L. 409.  >
À Hugues II de Salins,
le 30 juillet 1655

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Hugues II de Salins, le 30 juillet 1655

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(Consulté le 19/03/2024)

 

Monsieur, [a][1]

J’ai bien connu feu M. Florent [2] qui était un très savant homme, [1] de la mort duquel j’ai bien eu du regret, aussi bien que j’en ai de votre petit. [3] Dites s’il vous plaît à mademoiselle votre femme, [4] qu’elle se conserve mieux une autre fois, qu’elle ne se laisse point choir, qu’elle se fasse tirer du sang en chaque grossesse trois fois pour le moins ; ou autrement, que je me fâcherai contre elle. [5]

Le Decas medica Porti [6] se recouvre quelquefois, je vous achèterai le premier que je rencontrerai ; votre Poétique de Scaliger [7] est un excellent livre ; de Claudio Frugeret nihil unquam audivi[2][8] L’Encheiridium medico-chirurgicum est fort bon en sa première partie, sunt Adversaria Fernelii particularem methodum meditantis ; [3][9] l’autre est peu de chose ; c’était un chirurgien savoyard nommé Chalumeau. [10] La meilleure édition de Gorræus [11] est de l’an 1622 à Paris. L’auteur [12] est ici bien vieux, a quo nihil tale expectandum[4] Consilia sunt vere Fernelii, sed qui ea post obitum eius ediderunt, eius honori parum consuluerunt : [5] cela n’est point limé comme ses autres ouvrages et ne les a jamais faits edendi animo[6] De Lue venerea et Consilium pro epileptico sont bons et polis, et edendi animo scripta[7]

Je ne connaissais point votre M. Boussard, nunc vir mihi apprimus notus est[8] Quercetanus [13] est un mauvais auteur, c’était un ivrogne qui ne savait rien et qui faisait faire ses livres pour de l’argent.

Votre Fabricius ab Aquapendente [14] est fort bon. Ambroise Paré [15] mérite d’être lu. Laissez là ces Arabes [16] ut adhæreas Græcis[9] Tout ce qu’a fait Herc. à Saxonia [17] est fort bon. [10] Signa morborum sinit repetenda ex Galeno, libris de Locis affectis, Fernelio in Pathologia, Sennerto et Hofmanno, lib. 3 Instit[11] De Cautelis medicorum, je n’en connais aucun qui vaille. [12][18] Tous les Térence [19] sont bons, diversorum est le meilleur. [13] Lud. Vives [20] est un fort bon auteur : de Disciplinis, ce qu’il a fait in D. Augustinum de Civ. Dei, etc., tout cela est fort bon, et principalement son livre de Veritate relig. christianæ[14] L’Index de Brasavola [21] est fort bon et nécessaire au Galien. [15] Lud. Vives était un Espagnol, savant homme, qui avait demeuré en Angleterre et est mort à Bruges en Flandre. [22] Il était grand ami d’Érasme [23] et ce fut par son conseil qu’il travailla sur saint Augustin, [24] de Civitate Dei.

Le roi [25] est sur la frontière de Flandres. Les Espagnols ont fait couper la tête au gouverneur de Landrecies [26] qui ne s’est pas bien défendu et l’a trop tôt rendue. Le roi était à Guise [27] le 26e de juillet. [16] L’armée du roi, qui est grande et belle, devait hier entrer dans le pays ennemi et y faire grands dégâts, et courir jusqu’à Bruxelles. [28] Il court ici quelques livres contre le cardinal de Retz [29] par ordre de la domination. [17] On dit que le pape [30] veut que les princes de l’Europe fassent la paix, je ne sais s’il en pourra venir à bout. On y parle d’une grande alliance entre Cromwell [31] et le Turc, [32] dont les Hollandais sont bien fâchés. La peste [33] est cruelle en quatre villes de Hollande. Le prince Thomas [34] est avec notre armée en Italie devers Milan [35] aussi bien que le duc de Modène, [36] qui tous deux y sont pour nous. On dit que Cromwell a envoyé en l’Amérique, [37] une flotte de 60 vaisseaux sous l’amiral Penn, [38] dans lesquels sont 15 000 hommes ; ils sont arrivés à Cuba [39] et Hispaniola, [40] ils ont pris l’île de San Domingo, ont passé le détroit du Maire, [41] sont entrés dans la mer del Zur, sont allés au Pérou [42] et ont rencontré la flotte du roi d’Espagne [43] chargée d’argent, qu’ils ont entourée et prise. [18] Cela, s’il est vrai, accommodera fort les Anglais, et incommodera encore plus le roi d’Espagne et tous les marchands à qui il doit, ce qui causera plusieurs banqueroutes. [44] On dit que le prince de Condé est bien las de la guerre et que tous ses gens le quittent ; [45] il se plaint fort des Espagnols et peut-être même qu’eux à la fin, lui joueront quelque mauvais parti.

Je me recommande à vos bonnes grâces, à mademoiselle votre femme, à Messieurs vos père et frère, et serai toute ma vie, Monsieur, votre très humble et obéissant serviteur,

Guy Patin.

De Paris, ce vendredi 30e de juillet 1655.


Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr
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