À Charles Spon, le 19 juin 1643, note 5.
Note [5]

Dans La mort de Louis xiii, Étude d’histoire médicale d’après de nouveaux documents (Paris, A. Fontemoing, 1897, in‑8o), chapitre intitulé Pompe funèbre et obsèques (pages 47‑61), Paul Guillon a transcrit les circonstances et le rapport officiel de l’autopsie du roi (extraits du manuscrit de Chantilly, no 437, fos 369‑448). Elle eut lieu au château de Saint-Germain le 15 mai à cinq heures du matin « en la galerie qui est proche du cabinet dans lequel le roi était mort ».

Les médecins et chirurgiens présents étaient Charles i Bouvard, premier médecin du roi, Pierre i Seguin, premier médecin de la reine, François Vautier (v. note [26], lettre 117), premier médecin de la feu reine mère du roi (Marie de Médicis), Abel Brunier (v. note [14], lettre 246), premier médecin de M. le duc d’Orléans, Jean Chicot et Augustin Conrade médecins du roi lors en quartier, Michel i de La Vigne, doyen de la Faculté, René Moreau, lecteur et professeur ordinaire du roi, Pierre Yvelin, médecin de la reine régente, Jean de Nogent, médecin servant du duc d’Orléans, Baptiste Bontemps, premier chirurgien et premier valet de chambre de Sa Majesté, Nicolas Pescheval premier chirurgien de la reine régente, Mathieu Colart, premier chirurgien du duc d’Orléans, Antoine Regnault, Pierre Lycot et Alexandre Le Roy tous trois chirurgiens servants du roi, Sébastien Colin, chirurgien de longue robe à Paris, « appelés pour assister à ladite ouverture à laquelle opéraient les sieurs Regnault, Lycot et Le Roy de la main, le sieur Bouvard premier médecin verbalisait et le sieur Moreau médecin susdit écrivait ».

« Rapport des médecins étant à l’ouverture du corps du roi.
Nous avons trouvé les cinq téguments universels communs et particuliers consommés, l’épiploon aussi consommé, les intestins grêles démesurément boursouflés et de couleur blafarde, et nageant dans une quantité de sérosités sanieuses et purulentes, la face extérieure du foie toute pâle comme ayant été bouilli, l’estomac rempli d’une sérosité noirâtre avec un ver de demi-pied de longueur et plusieurs autres petits, laquelle matière avait marqueté {a} le fond de l’estomac, l’intestin duodénum {b} d’une grandeur démesurée rempli de bile porace, {c} le jéjunum {d} rempli de même matière et tout jaune par dedans, l’ileum {e} moins teint et moins plein d’une matière plus épaisse, le cæcum {f} dès son commencement rouge et dépouillé de sa membrane charnue, continuant de plus en plus jusqu’à la fin du côlon, où s’est trouvé un ulcère qui a percé l’intestin causé par la descente de la boue qui sortait du mésentère {g} inférieur qui s’est trouvé ulcéré en plusieurs endroits, et qui a versé sa matière purulente qui s’est trouvée amassée dans tout le ventre, dans laquelle nageaient les intestins, à la quantité de plus d’une chopine. {h} Outre la couleur susdite du foie, on a trouvé en sa partie cave {i} qu’il se fendait et rompait en le touchant, dépouillé de sa propre membrane ; étant coupé, il s’est trouvé tout desséché et recuit dedans comme dehors. Au rein droit il s’est trouvé un petit abcès plein de boue verte enfermée dans un kyste dans sa partie intérieure et charnue. Tout le poumon du côté gauche entièrement attaché aux côtes et moins du côté droit ; en la partie supérieure du gauche, s’est trouvée une grande cavité ulcérée pleine de boue. Tous lesquels accidents ont été reconnus pour véritables causes de son décès. »


  1. Strié.

  2. Premier segment de l’intestin grêle, situé à la sortie de l’estomac.

  3. Couleur verdâtre tirant sur celle du poireau.

  4. Deuxième segment du grêle.

  5. Iléon, troisième et dernier segment du grêle.

  6. Premier segment du côlon (gros intestin), où s’abouche l’iléon.

  7. V. note [4], lettre 69.

  8. Moitié d’une pinte.

  9. Sa concavité, c’est-à-dire sa face inférieure.

Ces observations ont mené à évoquer deux diagnostics : soit une tuberculose multiviscérale (poumon, rein, côlon), soit une maladie inflammatoire chronique de l’intestin (recto-colite hémorragique ou maladie de Crohn, qui aurait incommodé Louis xiii pendant de longues années) compliquée de tuberculose ; v. par exemple Sidney Goldfischer et Michel Janis, A 42-year-old king with a cavitary pulmonary lesion and intestinal perforation [Un roi de 42 ans avec une caverne pulmonaire et une perforation intestinale] (Bulletin of the New York Academy of Medicine, 1981 ; 57 : 139‑143).

Le rapport d’Olivier Le Fèvre d’Ormesson (Journal, tome i, pages 43‑44) est plus politique et moins savant :

« Le lendemain de sa mort, il fut ouvert en présence du duc de Nemours et du maréchal de Vitry, députés à cet effet, étant de l’ordre que l’ouverture se fît en présence d’un prince et d’un officier de la Couronne. Il avait un abcès dans le poumon, un dans le mésentère, un dans le foie et un dans le rein ; il avait les boyaux percés et, dans le creux de l’estomac, un sac plein de vers ; les uns disent que ce sont les vers qui les ont percés, les autres que c’est du poison. Néanmoins, l’on dit que les médecins ont donné certificat comme < quoi > il n’y avait pas de poison. Dans le petit ventre, il y avait une telle corruption que ceux qui l’ouvraient pensèrent crever. »

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 19 juin 1643, note 5.

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(Consulté le 19/04/2024)

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