre Thomas Willis, médecin anglais, savant et expérimenté ; [4][16][17] Si M. Marten Schoock nourrit quelque désir de l’avoir et s’il ne peut l’obtenir de vos marchands qui font affaire à Bordeaux, je le lui enverrai sans peine et de fort bon cœur. Vale, très distingué Monsieur, et aimez-moi. M. Fouquet, naguère notre surintendant des finances, est encore en prison ; on dit que la colère du roi à son encontre s’adoucit, et peut-être qu’adviendra ce que souhaitent beaucoup de gens ; [18][19] et si cela arrive, ce qu’a dit Juvénal, Dat veniam corvis, vexat censura columbas, ne sera-t-il pas vrai ? [5][20] Vale.
Le 12e de novembre 1662.
Vôtre de tout cœur, Guy Patin.