Jean-Louis de Nogaret, dit le chevalier de La Valette (mort en 1650) était fils naturel de Jean-Louis de Nogaret, duc d’Épernon (v. note [12], lettre 76), et donc demi-frère du duc d’Épernon (Bernard de Nogaret, v. note [13], lettre 18) et du cardinal de La Valette. Chevalier de Malte, général de l’armée navale des Vénitiens en 1645, La Valette avait été nommé lieutenant général des armées du roi. Ayant obtenu un passeport pour sortir de Paris, il entretenait d’étroites relations avec la cour. Emprisonné le 11 février, le chevalier fut libéré le 4 avril suivant (Jestaz). Gravement blessé en attaquant l’Isle-Saint-Georges (v. note [47], lettre 240), le 4 août 1650, La Valette mourut à Castres peu après.
Retz (Mémoires, pages 418-421) :
« Cette nouvelle {a} arriva justement dans le moment que l’on était encore devant le feu {b} de la Grand’Chambre et que l’on était sur le point de s’asseoir ; tout le monde s’y entretenait de ce qui était arrivé la veille à onze [heures] du soir dans les Halles, où le chevalier de La Valette avait été pris semant des billets très injurieux pour le Parlement, et encore plus pour moi. Il fut amené à l’Hôtel de Ville et je le trouvai sur les degrés comme je descendais de la chambre de Mme de Longueville. Comme je le connaissais extrêmement, je lui fis civilité et je fis même retirer une foule de peuple qui le maltraitait. Mais je fus bien surpris quand je vis qu’au lieu de répondre à mes honnêtetés {c}, il me dit d’un ton fier : “ Je ne crains rien ; je sers mon roi. ” Je fus moins étonné de sa manière d’agir quand l’on me fit voir ces placards, qui ne se fussent pas en effet accordés avec des compliments [civilités]. Les bourgeois m’en mirent entre les mains cinq ou six cents copies qui avaient été trouvées dans son carrosse. Il ne les désavoua point. Il continua à me parler hautement. Je ne changeai pas pour cela de ton avec lui. Je lui témoignai la douleur que j’avais de le voir dans ce malheur, et le prévôt des marchands l’envoya prisonnier à la Conciergerie. Cette aventure, qui n’avait pas déjà beaucoup de rapport avec ces bonnes dispositions de la cour à la paix, dont Brillac et le président Aubry s’étaient vantés d’être si bien et si particulièrement informés, cette aventure, dis-je, jointe à l’apparition d’un héraut, qui paraissait comme sorti d’une machine, à point nommé, ne marquait que trop visiblement un dessein formé. Tout le Parlement le voyait comme tout le reste du monde ; mais tout ce Parlement était tout propre à s’aveugler dans la pratique parce qu’il est si accoutumé, par les règles de la justice ordinaire, à s’attacher aux formalités, que dans les extraordinaires, il ne les peut jamais démêler de la substance.
[…] Le chevalier de La Valette, esprit noir mais déterminé, et d’une valeur propre et portée à entreprendre, ce qui n’a pas été ordinaire à celle de notre siècle, avait formé le dessein de nous tuer, M. de Beaufort et moi, sur les degrés du Palais, et de se servir pour cet effet du trouble et de la confusion qu’il espérait d’un spectacle aussi extraordinaire que celui de ce héraut jetterait dans la ville. La cour a toujours nié ce complot à l’égard de notre assassinat ; car elle avoua et répéta {d} même le chevalier de La Valette à l’égard des placards. Ce que je sais, de science certaine, est que Cohon, évêque de Dol, dit l’avant-veille à l’évêque d’Aire {e} que M. de Beaufort et moi ne serions pas en vie dans trois jours. »
- Du héraut de la porte Saint-Honoré.
- La cheminée.
- Amabilités.
- La cour reconnut et réclama.
- Gilles Boutault, évêque d’Aire-sur-Adour.
La suite du récit de Guy Patin, sans être aussi précise, donne quelque crédit aux mauvais desseins du chevalier de La Valette. |