L. 895.  >
À André Falconet,
le 21 décembre 1666

Monsieur, [a][1]

Il ne m’ennuie pas de vous écrire, mais je suis fâché que je n’aie quelque bonne nouvelle à vous mander, telles que seraient la paix générale en toute l’Europe, le rabais de la taille [2] et des autres impôts en France, [3] la conversion du Turc, [4] la conquête des Indes Orientales, [5] etc. Il est vrai que tout cela est bien plus à souhaiter qu’à espérer. [1] On dit que la paix est faite entre les Anglais, les Danois, les Hollandais et les Français. Je pense bien que cela se fera à la fin, mais il faut attendre le boiteux et si les Anglais n’y pensent tout de bon, il faudra qu’ils se résolvent à une forte guerre le mois de mai prochain. [6] On parle ici d’un accord entre l’Espagne et le Portugal, et que le roi [7] en a fait offrir au Conseil d’Espagne sa médiation, ce qui a été pris en bonne part. [8] Le roi et toute la cour seront ici de retour le 8e de janvier prochain et on croit que le roi ira en Bretagne au commencement de la campagne pour y voir son armée navale à Brest. [2] C’est aujourd’hui Saint-Thomas, j’apprends que l’on fait à Lyon ce jour-là des échevins. [9] Je souhaite que l’élection en tombe sur notre cher ami et que le jeune Henri, [10] qui est allé à Lyon pour haranguer ce jour-là, en vienne à son honneur. [3] J’attends des lettres de M. Spon pour réponse à ma dernière touchant les manuscrits de Gaspard Hofmann [11] que j’ai envoyés il y a quelque temps à M. Anisson, [12] sur la parole qu’il m’a donnée de les imprimer à Lyon fort correctement en deux petits volumes in‑fo qui se pourront relier ensemble tout en un. [4] Je vous baise très humblement les mains et suis de tout mon cœur votre, etc.

De Paris, ce 21e de décembre 1666.


a.

Bulderen, no ccccxxxv (tome iii, pages 212‑213).

1.

Nuance entre souhaiter, « désirer quelque chose », et espérer, « prétendre à un bien qu’on prévoit pouvoir obtenir, vivre dans cette attente » (Furetière).

2.

Louis xiv mettait alors toute son énergie à renforcer la Picardie et la Champagne en vue de préparer sa guerre (dite de Dévolution) contre les Pays-Bas espagnols (Mémoires, tome 1, page 218, année 1666) :

« Je publiais cependant, pour amuser le monde, que j’allais faire un voyage à Brest, dont j’avais souvent compté les journées, parlant à mes domestiques, et même prescrit l’ordre qui devait être observé dans la marche des troupes de ma Maison. »

Le roi habita principalement à Saint-Germain, avec de nombreux voyages à Paris et à Versailles, jusqu’à son départ en Flandre pour la guerre de Dévolution, le 16 mai 1667.

3.

André Falconet, « notre cher ami », allait en effet être élu échevin de Lyon (v. note [7], lettre 896) ; le « jeune Henri » était probablement son troisième fils, surnommé le chevalier (v. note [10], lettre 745), qui avait étudié à Paris auprès de Guy Patin jusqu’en février 1664, pour devenir avocat.

4.

Nouveau méandre dans l’interminable publication des manuscrits des Chrestomathies de Caspar Hofmann (v. note [17], lettre 192).


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 21 décembre 1666

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(Consulté le 29/03/2024)

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